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10 / 02 / 2025 | 57 vues
Catherine Gras / Membre
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Quel projet humain avec l’IA ?

Jean-Marie Fessler, docteur en éthique médicale et en économie de la santé, professeur associé de Stanford, ancien directeur d’hôpital et des établissements de soin de la MGEN, nous a livré ses réflexions ...

 

Nous pouvons saluer la semaine du sommet pour l’action sur l’Intelligence artificielle (IA), à Paris. Dans un pays qui dispose de nombreux atouts, tenter d’enrayer un certain modèle du retard n’est-il pas souhaitable ?
 

Pour mémoire, en France, en 1939, le taux de pénétration de la radio hertzienne – taxée – est de 12%. Le double, aux Etats-Unis. La loi de 1889 nationalise le téléphone. En 1954, son taux de pénétration atteint celui des Etats-Unis en … 1900. Pour la télévision, en 1960, le taux d’équipement par habitant est dans un rapport de 1 à 5 avec les Anglais et de 1 à 2 avec les Allemands. 

 

Quels ont été les coûts sociaux du rattrapage ?
 

De Louis Pouzin, ingénieur français pionnier d’Internet, à la doctoresse française Bettina Experton, conceptrice du dossier médical personnalisé mobile pour les Américains, IBlueBottonnos innovateurs semblent souvent bannisDans le domaine de la santé, par exemple, qui assume la responsabilité des conséquences du numerus clausus, des fraudes à la carte Vitale, des biais tarifaires, des échecs répétés du dossier médical personnel, etc. ? Lutte des places, bal des ego de ceux qui ont toujours raison même quand ils ont tort ?
 

Chaque fois, vingt ans au moins de surdité volontaire à l’encontre de propositions constructives, d’expérimentations de terrain et des témoignages de praticiens, d’ouvertures internationales, permettent d’oublier, croit-on. Beaucoup d’argent public à perte et une dose d’antiaméricanisme au passage.
 

Au total, une véritable guerre contre les métiers de service des autres, ceux des enseignants, des professionnels de santé, de la petite enfance et du handicap, ceux des agriculteurs, artisans et commerçants de proximité, des chercheurs, des entrepreneurs employeurs, de celles et ceux qui construisent et font fonctionner les réseaux vitaux, semble avoir été entreprise, de longue date.
 

Si l’IA doit en être l’ultime étape, elle sera rejetée. Comme il en est de l’écologie politique punitive injuste.
 

Le mérite aux discours ou le mérite aux actions quotidiennes ?
 

Sous la masse des discours stratégiques, à coups d’annonces sur les écosystèmes, les gains de compétitivité ou de productivité, les jeunes pousses, le pilotage surtout, et la régulation qui honore toujours l’industrie nationale du Droit – 400 000 emplois et 2% du PIB -. Et toujours les mêmes blocages : contre les 4 millions d’entrepreneurs et la dimension des recettes avant celle des dépenses, sous le déni des faits et des réalités, les postulats matérialistes et les intérêts masqués, les représentations minoritaires violentes, l’histoire reconstituée, etc.


La propension de quelques-uns à la servitude de tous les autres… A distance des laboratoires incubateurs d’idées de Galilée.sp.


L’intelligence artificielle ou augmentée est un rendez-vous de premier ordre. Encore faut-il en expliciter les buts et les résultats les plus utiles à tous, hors du jeu à l’adaptation top-down.
 

A qui le temps gagné sera-t-il réellement bénéfique ?
 

Est-il encore permis de nous demander si les technologies embarquées par l’IA ne sont pas trop puissantes au regard de notre humanité réelle ? Ne serait-ce que par saturation de notre temps de cerveau disponible, sous anxiété informationnelle. Ne serait-ce que par la dualité mortifère qui renvoie aux contraires.


Aux 29 dictateurs du 20ème siècle, responsables de la mort de 250 millions de personnes et à leurs successeurs, on doit ajouter le comportement de prédateurs des autres, sur tous les registres.


Si les récits diffusés autour de l’IA ne propulsent que les intérêts et l’exhibitionnisme d’oligarchies imposant aux peuples de s’adapter, ce n’est pas faire acte audacieux de prospective que de prévoir une prolifération de la violence, sous surveillance orwellienne généralisée.


Au détriment des apprentissages sociaux, de l’éducation populaire et de la mutualisation, principaux atouts réels de l’Humanité.


Au détriment d’une souhaitable Déclaration universelle des droits de l’esprit humain, selon la proposition du Pr. Mark Hunyadi.


A défaut d’avoir évité de perdre bientôt trente ans sur les propositions de l’UNESCO et de quelques penseurs et praticiens dans l’élaboration d’une infoéthique, de véritables débats éthiques centrés sur l’information, notre nouvelle Ere, les liens à l’altérité sont questionnés, à chaque instant.

Qui va mettre en œuvre les recommandations d’institutions aussi légitimes que le Conseil économique, social et environnemental, par exemple ?

Quelle représentation du monde et de l’humain souhaitons-nous privilégier ?

Peut-on encore s’interroger sur l’énorme geste métaphysique consistant à prendre les machines, les semi-conducteurs et les capteurs pour modèles de l’humanité ?

Peut-on encore s’interroger sur la réduction de l’être humain à un statut informationnel à traiter ?

Peut-on encore s’interroger sur les conflits possibles entre le poids des données et les éclairs de la création et de l’espoir humains ?

Peut-on encore tenter d’incarner une vision de notre esprit non pas comme un agrégat de contenus mais comme un ensemble d’activités : surprise et étonnement, critique et créativité, imagination et méditation ?

Si l’art des mises en œuvre procède de l’art des mises en relation, l’une des définitions de l’intelligence humaine, non seulement il n’est pas trop tard mais ce pourrait être la voie de la réussite collective.

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Paris accueille cette semaine un sommet international sur l’intelligence artificielle, grand-messe où certains promettent un avenir radieux d’« humains augmentés » grâce aux prouesses technologiques.

 

Des milliards d’investissements sont annoncés pour booster les algorithmes, et pendant ce temps, les agents publics en France font face à une toute autre réalité : gel des salaires, pouvoir d’achat laminé, et même ponction sur salaire en cas d’arrêt maladie.

 

L’IA permettra-t-elle à terme de servir ou d’asservir le salarié qui, lui, est bien humain ? La question reste ouverte à ce stade. Mais pour la FEETS-FO, la revendication urgente du moment est bien d’avoir des « fonctionnaires augmentés » : augmentés en reconnaissance, augmentés en rémunération, augmentés en moyens pour exercer leurs missions au service du public.

 

Pendant que les experts de l’IA dissertent sur le futur, nous rappelons une vérité bien tangible : sans une fonction publique forte, compétente et reconnue, c’est tout le pays qui s’expose à un avenir en mode « dégradé ».

Notre organisation syndicale revendique une augmentation immédiate de 10 % du point d’indice, l’ouverture de négociations pour améliorer les grilles indiciaires, le rétablissement de la GIPA et la fin des politiques de ponction sur les salaires en cas de maladie, une aberration alors que l’épuisement professionnel explose dans les services.

La FEETS-FO revendique par ailleurs un investissement massif dans les moyens humains et matériels pour assurer un service public de qualité, l’intelligence artificielle ne remplacera pas l’intelligence de terrain des agents publics.

 

Enfin, pour la FEETS-FO, tout développement de l’IA dans le service public doit s’intégrer dans un cadre national décliné et discuté dans les instances représentatives de nos ministères, intégrant une dimension d’accompagnement social ( y compris en matière de plan de requalification), de maintien de l’emploi et d’amélioration des conditions de travail (avec consultation des formations SSCT dans chaque service), ainsi que d’accessibilité du service public à tous. Il devra de plus s’accompagner d’un véritable dispositif de formation professionnelle pour les agents publics (avec plans de formations nationaux déclinés en local). Le développement de l’IA ne doit pas entraîner une charge supplémentaire aux personnels en plus de leurs missions actuelles, et préserver l’éthique du service public et leur sécurité juridique.

 

Dans ce cadre, les organisations syndicales doivent avoir accès au sein des instances à toute information nécessaire sur la finalité, le fonctionnement et l’utilisation des logiciels comprenant des traitements IA afin de pouvoir faire modifier si nécessaire les algorithmes pour respecter les droits et conditions de travail des agents.

 

Mais avant de fantasmer sur les effets de l’IA à moyen et long termes, il est urgent de reconnaître et de revaloriser celles et ceux qui font tourner le service public au quotidien !

 

 

FACE À L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, FAISONS PREUVE D’INTELLIGENCE COLLECTIVE !

 

L a confédération a organisé la semaine dernière sa première journée consacrée à l’intelligence artificielle, en marge du sommet international sur l’IA des 10 et 11 février.

 

Autour de syndicalistes mais aussi de chercheurs et d’experts, une centaine de camarades étaient présents pour débattre d’un sujet nouveau, à la fois important et inhabituel, un objet étrange, encore mal connu, qui suscite méfiance et curiosité, et énormément d’interrogations sur ses implications pour nos économies, nos emplois, nos conditions de travail… On n’en est plus à se demander si on doit être pour ou contre.

 

Face à l’intelligence artificielle, nous devons faire preuve d’intelligence collective.

 

L’IA n’est pas une projection futuriste.

 

Elle est présente dans les entreprises, les administrations, elle s’impose, de gré ou de force, dans le quotidien de plus en plus de salariés. On n’en maîtrise pas toutes les formes, elle ouvre des perspectives mais nous devons mieux comprendre ses conséquences sur l’emploi, les conditions de travail. Et comme toute évolution technologique, le déploiement de l’intelligence artificielle ne doit pas se faire au détriment des droits des travailleurs.

 

Nous devons être vigilants, anticiper les transformations. Nous ne lutterons pas contre, mais nous devons lutter contre une IA dérégulée, une IA hors de contrôle. L’intérêt de la confédération pour l’IA ne naît pas aujourd’hui. Nous anticipons déjà les choses, nous y travaillons au niveau européen et international, également avec FO-Cadres, pour expliquer, comprendre, développer des outils, former les travailleurs sur les usages de l’IA et leurs conséquences.

 

Cette journée sur l’IA, dont le fil rouge est l’élaboration d’un cahier de revendications, ce n’est donc ni le début ni la fin de l’engagement de FO sur l’IA. Face à l’intelligence artificielle, nous devons aussi faire preuve d’intelligence syndicale!

 

Il s’agit de faire émerger une véritable action syndicale sur l’IA via la négociation collective, le dialogue social, une véritable action syndicale pour obtenir des cadres réglementaires qui protègent les travailleurs. L’IA nous pousse à réfléchir également à l’élaboration d’outils à l’attention des militants FO pour mieux se l’approprier, à réfléchir enfin aux éventuelles opportunités qu’elle peut présenter pour compléter et appuyer nos actions en matière de développement. Cela implique nécessairement de penser à la sensibilisation et à la formation des militants FO pour que personne ne soit laissé sur le bord de la route! Nous devons lutter contre une IA dérégulée L’éditorial de Frédéric Souillot Secrétaire général @SouillotFo sur Twitter Retrouvez l’actualité de Force Ouvrière sur Internet : www.force-ouvriere.fr 0