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22 / 04 / 2025 | 21 vues
Theuret Johan / Membre
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Depuis dix ans, les salaires dans le public ont augmenté trois fois moins vite que dans le privé

Contrairement à certaines reçues...en France, les salaires dans la fonction publique augmentent moins vite que dans le secteur privé.

 

En mars 2025, l’Insee a révélé que les écarts de rémunération entre le secteur public et le secteur privé n’ont cessé de se creuser. Le salaire net dans le public est inférieur de 3,7 % à celui du privé. Selon ces dernières données, les salaires dans le public ont augmenté de seulement 0,2 % par an depuis 2015, contre 0,7 % par an dans le privé. Cette différence de croissance salariale, couplée à une inflation galopante et un pouvoir d’achat en baisse, pèse lourdement sur les agents publics et ce, dans un contexte de pénurie de personnel.

 

Aujourd’hui, la fonction publique fait face à un double défi : d’une part, un nombre de postes vacants sans précédent et, d’autre part, une paupérisation croissante de ses agents. Cette situation est encore exacerbée par des conditions salariales qui ne parviennent plus à rivaliser avec celles du secteur privé. Mais alors, quelle solution pour rétablir l’attractivité de ces métiers essentiels ?

 

On estime que 15 % des postes ouverts aux concours de la fonction publique sont aujourd’hui non pourvus. En 2024, environ 30 000 postes sont restés non pourvus, dont près de 4 000 dans l’Education nationale, un secteur pourtant crucial. En parallèle, d’autres ministères, comme celui de la Santé, peinent à recruter des médecins, infirmiers ou aides-soignants, pour des raisons similaires liées à des rémunérations moins compétitives. Le constat est le même dans les collectivités territoriales, où 64 % des collectivités signalent des métiers en tension. Cette pénurie affecte directement la qualité des services rendus aux citoyens et engendre une surcharge de travail pour les agents en poste.

 

En dépit des quelques efforts de revalorisation des salaires dans la fonction publique, l’écart entre le public et le privé reste profond. La fonction publique, qui emploie près de 5,6 millions de personnes, connaît aujourd’hui une paupérisation inquiétante, avec près de 25 % des agents qui gagnent moins de 2 000 euros par mois et 230 000 fonctionnaires payés au smic.

 

Les revalorisations du point d’indice de 2022 et 2023 très en deçà de l’inflation, bien qu’elles aient permis des hausses ponctuelles, restent insuffisantes face au coût de la vie notamment pour les agents publics les moins rémunérés.

 

Les gels du point d’indice pendant une dizaine d’années entre 2010 et 2021 ont créé une incertitude néfaste pour les agents et offert une mauvaise habitude aux pouvoirs publics. Ces derniers se sont habitués à vouloir limiter, avec le succès qu’on connaît, les dérapages budgétaires par les non-revalorisations salariales… Est-ce vraiment de si bonne gestion quand on voit aujourd’hui les effets sur le fonctionnement des services publics ? Peut-on inlassablement utiliser les sujets salariaux des agents publics pour limiter les dépenses publiques à l’image de la mesure instaurant à partir de 2025 une baisse de la rémunération de 10 % en cas d’arrêt maladie ?

 

 

Face à cette crise, la solution ne réside pas dans une série de hausses ponctuelles mais dans une revalorisation salariale pluriannuelle. Il ne s’agirait pas d’augmentations annuelles, mais après négociations avec les syndicats, de hausses identifiées certaines années sur une période prédéfinie. En effet, comme le préconise le think tank le Sens du Service public, cette approche permettrait de donner aux agents publics une visibilité à moyen terme sur leurs salaires, de favoriser leur fidélisation, de garantir une meilleure planification budgétaire pour les employeurs publics et dans le cadre de négociations sociales de lier réformes structurelles et revalorisation salariale.

 

Une augmentation de la valeur du point constitue certes un montant important, estimé à 2,5 milliards d’euros pour une hausse de 1 %, mais elle reste nécessaire pour éviter l’effondrement de certains services publics. De plus, en raison de son étalement dans le temps, une approche pluriannuelle aurait le mérite de rétablir une trajectoire salariale prévisible et soutenable financièrement. En prévoyant ces revalorisations lors de l’adoption des lois de programmation des finances publiques, elles seraient alors intégrées aux trajectoires budgétaires.

 

Dans un contexte où la fonction publique ne peut plus se permettre de manquer de personnel qualifié dans des secteurs vitaux comme la santé, l’éducation ou la sécurité, il est temps de mettre en place une politique salariale ambitieuse et pérenne. C’est un investissement pour l’avenir des services publics et pour la cohésion sociale de notre pays.

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