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28 / 07 / 2015 | 23 vues
Nadia Rakib / Membre
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Quand l'absence prolongée du salarié devient-elle « perturbante » ?

En cas d’accident ou de maladie non professionnel, le salarié peut bénéficier d’un arrêt de travail : le contrat de travail est alors simplement suspendu. Toutefois, une absence prolongée ou des absences fréquentes peuvent entraîner le licenciement.

Quand une absence prolongée d’un collaborateur devient « perturbante » cela revient à dire qu’elle dérange le déroulement des événements, de l'ordre d'un groupe, en somme du fonctionnement d'une organisation.

Dans cette affaire, il s’agissait d’un salarié qui avait été engagé par une société sur un poste d’inspecteur. À la suite de son arrêt maladie, il a été licencié et a décidé de saisir la juridiction prud'homale pour faire dire et juger son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement de dommages et intérêts.

Ce dernier arguait du fait que son employeur était tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans sa lettre de licenciement.

De son côté, la société faisait valoir que l’interdiction de licencier un salarié, notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, ne s'opposait pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement était perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié.

Le salarié inspecteur rétorquait que la lettre de licenciement devait expressément énoncer la perturbation dans le fonctionnement de l'entreprise et la nécessité de pourvoir à son remplacement définitif, ce qui devait être vérifié par les juges du fond.

En l’espèce, la société prétendait que cette absence prolongée avait entraîné une perturbation du secteur de prospection du salarié conduisant à son remplacement provisoire par deux autres inspecteurs régionaux, eux-mêmes en charge d'autres fonctions. C’est pourquoi, la société avait dû recourir à son remplacement définitif.

Cependant, notre salarié inspecteur réfutait l'ensemble de ces arguments pour les motifs qu'il était possible de pallier à son absence par une nouvelle répartition de son travail soit par une extension des horaires de salariés engagés à temps partiel, soit par le recours à un contrat à durée déterminée du fait de l'absence de technicité de son poste.

Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts relatifs à la rupture de son contrat, la Cour d’appel de Nancy avait retenu que la lettre de licenciement visait « l'absence prolongée de près de 12 mois du salarié qui était préjudiciable au fonctionnement de son secteur d'activité et qui avait rendu nécessaire son remplacement définitif afin d'assurer la pérennité de l'activité qui lui était dévolue ». Les juges nancéiens ont aussi ajouté que les absences du salarié avaient généré une perturbation dans la marche de l'entreprise du fait de la nécessité de son remplacement sur un secteur spécifique par des salariés eux-mêmes expérimentés, au détriment de leurs propres activités.

Quid juris : En cas d’absence prolongée d’un salarié, doit-on distinguer la perturbation d’un secteur d’activité de la perturbation de l’entreprise pour justifier un licenciement ?

La chambre sociale de la Cour de cassation vient conforter sa jurisprudence opérant un distinguo dans « la propagation de la perturbation » que peut occasionner l’absence prolongée d’un salarié à l’entreprise.

Dans ce litige, il convient de préciser que la lettre de licenciement visait une perturbation du secteur d'activité du salarié et non de l'entreprise, ce dont il résultait que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

  • L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Nancy a donc été cassé et annulé dans toutes ses dispositions et la société a été condamnée aux entiers dépens des instances engagées.

En effet, la lettre de licenciement se bornait à faire état d'une désorganisation du service auquel appartenait le salarié et d'une perturbation pour les contrôles à effectuer sur son secteur d'activité, sans faire état d'une perturbation de l'entreprise.

Dès lors, la lettre de licenciement, qui fixait les limites du litige, ne faisait pas état d'une « perturbation dans la marche de l'entreprise ». Nonobstant, pour considérer que le licenciement du salarié était justifié, les juges nancéiens se fondaient sur des motifs qui ne figuraient pas dans la lettre de licenciement en retenant que les absences avaient généré « une perturbation dans la marche de l'entreprise ».

Enfin, la Haute Cour a rappelé que la réalité et le sérieux du motif de licenciement s'apprécient au jour où la décision de rompre le contrat de travail est prise par l'employeur. Or, la Cour d'appel constatait que le salarié avait été remplacé par d'autres salariés de l'entreprise pendant plusieurs mois et la société n’avait embauché un nouveau salarié que plus tard. Ce dont il résultait que l'employeur ne justifiait pas de la nécessité de le remplacer définitivement à la date du licenciement.

Attention, « la crise économique ne justifie pas les moyens » puisque ni le recours à une entreprise prestataire de services, ni une embauche en contrat à durée déterminée, ni le recours à un intérimaire ne peuvent caractériser un remplacement définitif.

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