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07 / 04 / 2023 | 604 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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Les Français et leur rapport au travail

Depuis ces derniers mois et surtout ces dernières semaines, avec le débat sur la réforme des retraites, on a beaucoup évoqué dans la  presse et sur les plateaux de télévision de l'évolution  portée par les français sur  leur rapport au travail et de la nécessité de s'interroger sur les organisations de travail. 

 

Certes  le contexte de crise sanitaire que nous avons traversé, avec la nécessité de se pencher sur ces questions, a remis le sujet en évidence, mais, comme le souligne Jean-Claude Delgenes dans ces colonnes ces jours-ci,  il faut bien admettre "qu'après dix ans de QVT  peu d’améliorations avaient suivi cette nouvelle norme". Le remplacement de cette notion dans  le Code du travail en mars 2022, par la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) a encore peu changé les choses.

 

Pour autant le débat sur la recherche de  sens  et le rapport au travail  est devenu incontournable et nombreux sont ceux (de plus en plus nombreux) qui pensent qu'il devient urgent de s'en saisir véritablement.

 

Pour nourrir utilement les réflexions plusieurs acteurs se sont penchés récemment sur ces questions. Pour ne citer que les plus récents: la Fondation Jean Jaures avec "les ambivalences du nouveau rapport au travail" (1) et l'Institut Montaigne, avec "Les Français au travail  :dépasser les idées reçues"  (2)

 

Les principales observations de la Fondation Jean Jaures


Fin 2022, le travail continue à être moins central dans la vie des Français et les symboles de réussite traditionnelle sont en perte de vitesse


Dans une précédente note de la Fondation Jean-Jaurès, il avait été  observé que la proportion de Français en activité affirmant que la place du travail dans leur vie était « très importante » s’était déjà effondrée en un peu plus de trente ans, passant de 60% en 1990 à 24% en 2021.


L’Ifop a de nouveau posé cette question fin octobre 20221. 84% des salariés considèrent que leur travail est important. Cet étiage demeure relativement stable dans le temps long puisque 86% des interviewés faisaient ce constat en 2021 et, si l’on remonte plus en arrière, 92% en 1990. Il en est en revanche autrement s’agissant du score « très important ». Celui-ci enregistre cette année encore une baisse significative pour s’établir à 21% (contre 24% en 2021 et 60% en 1990), soit un cycle baissier qui se poursuit.
 

Cette faible place « très importante » accordée au travail se retrouve au sein de la plupart des catégories de salariés :   

  • le genre : 20% des hommes affirment que le travail occupe une place très importante dans leur vie contre 22% des femmes ;
  • l’âge : 21% des 18-24 ans contre 23% des 50-65 ans ;
  • le statut : 18% des professions intermédiaires, 20% des employés, 23% des ouvriers et 25% des cadres. 

 

Il est également souligné que la progression de comportements individualistes, couplés à une défiance institutionnelle généralisée qui dépasse le cadre du travail, ainsi qu’une moindre identification statutaire envers les entreprises, expliquent ce « désengagement ». 

 

Pour les auteurs du rapport, la place moins centrale dévolue au travail n‘entraîne pas en contrepartie, même à bas bruit, moins d’implication de la part des salariés.
 

Certes, la présence du travail dans l’existence n’est plus aussi omniprésente qu’auparavant. Mais ce nouvel état d’esprit a surtout davantage pour conséquence de faire reculer le travail dans la hiérarchie des priorités par rapport à d’autres domaines (la famille, les loisirs…) qu’à changer intrinsèquement la façon de travailler.
 

Cette évolution des mentalités se traduit principalement par une revendication d’autonomie dans l’organisation de son activité professionnelle, afin d’atteindre l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle que chacun s’est fixé.
 

Elle a également pour corollaire une aspiration au bien-être dans son quotidien professionnel. L’ambition réside moins dans l’idée de « se réaliser » par le travail que, plus modestement, dans le fait de s’y sentir bien, d’avoir le sentiment de faire un travail utile et porteur de sens.
 

Enfin, pour les auteurs du rapport,  c'est " le rapport au temps de travail, à l’espace de travail et à la culture managériale qui est ainsi aujourd’hui fortement challengé."

 

Les questionnements et réflexions de l'Institut Montaigne

 

Derrière la question du départ à la retraite se cachent la réalité des carrières, le quotidien des travailleurs français et la multiplicité de leurs parcours.


Le rejet, semble-t-il collectif, d’un projet d’allongement de l’âge légal de départ à la retraite s’explique-t-il par une insatisfaction générale des Français à l’égard de leur travail ?


Les Français placent-ils désormais le sens, et la mission sociale de leur entreprise au cœur de leurs priorités, comme le soutiennent d’innombrables études publiées ces trois dernières années ? 

 

L' enquête réalisée avec l’aide du cabinet de conseil Kearney et qui s’appuie sur un sondage mené en septembre 2022 auprès de 5001 actifs français par Kantar Public, dresse un état des lieux  des grandes questions actuelles qui entourent le travail afin de remettre en question les nombreuses idées reçues. Elle couvre une large partie de ces problématiques en s’attaquant à 5 thématiques clés : 
 

  • La satisfaction des Français au travail ;
  • L’évolution du temps de travail ;
  • Les conséquences de la démocratisation du télétravail ;
  • Le rapport des actifs avec la retraite et la fin de carrière 
    ;
  • Le rapport des actifs à leur évolution professionnelle.

Les Français sont satisfaits au travail

77 % des sondés se déclarent satisfaits au travail, statistique qui n’a que très peu évolué ces dernières années malgré la crise sanitaire. 

Pas d’évolution du temps de travail, mais un sentiment d’augmentation de charge de travail partagé

Le télétravail : une progression fulgurante qui induit de nouvelles problématiques

Une volonté très marquée de mobilité professionnelle
 

Les actifs ont une forte ambition de mobilité professionnelle, qui prend plusieurs formes :

  • Une mobilité interne, chez les salariés : 55 % des sondés déclarent vouloir évoluer vers un poste différent au sein de la même entreprise.
  • Une mobilité externe : 37 % des salariés veulent quitter leur entreprise avant 2 ans (26 % dans les 6 prochains mois).
  • Une reconversion professionnelle : 10 % des sondés déclarent y réfléchir sérieusement.
  • Devenir indépendant pour exercer le même métier : 29 % des salariés pourraient l’envisager, ce qui témoigne d’une forte attraction du statut d’indépendant, ce qui est cohérent avec le sentiment général de satisfaction chez les indépendants par rapport à leur travail.

 

A suivre.....


(1) https://www.jean-jaures.org/publication/je-taime-moi-non-plus-les-ambivalences-du-nouveau-rapport-au-travail/

(2) https://www.institutmontaigne.org/publications/les-francais-au-travail-depasser-les-idees-recues

 

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