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"Réussite à l’École, réussite de l’École" : le Cese propose des pistes pour redéfinir les finalités de l'école
Comment lutter, véritablement, contre les inégalités scolaires, comment rendre concrète la réussite de tous les élèves et favoriser le vivre-ensemble ?
Pour répondre à ces questions, le Conseil économique, social et environnemental a adopté fin juin son rapport et son avis "Réussite à l’Ecole, réussite de l’Ecole", rapporté par Bernadette Groison (Groupe Alternatives sociales et écologiques), au nom de la commission Éducation, culture et communication.
Les éléments de contexte....
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L'École est à l’image de notre société actuelle : fracturée et inégalitaire. L'âge d'or d'une école égalitaire est un mythe, tout comme l’idée que l'École puisse corriger, à elle seule, les aspects les plus négatifs de la société.
La dernière enquête PISA de 2023 montre que le niveau moyen des élèves français est comparable à celui des autres pays de l'OCDE. Mais cette moyenne cache des écarts importants entre les meilleurs élèves et les moins bons, écarts qui s’accentuent de plus en plus.
Près de 6 Français sur 10 considèrent que l’école ne donne pas les mêmes chances à tous et toutes (Sondage Ifop, mai 2023)
Aujourd'hui 79% d'une classe d'âge obtient le baccalauréat contre 1 élève sur 3 en 1980 ; une personne sur deux est titulaire d'un diplôme de l'enseignement supérieur. Le niveau de connaissances, de compétences et de qualification s'est donc accru. Le niveau moyen des élèves est en France comparable à celui des autres pays de l'OCDE mais ce tableau cache des disparités importantes.
Ainsi, il existe une forme de filiarisation ségrégative : 70% des enfants d'ouvriers ont un baccalauréat professionnel ou technologique et 75% des enfants de cadres obtiennent un baccalauréat général. Le parcours scolaire et l'orientation des élèves sont surtout déterminés par leur origine sociale.
Les études montrent que deux facteurs sont déterminants dans la réussite scolaire : les conditions de vie des élèves et le capital culturel dont ils disposent dans leur environnement. Or les inégalités sociales et culturelles sont fortes dans notre pays.
La réussite à l'École se définit comme la possibilité de réussir un parcours scolaire choisi et en ayant pu bénéficier de tous les outils pour devenir un citoyen capable de comprendre le monde et d'y agir pour faire société. La réussite de l'École est la capacité de la société à éduquer et à former aujourd'hui les personnes qui demain assureront les métiers, les engagements pour répondre aux besoins de la société.
Le principe d'égalité des chances est trompeur : il n'assure pas l'effectivité du droit à l'éducation ni à la réussite de l'élève. Il met en demeure l’élève d'assurer lui-même sa réussite. Le CESE préconise de parler de la réussite de tous les élèves car il revient à l'École de les accompagner pour parvenir à la réussite.
Pour le CESE, on ne transformera pas l’école sans les acteurs
Changer l’École se fait en co-construction avec tous les acteurs. C’est pourquoi la commission Éducation, culture et communication s’est appuyée, pour cet avis, sur de nombreuses contributions des actrices et acteurs de terrain.
Cette volonté d’associer celles et ceux qui font l’École au quotidien s’illustre dans cet avis par la diversité des personnes rencontrées : élèves, représentant.es de parents d’élèves, personnels de l’éducation, élu.es, représentant.es d’associations…
Le projet d’avis s’est appuyé sur de nombreux échanges menés par la commission Éducation, culture et communication avec des citoyennes et citoyens rencontrés dans les territoires, lors de déplacements dans des établissements scolaires.
Onze Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) ont également contribué, ainsi que de la Délégation aux Outre-mer du CESE. Ces échanges, ont donné lieu à une journée délibérative pour prendre en considération les recommandations émises, lesquelles ont été intégrées dans les préconisations du projet d’avis.
Répartis en petits groupes de travail les participants à la journée délibérative ont pu construire des propositions et les prioriser. À l’issue de la journée, une mise en commun des travaux a été réalisée dans l’hémicycle du CESE pour partager et restituer les réflexions des différents groupes. Plusieurs thématiques ont été abordées : la qualité du temps scolaire et du bien-être à l’Ecole, les conditions de la réussite scolaire et la lutte contre les inégalités scolaires et la valorisation des métiers de l’éducation.
Avec cet avis, le CESE souhaite que soit engagé un changement de paradigme pour l'École. Il appelle à un débat démocratique pour en redéfinir les finalités et engager les transformations nécessaires pour assurer la réussite de toutes et tous. Ce choix nécessite une articulation entre les politiques scolaires et les autres politiques publiques (logement, transport, culture...).
L’École doit être un lieu qui permette à chaque jeune de se construire, de surmonter ses difficultés, d'apprendre et, d'imaginer le monde de demain pour faire société ensemble.
Les préconisations du CESE pour une École de la réussite pour toutes et tous
Elles s'articulent autour de 4 axes :
1. Redéfinir les finalités de l'École
→ Pourquoi ? Les réformes se multiplient pour tenter de répondre aux nombreuses difficultés qui traversent le système éducatif, sans réelle évaluation des résultats obtenus. Il faut collectivement clarifier et déterminer les finalités que sont celles de l’École aujourd’hui.
→ Comment ? En organisant un débat démocratique (convention citoyenne, états généraux…) associant tous les acteurs de la communauté éducative et tous les publics ;
Il faut aujourd'hui garantir les moyens et de meilleures conditions de scolarisation des élèves, de la maternelle au lycée pour assurer la réussite de tous les élèves.
2. Favoriser l’égalité et la mixité dans les territoires
→ Comment ? Mettre en place un plan pluriannuel pour réduire la ségrégation sociale et pour réduire, de plus de 30 %, les écarts des Indices de Position Sociale (IPS) entre les établissements scolaires, qu’ils soient publics ou privés au sein d’un même territoire ;
Réviser la carte scolaire et celle de l’éducation prioritaire pour prendre en compte l’évolution des territoires en s’appuyant sur l’indicateur de position sociale ;
Installer, partout, des observatoires de la mixité sociale et scolaire et de la réussite éducative, au niveau national et territorial, pour proposer un état des lieux et un diagnostic et faire des recommandations.
3. Conforter les acteurs de la communauté éducative
→ Comment ? Organiser une concertation avec les acteurs de la communauté éducative pour améliorer les conditions de scolarisation des élèves en réfléchissant par exemple : aux effectifs par classe, aux temps de transport, aux aides aux devoirs, à la restauration, à la santé physique et psychique, à l’accès aux soins, à l’organisation des emplois du temps, à la pédagogie différenciée, à faire classe dehors et penser l’école hors les murs, à l’aménagements des espaces, etc.
Mettre en place un « espace-parents », de façon obligatoire, dans toutes les écoles et établissements scolaires, à l’usage des parents d’élèves et de leurs délégués.
Renouveler la formation initiale des enseignantes et des enseignants pour sécuriser une entrée progressive dans le métier et mettre en place des plans de formation continue véritablement centrés sur leurs besoins, individuels et collectifs.
4. Reconnaitre et valoriser tous les personnels qui contribuent au service public d’éducation
→ Comment ? Déployer un plan d’urgence de recrutement des enseignantes et des enseignants des premier et second degré ;
Voter une loi de programmation de revalorisation des rémunérations des enseignantes et des enseignants ;
Impulser un plan de recrutement et de revalorisation des personnels non enseignants de l’État et des collectivités territoriales.
Pour plus détails: Lire l'avis