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13 / 12 / 2011 | 1 vue
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Quand les recherches scientifiques pluridisciplinaires sur le travail s'imposent

Quoi de neuf du côté de la recherche sur le travail ? Pas grand-chose. Le manque d’approches pluridisciplinaires explique une certaine incapacité à défricher de nouveaux territoires. « L’un des aspects les plus importants de la réforme de l’autonomie des universités, c’est le décloisonnement des disciplines qu’elle a rendu possible, aussi bien au sein des sciences humaines et sociales qu’entre sciences humaines et sciences dures », explique Laurent Wauquiez, le Ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche dans l’interview qu’il a accordée à Miroir Social.

  • Les membres du jury du Prix Malakoff Médéric pour l’innovation en santé au travail partagent leur regard sur les recherches scientifiques qui s’intéressent au travail.

Du neuf avec du vieux


« Le travail a été le grand oublié des trente dernières années. Bien des universitaires, chercheurs ont été marginalisés. Aujourd’hui, nous assistons au renversement : la mise en lisibilité de travaux, d’espérance qui datent de ces dernières décennies. C’est l’occasion pour certains chercheurs de sortir de la clandestinité ».
Jean-François Naton, conseiller confédéral de la CGT et vice-président de la commission AT/MP du Conseil supérieur des risques professionnels qui a contribué à réintroduire un séminaire confédéral « travail et émancipation » en place depuis 4 ans, au cours duquel universitaires, chercheurs et militants sont incités à débattre, à analyser de manière pluridisciplinaire le travail.

Les champs à défricher


« Nous manquons de connaissances sur la démonstration des effets bénéfiques de la santé au travail sur les facteurs de compétitivité ».
Hervé Lanouzière, conseiller technique à la sous-direction des conditions de travail de la direction générale du travail.

« Il reste encore beaucoup de choses à explorer du côté de la productivité ».
Bernard Brière, chargé de mission auprès du directeur général de l’IRES sur les champs de la santé au travail et du dialogue social dans les fonctions publiques.

« Seulement un peu plus d'un tiers des personnes sont encore en activité au moment ou elles prennent leur retraite. Les autres sont au chômage, en maladie ou invalidité... À ce titre, le report de l'âge de la retraite exige une démarche de prévention plus affirmée en santé au travail, ainsi qu'une approche combinée invalidité-retraite, comme dans certains pays nordiques ».
Danièle Karniewicz, administratrice du groupe Malakoff Méderic et secrétaire nationale en charge de la protection sociale à la CFE-CGC.

« Les corrélations entre performances sociales et performances économiques sont très difficiles à établir dans des entreprises internationales ».
Franck Pramotton, délégué syndical CFDT d’Oracle, dont c’est pourtant le sujet de thèse.

« Il serait intéressant de lancer une recherche visant à comparer les modes de sélection des équipes dirigeantes au niveau international ».
Jean-Claude Delgenes, directeur général du cabinet Technologia.

Avec une approche globale


« Il y un déficit de controverse organisée entre les approches psychologiques qui analysent une dégradation des conditions de travail et un courant gestionnaire qui décrypte une recomposition des modes d’organisation ».
Pascale Levet, directrice technique et scientifique de l’ANACT.

« Les études manquent cruellement sur les liens entre l’environnement de travail et la performance économique des entreprises. Et ce n’est pas une surprise tant il manque une approche globale associée à la conception des lieux de travail. C’est au Canada que l’on trouve les recherches les plus avancées sur ce terrain ».
Jacques Boulet, responsable du pôle de formation « environnement, ville, architecture » de l’ordre des architectes d’Île-de-France qui lance un diplôme universitaire, en partenariat avec l’Université Paris-Est Marne la Vallée, sur la conception des lieux de travail.

« L’articulation entre la santé au travail et la santé publique est un axe essentiel de recherche ».
Marc Deluzet, délégué général de l’Observatoire Social International.

« Je n’ai pas l’impression que la recherche en matière de risques professionnels et de santé au travail appréhende l’ensemble des paramètres socio-économiques qui rythment la vie des entreprises. Les analyses et les approches des praticiens sont trop segmentées. En outre, l’on ne peut pas dissocier la santé au travail de la santé en général ».
Christian Castagnet, président de la commission régionale des accidents du travail de la CRAMIF IDF et dirigeant-fondateur du cabinet Castagnet Conseil.


« Des compétences interdisciplinaires sont nécessaires pour mieux comprendre les liens entre prévention, compétitivité et protection sociale. De véritables sources de progrès pour les hommes, l’entreprise et la société résident dans la qualité du dialogue social ».
Bernard Gaïsset, directeur général de l’ACMS.

Et en se remettant en question


« Ce sont toujours les mêmes grandes entreprises à capitaux publics qui font l’objet des recherches. On ne se donne pas les moyens d’analyser les nouvelles configurations productives, comme c’est le cas ailleurs en Europe. Et quand il y a des choses intéressantes, comme par exemple les travaux d’Yves Clos, on se donne même pas les moyens de les traduire ».
Claude-Emmanuel Triomphe, cofondateur et délégué général d’Association Travail, Emploi, Europe, Société (ASTREES) et directeur de la publication en ligne « METIS – correspondances européennes du travail ».


« La recherche académique manque de pragmatisme ! Il faudrait envisager davantage de forums d’échange pour assurer la valorisation de la réflexion des centres de recherche auprès des directions des entreprises en proposant des solutions concrètes et pratiques », Isabelle Hébert, directrice stratégie et marketing, santé et prévoyance du groupe Malakoff Médéric.

« Le chercheur doit accepter de prendre en compte les contraintes économiques de l’entreprise mais celle-ci doit accepter le côté plus distancié de la recherche. Préserver cette distance critique est primordial ».
Norbert Alter, sociologue, professeur à l’Université Paris Dauphine et président du jury qui rappelle que le principe du master 2 consiste à « enseigner le résultat des recherches ».

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