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22 / 02 / 2018 | 15 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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Ordonnances : le refus du forfait-jour désormais passible de licenciement

Grâce à un amendement glissé au cours du débat parlementaire sur le projet de loi de ratification des ordonnances réformant le code du travail, les employeurs sont désormais autorisés à licencier les salariés qui refuseront que leur durée du travail soit calculée en nombre de jours dans le cadre d’un forfait annuel.

Le texte du projet de loi de ratification des ordonnances sur lequel députés et sénateurs se sont mis d’accord dans le cadre d’une procédure de conciliation au sein de la commission parlementaire mixte paritaire et que le gouvernement a avalisé, est définitif depuis le 14 février, date de son adoption par le Sénat en séance plénière. L’Assemblée avait fait de même le 6 février.

Il ne reste plus au gouvernement qu’à promulguer la loi d’ici le 1er mars.

Parmi les derniers amendements apportés au contenu des ordonnances, figure celui qui ôte tout caractère dérogatoire au forfait-jour, ce qu’aucune réforme du code du travail n’avait jusqu’à présent permis.

Rappel : qu’est-ce que le forfait-jour ?

Le forfait-jour est par définition un forfait annuel puisqu’il permet de rémunérer des salariés sur la base d’un nombre de jours travaillés dans l’année, sans décompte du temps de travail, dans la limite de 218 jours (au lieu de 230 pour un salarié travaillant 35 heures par semaine et avec un mois de congé).

Il est ainsi possible, dans le cadre d’un forfait annuel en jours, de travailler au-delà des limites légales des durées quotidienne et hebdomadaire du travail (10 heures et 35 heures), sans que l’employeur n’ait à payer d’heures supplémentaires.

Ce système peut s’appliquer aux cadres depuis la loi Aubry de 2000 mais aussi depuis 2005 aux salariés non cadres dont l’activité laisse une certaine autonomie dans l’organisation de leur temps de travail.

Sans cesser de dénoncer ses travers et ses dérives en termes d’accroissement du temps et de charge de travail, de confusion entre le temps consacré à la vie professionnelle et la vie privée, de risques psychosociaux, FO a toujours considéré que les cadres et salariés qui souhaitaient passer en forfait-jour pour gagner en autonomie, doivent pouvoir le faire.

Mais aujourd’hui, le volontariat n’est plus de mise.

Tour de passe-passe au Parlement…

Jusqu’à présent, y compris dans la loi El Khomri, les modalités du forfait-jour étaient traitées exclusivement dans la partie du Code du travail relative à la durée du travail.

L’astuce des parlementaires a consisté à faire en sorte (par amendement de l’article L.2254-2) que la question du forfait annuel (et donc du forfait-jour) soit cette fois également incluse dans la partie consacrée aux relations collectives de travail, plus précisément dans le chapitre consacré aux rapports entre conventions et accords collectifs de travail et contrat de travail.

Ainsi, la mise en place forfait-jour fait désormais partie des modifications concernant la durée du temps de travail et la rémunération qu’un accord d’entreprise, dit accord de performances collectives (APC), peut apporter au contrat de travail, afin de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise ou en vue de préserver ou de développer l’emploi.

Et le refus du forfait jour devient un motif de licenciement

Par conséquent, comme pour les autres modifications dans le cadre de ces accords de performances collectives, le refus du salarié devient un motif de licenciement, ce qui ne s’était jamais vu depuis la création du forfait jour, souligne Éric Peres, secrétaire général de FO-cadres.

À noter au passage qu’une autre modification durcit la formulation sur la procédure de licenciement d’un salarié réfractaire au changement, que ce soit pour la mise en place d’un forfait-jour ou de toute autre modification du temps de travail et de la rémunération.

Alors que la version d’origine de l’ordonnance [1] stipulait que : « si l’employeur engage une procédure de licenciement à l’encontre du salarié ayant refusé l’application de l’accord », sa version définitive établit désormais que L’employeur dispose d’un délai de deux mois à compter de la notification du refus du salarié pour engager la procédure de licenciement. Le « si » a disparu et la nuance n’est certainement pas anodine pour ses rédacteurs.

Bien sûr, le salarié peut toujours refuser mais à ses risques et périls. Il dispose comme auparavant d’un mois pour faire connaître son refus par écrit à son employeur. Après quoi, il lui restera encore un mois au maximum avant de savoir si le couperet du licenciement tombe ou non.

L’employeur pourra modifier le nombre de jours compris dans le forfait sans l’accord du salarié

Jusqu’à présent, toute mise en place (mais aussi modification) d’un forfait annuel, qu’il soit en heures ou en jours, devait faire l’objet de l’accord du salarié et d’une convention individuelle de forfait établie par écrit. Cette convention individuelle est autorisée et encadrée au préalable par un accord collectif déterminant un certain nombre de choses, comme les catégories de salariés pouvant être concernées, la période de référence du forfait, les modalités du droit à la déconnexion ou encore les caractéristiques principales des conventions individuelles, qui doivent notamment fixer le nombre d’heures ou de jours compris dans le forfait.

Le texte définitif de l’ordonnance précise que cette dernière disposition ne s’applique plus en cas de simple modification.

Autrement dit, l’employeur pourra augmenter à sa guise le nombre de jours compris dans le forfait.

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