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28 / 05 / 2024 | 30 vues
Jean Meyronneinc / Abonné
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Quelle "managérialisation" de l'Etat, des hôpitaux et des collectivités locales ?

Comment mesurer la diffusion des modèles organisationnels issus du « nouveau management » dans l’État, les hôpitaux et les collectivités locales ?

 

C'est la question sur laquelle la Dares (la Direction de l'animation de la recherche, des études et des Statistiques ) a planché ces derniers mois... pour examiner en détail les formes d'organisation du travail dans les administrations publiques. Elle vient de livrer ses observations et ses réflexions (à partir de nombreuses enquêtes) dans une note intéressante qui vient d'être publiée (1)

 

Les auteurs de cette note observent et soulignent que depuis plus de 20 ans, la sociologie de l'action publique a documenté la manière dont les réformes de l'État ont contribué à importer, dans les ministères, des instruments managériaux issus des grandes entreprises.

 

Ils se sont appuyés effectivement sur  les enquêtes "Conditions de travail" de  2005 à 2019 pour étendre aux administrations publiques les travaux statistiques portant sur les formes d’organisation du travail, habituellement réservés aux entreprises.

 

Les cinq classes d’organisation du poste de travail:

-  l’autonomie du métier,

- l’autonomie évaluée,

-le contrôle direct,

- le lean management

-et le taylorisme flexible.

 

Le principal constat:

 

Les professions organisées du public connaissent une érosion de leur autonomie collective sous l’effet de la diffusion des instruments d’évaluation formalisée tout en demeurant dans des organisations très qualifiantes.

 

Les cadres de l’État et des établissements de santé adoptent largement le modèle du management par objectifs.

Les agents subalternes des ministères et des hôpitaux publics voient se développer des organisations néotayloriennes très contraignantes.

Il apparaît ainsi que les enjeux de la diffusion des techniques de gestion issues des grandes entreprises sont très différents selon la position des agents dans les hiérarchies administratives, du fait d’une répartition inégale des marges de manœuvre et des contraintes managériales.

 

Les principaux éléments de  conclusion: 

 

Pour les auteurs de cette étude, " si  les formes d’organisation du travail des fonctionnaires ont toujours été différentes selon les métiers et leur position dans les hiérarchies ministérielles ou territoriales, plusieurs décennies de réformes managériales, de pression budgétaire et d’intensification du travail ont ainsi largement reconfiguré les relations entre acteurs au sein des bureaucraties publiques."

 

"L’analyse statistique révèle que les marges de manœuvre et les contraintes managériales portées par les réformateurs se répartissent de manière très inégale entre les différentes catégories sociales qui composent l’administration française."

"Au moyen du management par objectifs, les hauts fonctionnaires renforcent leur capacité de gouverner à distance le travail de cadres intermédiaires de la fonction publique toujours très autonomes...mais ... Les professions organisées subissent une certaine érosion de leur autonomie collective sous l’effet de la diffusion des techniques d’évaluation..."

 "Les employées, les ouvriers et les cols blancs subalternes, enfin, subissent la montée de plusieurs formes de néotaylorisme administratif."

"Si les règles, les organigrammes, les budgets et les dispositifs managériaux peuvent être imposés depuis le sommet, les organisations concrètes ne sont jamais décidées par décret par les hauts fonctionnaires des administrations centrales, pas plus qu’elles ne sont conçues « clés en main » par des consultants en management. "

"Elles semblent plutôt le fruit du lent travail d’organisation réalisé par les cadres inter médiaires de la fonction publique, dans des contextes déterminés par les contraintes et les ressources qu’ils reçoivent de leurs élites ministérielles ou territoriales "

"En d’autres termes, il n’est pas nécessaire que les administrations aient explicitement introduit une forme de lean management, en recourant à des cabinets de conseil chargés de mettre en place des outils de gestion portant ce label, pour que le travail concret des fonctionnaires de première ligne en soit venu à être organisé « au plus juste » par les cadres de l’État et des hôpitaux."

Les encadrants de proximité ont simplement pu faire ce qu’ils pouvaient – à partir d’une socialisation professionnelle qui les disposait soit à embrasser les techniques managériales, soit à les critiquer du point de vue des « valeurs du service public » – pour continuer à faire fonctionner les administrations dans un contexte d’intense pression budgétaire et de reporting chiffré auprès des hauts fonctionnaires, avec pour résultat un renforcement des contraintes pesant sur les employées et les professionnelles chargées de produire les services publics au quotidien."

 

...Autant de réflexions à intégrer dans les débats du moment sur la Fonction Publique..?

 

(1) Pour plus de détails..la note de la Dares est disponible avec le lien ci-dessous:

 

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