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14 / 01 / 2014 | 8 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Direction recherche accord majoritaire à tout prix

Depuis l’introduction du droit d’opposition en 2004, mieux vaut aboutir à un accord majoritaire pour une direction. Rares sont les syndicats qui peuvent se permettre le luxe de faire tomber des accords à eux seuls, en faisant jouer leur droit d’opposition. Avec plus de 51 % des voix, la CGT de Monoprix a successivement planté un accord d’intéressement au début de l’année puis l’accord sur le « travail en soirée » en septembre, au grand dam de la direction et des syndicats signataires. L’objectif d’un droit d’opposition reste tout de même de créer les conditions d’une réouverture par la direction pour obtenir plus qu’a l’issue du premier round. Quitte à perdre un peu de temps. Si l’usage effectif du droit d’opposition est plutôt parcimonieux, la menace de celui-ci l’est en revanche beaucoup moins. D’où une volonté de plus en plus affirmée des DRH de conditionner les accords stratégiques à des signatures majoritaires.

La loi sur la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 vient renforcer le phénomène. Dans une circulaire du 26 juin adressée aux directeurs régionaux des DIRECCTE,  le Ministre du Travail, Michel Sapin, écrit : « Je vous demande d’encourager les partenaires sociaux à s’engager dans la recherche d'un accord collectif majoritaire ». Dans une interview accordée à Miroir Social en mars 2013, le ministre assimilait l’accord majoritaire à la « clef de voûte de la réforme ». « C'est un changement culturel pour tous et un défi de sortir des relations syndicats-directions, par tradition, conflictuelles dans ce pays pour aller vers de la codécision », confirmait Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT.

Un écho différent du côté des non-signataires de l’ANI sur la sécurisation de l’emploi. « Quel que soit leur légitimité, les syndicats dans l’entreprise sont sous la pression de l’employeur bien plus que dans la branche, c’est pourquoi l’accord majoritaire qui valide les décisions de l’employeur n’est qu’un alibi démocratique », considère Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force Ouvrière.

Certains spécialistes ne manquent pas de souligner les risques de dérives liées à cette quête de l’accord majoritaire. C’est ainsi que l’avocat Samuel Gaillard, va jusqu’à préconiser d’interdire aux signataires d'accords majoritaires de quitter l'entreprise (ou de négocier leur départ) pendant un certain délai…

En attendant, l’accord majoritaire ne rime pas avec chèque en blanc au niveau des DIRECCTE. Surtout quand il marche sur la tête, comme celui de Chantelle. Reste que c’est avant tout sur le montant de l’enveloppe financière consentie aux salariés par une direction pour accompagner sa restructuration que se basent les syndicats pour signer ou non. La contestation du PSE de Safig au tribunal administratif en est l’illustration. Une enveloppe de 500 000 euros était en premier lieu dégagée pour conduire un PSE prévoyant la suppression de 215 postes. La DIRECCTE a refusé l’homologation. À 850 000 euros, le PSE a en revanche été homologué au grand dam du CE qui pointe la participation nulle de l'actionnaire de tête : Les Petites Affiches.
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