Bien-être au travail : et si tout était dans notre tête ?
Hygiène de vie, conditions de travail, sécurité, prévention des risques, développement des services… Et si les efforts pour améliorer la qualité de vie au bureau étaient inutiles ? C’est ce que tendent à démontrer les résultats d’une étude Comundi parus en janvier dernier à l’issue d’une enquête sur le bien-être au travail. Améliorer les moyens de production pour être plus heureux au travail ? Les Français n’y croient pas. Le CHSCT, les organisations syndicales, les représentants du personnel, le service médical et même les ressources humaines sont clairement méprisés par les salariés qui n’espèrent aucune aide de ses personnes et préfèrent se tourner vers les collègues, le responsable ou encore la famille pour obtenir du soutien.
- L’environnement de travail ne serait donc pas considéré comme la source du mieux-être ? Elton Mayo en avait déjà fait la démonstration en 1930 [1], en expérimentant dans une usine l’impact des modifications des conditions matérielles de travail sur la productivité. Il avait remarqué que l’amélioration de ces conditions n’était pas la cause de la hausse de la productivité, mais que cela était dû seulement au fait que l’on s’intéresse aux employés, car lorsque ces conditions étaient à nouveau dégradées, la productivité augmentait toujours. Rompant avec l’hypothèse taylorienne de l’intérêt individuel, Mayo affirmait que « le désir d’être bien avec ses collègues de travail… l’emporte facilement sur le simple intérêt individuel et la logique des raisonnements sur lesquels tant de faux principes de direction se sont fondés ».
Presque un siècle plus tard, la théorie reste actuelle. En 2010, quand on les interroge, les travailleurs sont globalement satisfaits de leurs conditions de travail, ne se plaignent pas de leur matériel, et jugent l’ambiance de travail dynamique. Pour eux, le premier facteur de bien-être professionnel est l’intérêt de leur travail,qui devance largement l’ambiance de travail ou l’emploi du temps.
Les services généraux auraient-ils tout faux ?
Et pourtant, les travailleurs se disent stressés. Stress et anxiété sont le premier facteur de déséquilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, et la première source de malaise dans le travail, d’après les intéressés. Quelle en est donc la cause, si l’éclairage tamisé, la température mitigée, le mobilier high-tech, la cantine et la salle de sport ne permettent pas leur détente au bureau ? Les services généraux auraient-ils tout faux ? Leur préoccupation pour le personnel serait-elle mal orientée ? Car a-t-on vraiment demandé aux salariés ce qu’ils souhaiteraient pour être heureux ? Pour qu’il n’y ait pas un tel clivage dans l’entreprise entre services généraux et salariés, il est essentiel que la hiérarchie pense moins à ce qu’elle veut faire passer comme message au personnel dans l’intention de lui plaire qu’à écouter ce que ce personnel veut savoir et à quoi il est réceptif. C’est la communication et l’écoute que les responsables doivent développer pour rester proches de leur personnel et attentifs à leur véritables besoins. Les services généraux seront un levier pour l’entreprise en comprenant l’importance du « vivre ensemble », et de la prise en compte de l’individu comme tel, et pas seulement comme force de production. Car que demandent les salariés au juste ? En priorité, une diminution des charges de travail, première cause de stress, et une meilleure organisation qui passerait par des réformes managériales, une meilleure répartition des tâches et gestion des priorités, et davantage de formation et d’accompagnement individuel.
À l'heure où tant de salariés souffrent d'un manque de reconnaissance, l'écoute constitue indubitablement l'une des conditions nécessaires de fidélisation et d'implication des personnes. La mise en évidence des tensions, leur traitement et leur résolution reposent clairement sur la capacité d'écoute des dirigeants et des managers, et affirment leur autorité plutôt que de la mettre en péril. Il importe donc aux dirigeants et aux managers de structurer une véritable écoute de leurs collaborateurs, à tous les niveaux de l'entreprise, pour s'assurer d'un minimum de cohérence dans les choix et les orientations qui guident le travail de chacun au quotidien.
Les employés se moquent bien du moelleux de leur fauteuil, ils veulent avant tout donner du sens à ce qu’ils font, et être en mesure d’accomplir un travail bien fait. Une entreprise peut être protectrice sans être infantilisante, et faire du bien à ses collaborateurs en les considérant non seulement comme des êtres humains, mais aussi comme des êtres intelligents, capables de formuler leurs attentes et d’apporter des solutions, et cela pour le bien global de toute l’entreprise.
[1] Elton Mayo, Les expériences de Hawthorne.
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