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05 / 04 / 2016 | 6 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Quels sont les indicateurs économiques et sociaux portées en place publique par les syndicats ?

Face à la frilosité des comités d’entreprise et des CHSCT à se revendiquer comme instance de première ligne, ce sont essentiellement les syndicats qui portent en ordre souvent dispersés des données économiques et sociales sur la place publique.



Jusqu’où aller dans la diffusion des données sociales ? Lesquelles ? Par qui ? Pour en faire quoi ? Retour sur le colloque du 15 décembre 2015, organisé en partenariat avec Malakoff Médéric, Tandem Expertise et Technologia au cours duquel 18 experts ont illustré les interactions croissantes entre les différents producteurs de données sociales. Si la tendance est à l’ouverture, le traitement de ces données reste encore très compartimenté.

Sur les 110 milliards d’euros de l’épargne salariale, 15 sont gérées sur des produits labellisés par le comité intersyndical de l’épargne salariale qui sort entre 30 et 40 % des sociétés sur des critères extra-financiers. C’est l’illustration du chemin qu’il reste à parcourir pour que les représentants du personnel se saisissent du levier que représentent les indicateurs extra-financiers alors que l’épargne salariale concerne 30 % des salariés.

Les données économiques et sociales, un sujet difficile à manier et propice à l’instrumentalisation mais une responsabilité pour les syndicats que de pousser les directions à donner le plus de sens possible aux indicateurs rendus publics. Les représentants des salariés ont les moyens de mettre les discours en phase avec la réalité des pratiques. En commençant par diffuser publiquement des données sur lesquelles les directions préfèrent faire l’impasse.

« Il faut rendre l’information intelligible. Les indicateurs restent difficiles à manipuler par une majorité d’élus du CE. Notre mission consiste à les rendre accessibles et éviter les erreurs d’interprétation. Il n’est par exemple pas facile d’entendre que la distribution de dividendes peut avoir des effets positifs sur la participation. La rentabilité est aussi délicate à interpréter. Il faut prendre le temps de bien expliquer. C’est incompatible avec la course à l’immédiateté ambiante mais c’est plus que jamais indispensable », explique Julien Sportes, directeur associé de Tandem Expertise, qui considère que les CE et les CHSCT sont les institutions les plus enclines à prendre cette distance pour éclairer les données. Sur les questions complexes de l’optimisation fiscale et de ses incidences sociales mais aussi pour donner plus de sens aux indicateurs que l’on retrouve dans les bilans sociaux et la base de données économiques et sociales. Quel est le sens d’un salaire moyen, d’un nombre d’heures de formation globale et d’une pyramide des âges tout aussi générale ? « Dans le cadre de la qualité de vie au travail, le CE et le CHSCT peuvent prendre le temps d’adresser un questionnaire sur la réalité des conditions de travail avec des questions qu’une direction ne souhaitait peut-être pas poser. Ce sont ensuite des données qui nourrissent le dialogue social », avance Julien Sportes qui souligne la difficulté qu’auront les nouveaux représentants des DUP à digérer le croisement des données tant économiques que sociales et liées aux conditions de travail dans une seule instance.

La culture de la donnée sociale est loin d’être partagée par les représentants du personnel. « Pourquoi aussi peu de commissions de développement RSE dans les CE pour échanger sur les indicateurs sociaux ? Que font les entreprises des données sur la maladie, sur le logement », interroge Jean-Frédéric Dreyfus, expert RSE CFE-CGC et administrateur salarié de Crédit Agricole Corporate and Investment Bank.

Des représentants du personnel à convaincre

D’évidence, la protection des données est devenue aujourd’hui une responsabilité pour le représentant du personnel : celui-ci doit apprendre à contrôler ce qu’il pourra transmettre, qui aux salariés, qui à la presse etc. Bref, il engage sa responsabilité vis-à-vis de la marche de l’entreprise. Le délit d’initiés est toutefois encore loin. Selon Jean-Frédéric Dreyfus, « les critères sociaux ne sont abordés dans les conseils d’administration qu’une fois par an, au moment de la présentation du bilan social. C’est un paradoxe parce que ces indicateurs extra-financiers constituent le principal risque de réputation pour une entreprise. Il y a un risque opérationnel à ne pas fournir la cartographie du social ». Reste encore à essaimer... Plus les organisations syndicales disposeront de représentants dans les CA, plus les entreprises devront composer avec les données social

es. « La responsabilité des élus à rendre publiques des données dépend du contexte, des objectifs et des conséquences. Il y a un devoir d’alerte quand par exemple une information est fausse. D’où l'intérêt de savoir faire pression sur la réputation d’une entreprise car c’est là que se trouve le réel contre-pouvoir », considère Geoffroy de Vienne, représentant CFTC sur la plate-forme nationale d’actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) animée par France Stratégie, le service de prospective rattachée au Premier Ministre. Rendre un avis sur la teneur du rapport de gestion de l’entreprise qui doit intégrer des données extra-financières est un premier levier d’action dont les CE sous-estiment l’écho. « Il y a une

réglementation en matière de reporting extra-financier mais pas de normalisation », rappelle Michel Capron, président du Forum citoyen pour la RSE et vice-président de la plate-forme RSE qui vise à faire converger employeurs, syndicats et associations sur des indicateurs partagés. Sujets des débats : le périmètre du reporting avec un patronat qui entend rester le plus global possible ou encore les limites à fixer en matière d’optimisation fiscale. « Le nombre d’indicateurs ne doit pas être un frein. Ce sont des données différentes que nous avons besoin, selon que l’on soit salarié, syndicaliste, dirigeant, investisseur, militant associatif ou représentant d’un État. Les technologies de big data doivent permettre de fournir les bonnes données aux gens qui en ont besoin », affirme-t-il en rappelant que le nombre d’indicateurs extra-financiers que les entreprises doivent intégrer dans leur rapport de gestion est passé de 80 à 42.

Salariés, entreprises, institutions publiques : 3 porteurs de données sociales

  • Fait nouveau, les salariés portent de plus en plus eux-mêmes leurs données sociales en les partageant sur des réseaux sociaux plus ou moins professionnels. Ce sont eux qui illustrent leur parcours professionnel en mentionnant activités, employeurs, salaire, formation, conditions de travail, santé…
  • L’entreprise est la seconde productrice de données sociales sur ses salariés. C’est une production à deux voix puisque les données sont à la fois portées par les représentants des salariés et par les directions.
  • Les institutions publiques devraient être les grands agrégateurs des données sociales. Agencées/organisées en silos, elles atteignent leurs limites pour expliquer la complexité des enjeux socio-économiques. Le besoin de diagnostic territorial sur l’emploi, les conditions de travail ou encore la santé est bien réel.

Retrouvez la troisième partie demain >

Quels sont les indicateurs économiques et sociaux portés par les directions ?

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