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14 / 09 / 2018 | 17 vues
Didier Cozin / Membre
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Formation : le 11 septembre 2018, un enterrement pour CLÉA ?

Alors que la quatrième réforme de la formation a été promulguée le 5 septembre, le socle des compétences hésite toujours entre libération ou diplomation.

Le socle européen a été défini en 2006 et comporte huit compétences de base :

1- la lecture et l'écriture ,
2- les langues, 
3- les mathématiques, les sciences et l'ingénierie, 
4- les compétences numériques, 
5- les compétences personnelles sociales et d'apprentissage, 
6- les compétences civiques, 
7- l'entrepreneuriat,

8- la sensibilité et l'expression culturelle.


Huit ans après que l'Union européenne a défini ce socle des compétences, notre pays a tenté de lancer sa propre partition pour un Socle des compétences en milieu professionnel (via la loi de 2014).

En 2014, la France n'a pris ni le chemin de la lisibilité ni celui de la simplicité pour ce socle mais a décidé d'en faire un exercice syndical, CLÉA, à la main de partenaires sociaux juste capables d'imiter l'école, sans résultats ni montée réelle des compétences depuis quatre ans.

Le socle de 2014, CLÉA, désormais quasi-abandonné, avait de nombreux défauts...

  • Il faisait l'impasse sur l'entrepreneuriat (réintroduit deux ans plus tard par la loi sur le travail), la culture générale et la pratique des langues étrangères.
  • Il rigidifiait et compliquait le départ en formation avec des « référentiels » intangibles, méconnaissant la réalité et la fragilité du terrain éducatif en entreprise.
  • Il imitait une école (pourtant largement inefficace) en prétendant bâtir un nouveau diplôme (CLÉA) sans moyen.

En quatre ans, le socle des compétences (devenu CLÉA) a installé un véritable parcours du combattant (pour les salariés comme pour les organismes de formation).

D'après l'OCDE (enquête PIAAC), 25 % des adultes français ont un niveau très bas de qualification et de connaissances (parmi les plus bas de l'UE).

En quatre ans, le socle n'aura servi à rien (ou presque) :

  • il a été généreusement diffusé par Pôle Emploi qui a autoritairement versé des diszaines de milliers de chômeurs dans CLÉA ; 
  • il a été ignoré par le monde du travail (c'est la certification la moins utilisée en entreprise) car ni les employeurs ni les salariés ne souhaitaient ni ne pouvaient entrer dans des formations longues qui imitaient (vainement) l'école.

Septembre 2018 : les pouvoirs publics jettent CLÉA aux oubliettes 

Sans déclarer la certification CLÉA officiellement morte, le décret de loi du 11 septembre 2018 fait éclater ce titre en prônant désormais les « certifications socle » (ni la loi formation du 5 septembre 2018 ni le décret ne font plus mention de CLÉA).

Si CLÉA et son concepteur (le COPANEF) sont abandonnés, que faire à présent du et pour le socle des compétences ?

Pour former les 4 à 6 millions de travailleurs (français et étrangers) non informatisés, non qualifiés (et parfois illettrés) à l'échéance 2022, il faut que le monde du travail réinvestisse, avec une complète liberté ce champ (peu exploré car non financé) des savoirs et compétences de base :

1- libérer et ouvrir à tous (y compris aux travailleurs précaires, étrangers non salariés et fonctionnaires) le socle des compétences (abandon des référentiels, des homologations, des évaluations et des parcours obligatoires), reprise intégrale des thèmes du socle européen des compétences ;

2- laisser une totale liberté aux organismes de formation (privés comme publics) de fixer leurs programmes, leurs tarifs, leurs modalités pédagogiques et leurs outils d'évaluation et de validation des compétences du socle ;

3- consacrer au moins 50 % des cotisations obligatoires des employeurs (publics et privés) au développement des accompagnements et formations du socle ;

4- associer l'Éducation nationale aux compétences professionnelles de base en formant au moins 100 000 enseignants (10 % des effectifs) aux besoins primaires du monde du travail.

Le socle des compétences est vital pour le travail en France, bien plus qu'ailleurs en Europe.

La société de la connaissance change totalement le travail. Au lieu de réserver la qualification, les connaissances et les compétences aux seuls travailleurs diplômés (cadres, ingénieurs et techniciens supérieurs) elle nécessite une montée en compétences générale (et permanente) de toutes les composantes de la société.

Le savoir se partage, le travail devient collaboratif et les hommes ne sont plus de simples ressources.

Dans les économies post-industrielles, les découpages anciens entre travailleurs exécutants et encadrement, responsables et ouvriers désinvestis ne fonctionnent plus.

Chaque travailleur (salarié comme non salarié) peut et doit prendre des initiatives, innover et s'investir tout en développant son activité et ses compétences.

Nos modèles professionnels sont dépassés et déclassés (un diplôme pour la vie, la séparation entre travailleurs manuels et travailleurs intellectuels, le lien de subordination qui empêcherait de dominer son travail...). Dans ce nouveau paradigme d'un travail à la fois valorisant, exigeant et exclusif, les compétences doivent sans cesse être renouvelées, les savoirs sont précieux et l'entreprise doit considérer ses salariés comme son capital le plus important.

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Bien évidemment le Socle (ou CléA) se développe. Quand on part de zéro (en 2016) au bout de 2 ans on ne peut qu'augmenter ses chiffres (surtout si on place autoritairement des dizaines de milliers de chômeurs sur la certification CleA). Les problèmes sont tout autre - 4 à 6 millions de Français adultes (16 à 64 ans) sont très insuffisamment qualifiés pour continuer à travailler ou trouver un emploi. Même si CleA fonctionnait mieux et permettait à 100 000 personnes par an de se former (on peut rêver) il faudrait peut-être 40 ou 50 ans pour former tous ceux qui en ont besoin (sans compter que 200 000 jeunes sortent du système scolaire sans aucune éducation, peut-être autant de travailleurs migrants non francophones ou non qualifiés arrivent chaque année sur le marché du travail) - CléA étaitune mauvaise (et pâle) imitation de l'école. Ni les salariés ni les employeurs ne souhaitaient des formations longues (plusieurs mois) qui les emmèneraient vers un pseudo diplôme figé pour des années (et déjà parfaitement daté comme le prouve la cirulaire du 11 septembre 2018 ) - La formation des adultes n'est pas une école (même de la seconde chance) et pour l'avoir oublié le Copanef a fait perdre 4 ans à notre pays et au socle des compétences (qui est indispensable et doit reprendre la totalité des items listés en 2006 par l'UE)