Participatif
ACCÈS PUBLIC
07 / 02 / 2025 | 38 vues
Joseph Vrezil / Abonné
Articles : 9
Inscrit(e) le 26 / 03 / 2024

Elus du CSE : Construire l’opinion publique pour négocier [Chapitre 8]

Pour contribuer à une maîtrise des situations de travail syndical à risques, mettons à leur juste place : la reconnaissance des faits, la discussion sur le travail, l’opinion publique, et la négociation…. C'est le chapitre 8 d'une série de 10 contributions pour maîtriser les risques du métier de syndicaliste en améliorant son efficacité.

 

 

Sans mésestimer l’existence d’entreprises où le dialogue social est relativement constructif, il existe des entreprises où certains représentants du personnel souhaitent ardemment, pour se redonner une latitude décisionnelle, sortir du sentiment d’impuissance qu’ils éprouvent en regard de la dénégation du rôle des Organisations Syndicales. Les Directions d’entreprises cherchent à empêcher les représentants du personnel à rencontrer les salariés pour enquêter sur le travail réel ou débattre avec la ligne hiérarchique opérationnelle. De nombreux témoignages illustrent ces échecs. Leurs objectifs sont de cantonner les « débats » dans des salles de réunion avec des interlocuteurs qui ne sont pas les bons. Cette tactique conduit l’élu du CSE à insensiblement parler à la place des salariés au lieu de parler en leur nom pour porter « l’expression collective des salariés ». Cette situation génère un sentiment d’impuissance, d’improductivité des réunions et de rancœur.
 

Il n’y a pas de négociation sans volonté partagée de trouver un compromis. La volonté des législateurs, en 1972 et 1982, était de moderniser les relations sociales en développant une société basée sur le contrat, la participation, en essayant d’associer le Capital avec le Travail. Mais décréter la participation aux décisions et laisser croire aux représentants du personnel que leurs points de vue et avis seront entendus alors que le pouvoir ne se partage pas et que le capitaine à la barre s’estime suffisamment informé et compétent pour décider tout seul, ne peut conduire qu’à des frustrations pour les représentants du personnel.
 

Tant qu’une partie considère qu’elle a la capacité de puissance suffisante pour exécuter ses décisions, il n’y a rien à négocier (c’est une loi de la nature humaine qui s’observe depuis la nuit des temps). L’ouverture de négociation apparaît dès que les parties estiment (de fait) qu’elles n’ont pas la force d’imposer leur position et qu’il y a plus à perdre en refusant un compromis.
 

La globalisation de l’économie depuis le début des années 80 offre des marges de manœuvre immenses aux Directions d’entreprise qui leur permettent d’ajuster le financement, la fiscalité, les moyens de production, les ressources (humaines et techniques), etc. comme elles le veulent en jouant des juridictions et des règlementations.
 

Côté organisations syndicales - ceci peut paraître une évidence - mais la création d’un rapport de force permettant l’ouverture de négociations passe par la mobilisation de personnels impactés par les décisions organisationnelles des Directions d’entreprise pour permettre la mise en cause d’un problème social (« Un problème social désigne une situation considérée indésirable et néfaste, selon un critère d’anormalité quelconque, affectant des individus, des groupes ou la société en général, dont on connaît, sinon les causes, du moins les conséquences et envers lesquels il serait souhaitable de s’engager collectivement. » - Patrice Ouellet, Programme de sciences humaines appliquées, 1998).
 

Concrètement, le résultat de la négociation, c’est-à-dire la solution de compromis qui permettra de résoudre le problème social, nécessite de parcourir quatre étapes :

  1. Le constat d’une situation-problème au sein de l’entreprise
  2. Le jugement individuel et collectif sur le problème social
  3. La volonté et le sentiment partagé de pouvoir transformer cette situation par la négociation
  4. La mise en œuvre d’une réponse à ce problème social avec les salariés


L’étape 1 est remplie par le #Dialogueprofessionnel qui mobilise les salariés autour de « l’expression collective » et crée l’opinion publique sur le fait social qui attend un changement.


L’étape 2 est remplie par les avis rendu en CSE fondés sur l’étape 1 et par des expertises internes ou externes pour partager le diagnostic (les causes) et identifier des orientations de solutions.


L’étape 3 est remplie par la volonté de la Direction à ouvrir des négociations en impliquant les salariés.


L’étape 4 est remplie par l’exécution de la solution retenue, en suivant la mise en œuvre de l’accord avec les salariés à l’aide d’indicateurs de résultats.


Construire l’opinion publique signifie que la communication aux salariés (L2315-15) de leur expression collective (pas celle du syndicat) permette la prise de conscience collective par les salariés de la réalité et de l’importance des situations-problèmes qu’ils vivent ; et par effet miroir, les autres salariés vont pouvoir s’identifier à ceux qui vivent les conséquences des situations-problèmes.


L’ouverture des négociations doit s’appuyer sur une étude approfondie (expertises) du problème social (diagnostic partagé) qui mettra en valeur la nature du problème, le nombre de personnes impactées, ses causes, ses manifestations, qui menacent la cohésion des collectifs de travail et la performance de l’entreprise.


Pour toutes ces raisons, les rôles et actions des représentants du personnel devraient viser à construire, avec les salariés, l’opinion publique nécessaire ; puis à s’approprier les résultats des expertises pour construire les mandatements nécessaires aux négociations.

 

N’hésitez pas à compléter, commenter cette contribution.

A suivre : Chapitre 9 : Prendre soin des représentants du personnel

Pas encore de commentaires