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20 / 05 / 2025 | 17 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Direct 3E ASC Ancienneté

Comment intégrer la fin du critère d'ancienneté sur les ASC des CSE ?

Les CSE ont jusqu'à fin 2025 pour ne plus prendre en compte le critère de l'ancienneté dans l'attribution des ASC selon l'URSSAF mais les salariés se considérant lésés peuvent d'ores et déjà monter au créneau en justice. Retour sur le direct du 29 avril parrainé par le groupe 3E avec les témoignages de CSE où l'on a d'ores et déjà neutralisé l'ancienneté, non sans débat.
 

72 % des répondants au sondage proposé dans le cadre du direct du 29 avril organisé par Miroir Social en partenariat avec le groupe 3E se sont déclarés défavorables à la neutralisation de l'ancienneté dans l'attribution des ASC du CSE. C'est donc contraint et forcé que les CSE intègrent les conséquences des deux arrêts successifs de la Cour de Cassation de 2024 et 2025 sur le caractère discriminatoire d'une condition d'ancienneté sur les ASC. L'URSSAF leur accorde jusqu'à fin 2025 pour se mettre en règle. L'imagination est à l'honneur pour contourner cette neutralisation. Si la proratisation des droits en fonction du temps de travail est clairement proscrite, des CSE ont créé des tranches de subventionnement cumulatives par trimestre tandis que d'autres prévoient des abondements mensuels du CSE à certaines activités qui précédemment étaient accessibles qu’une fois par an. Autant de décisions de gestion dont la sécurisation juridique n'est pas garantie car la notion d'ancienneté reste présente, même si elle indirecte. Et l'obtention d'un rescrit social de l'Urssaf ne protège pas d'une action au tribunal. "L'Urssaf peut en effet très bien valider une disposition spécifique alors qu'un tribunal pourra y voir une discrimination", prévient Geoffrey Le Baron, responsable de mission chez 3E Expertise.
 

Condition de présence, période d'ouverture des commandes, plafonds de consommation périodiques
 

C'est la condition de présence au moment de l’inscription du salarié à l’activité proposée par le CSE qui s'impose comme le premier préalable. A partir de là, il devient possible de jouer sur le curseur de la période d'ouverture des inscriptions de chaque ASC tout en pouvant prévoir des plafonds de consommation, également par période. "Cela nous permet notamment de réguler les consommations des stagiaires", témoigne une élue dans le chat du direct. Toujours dans le chat, un autre élu rapporte "réfléchir à instaurer une règle qui inclut un nombre de jours d'inscription limité par mois. Par exemple, une semaine par mois pour s'inscrire à la billetterie.”


"Il n'y a pas de règle par rapport à la durée d'inscription. C'est le CSE qui détermine la durée qu'il pense nécessaire et justifiée. Il doit, évidemment, être raisonnable pour que l'ensemble de l'effectif puisse prendre connaissance de la prestation et puisse décider, ou non, d'y participer", précise Geoffrey Le Baron qui prévient en revanche que "conjuguer période d'inscription et présence au effectifs au moment du déroulement de l'activité pourraient s'assimiler à une condition d'ancienneté."


Chez Canal+ où l'on compte 3000 intermittents, les conséquences de la neutralisation de l'ancienneté sont majeures pour le CSE. Fini la condition d'accès aux ASC à un seuil de 40 jours de travail sur 12 mois, qui concernait 20 % des intermittents. La décision a été prise dès le mois de juin 2024. "Il faut désormais pouvoir justifier d'avoir travaillé au cours du mois qui précède la commande. Sur les chèques de Noël nous n'avons pas été débordés. Pour le moment, le budget est maîtrisé mais c'est l'évolution de la demande des intermittents sur les chèques vacances dont la période d'attribution s'ouvre qui va nous permettre de voir si nous pouvons absorber un élargissement de la base des bénéficiaires, explique Maud Potier, élue du syndicat majoritaire +Libres, affilié à l'Unsa, en charge des ASC. La justification de travail dans le mois qui précède la commande ASC d'un intermittent repose sur la transmission mensuelle du fichier des effectifs par la DRH au CSE qui s’effectue avec un décalage de 3 semaines par rapport à la situation réelle. "Cela va alourdir la gestion des ASC car il faut prendre en compte les cas des intermittents que l'on ne retrouve pas sur le dernier export du fichier mais qui travaillaient pourtant sur le dernier mois", précise Maud Potier. "Le problème est le nombre de régularisations quand on est dans une UES et que nous avons des entités avec des bases RH différentes", confirme une élue dans le chat du direct.
 

  • A noter que l'on retrouve le CSE de Canal+ à l'offensive au sein d'un "Collectif média", regroupant entre autres les CSE de TF1, M6, France Télévisions, Radio France pour trouver un axe de réflexion modifiant la position de l’URSSAF.
     

Le CSE de l'institut de sondage Ispos fait face à la même problématique que les entreprises de l'audiovisuel. Les enquêteurs sont en effet majoritairement des vacataires salariés. Ils doivent aujourd'hui encore justifier de 700 heures de travail sur les 12 derniers mois pour devenir éligible aux ASC. Sur les 1000 enquêteurs, environ 150 dépassent ce seuil. " Les enquêteurs devront pouvoir justifier d’avoir au moins un bulletin de paie sur les 4 premiers mois de 2025. Cela nous rajoute environ 200 personnes.Heureusement que nos réserves vont nous permettre d'intégrer ces nouveaux bénéficiaires", témoigne Nathalie Martinez, élue FO au CSE d'Ipsos.


Un irritant pour les CDI


Au Grand Moulin de Paris (1100 salariés), la condition d'ancienneté a été supprimée dans la foulée du premier arrêt de la Cour de cassation. En 2019, l'ancienneté requise était déjà passé de 6 à 3 mois à la faveur d'un passage en CSE qui a été l'occasion d'harmoniser les pratiques ASC des ex CE de l'entreprise. "Nous n'avons pas imaginé de nouvelles règles pour réduire le nombre des nouveaux bénéficiaires qui sont une cinquantaine. Je considère que c'est notre rôle que de permettre un accès le plus large possible aux ASC. Cela a été un sujet de débat avec les autres élus mais la décision est plus facile quand on a des provisions", reconnaît Alexandre Pain, élu SECI au CSE et cheville ouvrière d'un accès sans conditions particulières.
 


La situation est sensiblement différente à la Fédération Médico Sociale des Vosges (FMS 88), une association du secteur sanitaire et social employant 560 salariés en CDI dont 17 % à temps partiel. L'enjeu financier est important pour le CSE avec en moyenne 60 à 80 CDD chaque mois. Au total, cela fait 900 potentiels bénéficiaires sur l'année. Pour Aicha Jaunet, secrétaire CGT du CSE : "aucune décision n'est prise pour le moment mais il est certain que les salariés en CDI n'apprécierons pas de voir les subventions ASC baisser. C'est un élément à intégrer dans notre communication alors que le CSE sera renouvelé en 2026 et que l'on est conscient du poids des ASC au moment du vote des salariés".
 


A la différence de la proratisation du temps de travail, la modulation des subventions ASC en fonction du salaire ou du quotient familial est autorisée. Si cette  solution est certes sécurisée juridiquement, elle n'est pas pour autant sans risque comme l'illustre l'élue du CSE d'une grande école de commerce où l'intégration des professeurs vacataires se traduit par 300 bénéficiaires de plus : "C'est un raz de marée de mécontents au niveau des salariés".