Organisations
On ne négocie pas avec la souffrance au travail, on la fait disparaître
L’organisation du temps de travail contraint le salarié à un rythme accru lié à des objectifs commerciaux démesurés qui entraînent des dépassements d'horaires non reconnus, donc non déclarés. Le salarié doit être polyvalent, d’où une perte de repères du métier : on doit savoir tout faire et s’adapter au pied levé.
Les défis mettent les salariés en concurrence et détruisent les liens de solidarité. Le salarié est de plus en plus seul face à ses objectifs et à son client qui devient de plus en plus exigeant. Les directeurs s’appuient sur une individualisation mettant les salariés en compétition les uns avec les autres, sur une exigence d’implication totale du salarié et sur une subjectivisation forcée (responsabilité sans pouvoir maîtriser la situation).
On remarque aussi une nette augmentation des incivilités, voire des agressions verbales ou physiques qu’un contexte de crise économique et social favorise.
Nous sommes face à des directions régionales et à des directions des réseaux sourdes qui se cantonnent dans un rôle curatif plutôt que préventif, qui tiennent un discours d’entreprise propre et lisse encourageant ainsi des comportements managériaux déviants, visant à augmenter toujours plus la productivité et la rentabilité du salarié.
Le syndicat national Solidaires Assurances affirme que ce n’est pas le métier qui pose problème mais l’exercice de ce dernier dans les conditions d’organisation imposées ; le travail doit s’adapter à l’homme et non le contraire.
En schématisant, les problèmes naissent avec le développement d’organisations de travail, de procédures, d’indicateurs etc. qui non seulement ignorent l’activité réelle (ordres contradictoires, impossibilité de faire le travail demandé...) mais plus encore l’interdise (intensification, empêchement d’un travail de qualité, demande de vendre un produit qui n’est pas demandé ou souhaitable...).
Dans nos mutuelles respectives, il convient de faire une évaluation nationale des dépassements d’horaires, de mettre en lumière l’aberration de l’évaluation individuelle parce que le travail ne se réduit pas à l’individu mais au collectif car on ne travaille pas seul mais au sein d’une équipe, d’identifier les causes qui favorisent les incivilités.
- Notre exigence est de mettre en œuvre une évaluation des risques reposant sur le travail concret et non sur la tâche telle qu’elle est imaginée et prescrite par l’employeur ou l’encadrement...
- Pour pouvoir produire un document unique sur l’évaluation des risques, il faut partir de l’activité des salariés et porter une attention particulière au « travail réel », ce que les employeurs (et une très grande partie de la hiérarchie) sont incapables (ou ne veulent pas) faire aujourd’hui. Discuter collectivement de l’activité réelle du travail peut se révéler un puissant levier pour l’action.
Si nous sommes favorables à la mise en place d’accords sur les risques psychosociaux dans nos mutuelles, encore faut-il que ces accords ne se limitent pas à des actions de sensibilisation, de formation et d’accompagnement, comme c’est trop souvent le cas. Exemple : l’accord signé à GMF Assurances par la CFDT et la CFTC.
Les causes du stress au travail trouvent leur origine notamment dans les multiples restructurations ou réorganisations qui ont lieu, des gains de productivité réalisés sur fond de chantage et de pression extrême, le management par des objectifs déconnectés de la réalité du travail. Dans nos réseaux de ventes en contact avec le public, on assiste le plus souvent à une double pression (celle du « client » le plus souvent excédé par la politique des entreprises) et celle du management qui impose des règles abstraites et une pression qu’il répercute de sa propre hiérarchie... La pression, c’est par exemple la file des « clients » qui s’allonge alors qu’il faudrait prendre du temps pour une écoute correcte des demandes formulées.
La responsabilité du stress ne repose pas sur les individus mais sur l’organisation du travail...
Le stress ne pourra donc reculer que si des mesures sont prises visant à améliorer l’organisation, les processus, les conditions et l’environnement de travail, à assurer un soutien adéquat des directions aux personnes et aux équipes, à donner à tous les acteurs de l’entreprise des possibilités d’échanger à propos de leur travail, à assurer une bonne adéquation entre responsabilité et contrôle sur le travail. Des mesures de gestion et de communication doivent aussi être prises pour clarifier les objectifs de l’entreprise et le rôle de chaque travailleur.
Pour Solidaires, le principal enjeu concerne l’organisation du travail :
- anticiper et rendre les évolutions visibles ;
- accompagner les salariés dans le changement au lieu de constamment leur imposer de nouveaux processus sans aucune explication sur le but poursuivi, ni sur l’intérêt de la modification intervenue, ni aucune consultation ;
- accepter les audits effectués par les instances représentatives du personnel et les critiques sur les décisions pas toujours logiques et cohérentes à l’usage, et revenir dessus car elles peuvent compliquer la tâche du salarié et générer de la souffrance ;
- prendre en compte le décalage entre le travail demandé et la réalisation possible ;
- prendre en compte le fait que les processus mis en place par l’employeur ne sont jamais parfaitement réalisables car décidés en haut, le salarié est obligé de « bidouiller », ce qui est donc une souffrance de plus puisque cela génère de sa part un sentiment d’incompétence, d’être sur le fil etc. ;
- parvenir à mieux maîtriser la charge de travail par une répartition plus équilibrée entre les individus ;
- assurer une meilleure gestion des imprévus, mettre en œuvre un outil de prévision et de mesure de la charge de travail réelle, recruter quand il faut, assurer une bonne régulation...
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