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23 / 04 / 2013 | 19 vues
Xavier Berjot / Membre
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Les motifs de la requalification du CDD en CDI

La Cour de Cassation vient de juger que le juge ne saurait requalifier d’office un CDD en CDI, seul le salarié pouvant s’en prévaloir (Cass. soc., 20 février 2013, n° 11-12.262). Cet arrêt est l’occasion de rappeler les motifs de requalification du CDD en CDI.


Principes généraux

Selon l’article L. 1245-1 du Code du travail, « est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L 1242-1 à L 1242-4, L 1242-6 à L 1242-8, L 1242-12, alinéa 1er, L 1243-11, alinéa 1er , L 1243-13, L 1244-3 et L 1244-4 du Code du travail ».

Le texte prévoit donc des cas limitatifs de requalification, qui seront étudiés ci-dessous (§ 2).

Comme la Cour de Cassation le rappelle régulièrement, les dispositions du Code du travail n’ayant été édictées que dans un souci de protection du salarié, l'employeur ne peut se prévaloir de leur inobservation.

À titre d’exemple, l'employeur ne peut s’en prévaloir pour demander la requalification d'un CDD en CDI et rompre par anticipation le contrat en alléguant un motif économique de licenciement (Cass. soc., 17 janvier 1996, n° 94-42103).

L’arrêt du 20 février 2013, visé en introduction du présent article, est une illustration de cette règle, cette fois à propos du pouvoir du juge.

Enfin, précisons que lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de requalification d'un CDD en CDI, l'affaire est directement portée devant le bureau de jugement qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine (article L. 1245-1 du Code du travail).


Cas de requalification

  • La conclusion d'un CDD en dehors des cas autorisés
Les cas de recours au CDD sont limitativement énumérés par l’article L. 1242-2 du Code du travail.

1° Remplacement d'un salarié en cas :

a) d'absence ;

b) de passage provisoire à temps partiel, conclu par avenant à son contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et son employeur ;

c) de suspension de son contrat de travail ;

d) de départ définitif précédant la suppression de son poste de travail ;

e) d'attente de l'entrée en service effective du salarié recruté par CDI appelé à le remplacer.

2° Accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ;

3° Emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité, il est d'usage constant de ne pas recourir au CDI en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;

4° Remplacement d'un chef d'entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, d'une personne exerçant une profession libérale, de son conjoint participant effectivement à l'activité de l'entreprise à titre professionnel et habituel ou d'un associé non salarié d'une société civile professionnelle, d'une société civile de moyens ou d'une société d'exercice libéral ;

5° Remplacement du chef d'une exploitation agricole ou d'une entreprise du code rural et de la pêche maritime, d'un aide familial, d'un associé d'exploitation, ou de leur conjoint dès lors qu'il participe effectivement à l'activité de l'exploitation agricole ou de l'entreprise.

Les cas de recours susvisés doivent être scrupuleusement respectés par l’employeur, sous peine de requalification du CDD en CDI.

À titre d’exemple, la Cour de Cassation a pu juger qu’un CDD ne peut être conclu pour le motif de « réorganisation d'un service » (Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-42102).

  • La conclusion d'un CDD pour pourvoir un emploi permanent de l'entreprise

Un CDD, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise (article L. 1242-1 du Code du travail).

En d’autres termes, même si le CDD correspond à l’un des cas de recours visés par le Code du travail, celui-ci peut être requalifié en CDI s’il a en réalité été conclu pour pourvoir à un emploi permanent.

En ce sens, la Cour de Cassation a approuvé une cour d’appel d’avoir requalifié en CDI les CDD d’une salariée effectuant toujours des tâches identiques pour remplacer les salariés absents dans six postes de péage, dans un contexte où la régularité des absences dans cette zone géographique entraînait un renouvellement systématique des engagements conclus avec cette salariée (Cass. soc., 29 septembre 2004, 02-43249).

  • La conclusion d'un CDD pour remplacer un salarié gréviste ou pour effectuer des travaux dangereux

L’article L. 1242-6 du Code du travail prévoit qu’il est interdit de conclure un CDD :

1° Pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d'un conflit collectif de travail ;

2° Pour effectuer certains travaux particulièrement dangereux figurant sur une liste établie par voie réglementaire.

Concernant le CDD conclu en période de grève, il convient de préciser que l’employeur reste libre de conclure de tels contrats, à condition que ceux-ci ne visent pas à remplacer un salarié gréviste.

Par ailleurs, l’employeur ne peut pas non plus recourir au travail temporaire pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d'un conflit collectif de travail (article L. 1251-6 du Code du travail).

Concernant les travaux dangereux, la liste visée ci-dessus est dressée par l’article D. 4154-1 du Code du travail (ex. travaux de désinsectisation des bois, amiante : opérations d'entretien ou de maintenance sur des flocages ou calorifugeages etc.).

  • Les irrégularités de forme du CDD
Le CDD doit obligatoirement être formalisé par un écrit, à défaut de quoi le contrat est réputé conclu pour une durée indéterminée (article L. 1242-12 du Code du travail).

En l'absence de contrat écrit, l'employeur ne peut écarter la présomption légale de CDI en apportant la preuve de l'existence d'un contrat verbal conclu pour une durée déterminée (Cass. soc., 24 novembre 1998, n° 96-41742).

L’écrit constatant le CDD doit obligatoirement comporter la définition précise de son motif, sous peine de requalification (même article).

Les mentions obligatoires du CDD sont notamment les suivantes :

  • le nom et la qualification professionnelle de la personne remplacée lorsqu'il est conclu pour remplacer un salarié absent ;
  • la date du terme et, le cas échéant, une clause de renouvellement lorsqu'il comporte un terme précis ;
  • la durée minimale pour laquelle il est conclu lorsqu'il ne comporte pas de terme précis etc.

  • Le non-respect des règles relatives à la fixation du terme, à la durée et au renouvellement du CDD

Sauf certains cas particuliers, comme le remplacement du salarié absent, le CDD doit comporter un terme précis dès sa conclusion (article L. 1242-7 du Code du travail).

Par ailleurs, le CDD obéit à des règles très strictes concernant sa durée et son renouvellement.

Ainsi, la durée totale du CDD conclu pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire ne peut, en principe, excéder 18 mois, renouvellement inclus.

Cette durée est portée à 24 mois dans les cas suivants :

  • contrat exécuté à l'étranger, quel que soit son motif ;
  • départ définitif d'un salarié précédant la suppression de son poste ;
  • commande exceptionnelle à l'exportation.
À défaut de respecter ces règles, l’employeur s’expose à la requalification du CDD en CDI.

  • Le non-respect du délai de carence entre les CDD
Il résulte de l’article L. 1242-8 du Code du travail qu’à l'expiration d'un CDD, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un CDD ni à un contrat de travail temporaire, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat, renouvellement inclus.

Ce délai de carence est égal :  

  • au tiers de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat, renouvellement inclus, est de quatorze jours ou plus ;
  • ` la moitié de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat, renouvellement inclus, est inférieure à quatorze jours.

Le délai de carence n’est pas applicable dans certains cas, notamment lorsque le CDD est conclu pour assurer le remplacement d'un salarié temporairement absent ou dont le contrat de travail est suspendu, en cas de nouvelle absence du salarié remplacé (article L. 1244-4 du Code du travail).

Le non-respect de ces délais de carence est un cas supplémentaire de requalification du CDD en CDI.   

  • La poursuite de la relation contractuelle à l'échéance du CDI
Enfin, lorsque la relation contractuelle de travail se poursuit après l'échéance du terme du CDD, celui-ci devient automatiquement un CDI (article L. 1242-8 du Code du travail).  

En ce cas, le salarié conserve l'ancienneté qu'il avait acquise au terme du CDD et la durée de ce CDD est déduite de la période d'essai éventuellement prévue dans le nouveau contrat de travail.
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