Quels emplois demain à La Poste et chez Orange ?
La Poste se réorganise et développe de nouveaux services, bien souvent au détriment de l’emploi. Loin de colmater l’hémorragie de sa masse salariale, la Poste l’organise. Depuis 2012, Orange aura supprimé plus de 40 % de ses effectifs. Notre fédération dénonce cette politique drastique de réduction des coûts et de la masse salariale qui dégrade les conditions de travail et la qualité de service.
La Poste : pour un modèle social de l'emploi
La Poste est l'une des plus grandes entreprises françaises. Les missions de service public qui lui sont confiées sont importantes et sont plus que jamais encrées dans le quotidien des Français. Cependant, elle se réorganise et développe de nouveaux services, bien souvent au détriment de l’emploi. Loin de colmater l’hémorragie de sa masse salariale, elle l’organise.
En 2000, La Poste maison-mère comptait 320 000 postiers dans ses effectifs, contre 211 603 en 2018, et 31 776 agents du groupe ont intégré les filiales. Ainsi, 76 621 emplois ont été supprimés en vingt ans, soit un quart des effectifs. Sur les cinq dernières années, le bilan social de la Poste montre la disparition de 21 305 emplois, essentiellement au niveau des agents d’exécution, alors que l’emploi des cadres et cadres supérieurs est stable.
Une autre rupture s’opère. À l’image de l’évolution des catégories d’emploi en France, où le nombre de cadres a dépassé celui des ouvriers et des employés, l’évolution des catégories professionnelles de la maison-mère confirme cette tendance nationale. En partie de l’effectif total, on constate une diminution constante des agents d’exécution et une augmentation de la part des cadres et cadres supérieurs. Cette tendance de fond s’amplife.
Mais moins de personnel pour servir les clients est-il la meilleure des stratégies ? La question doit être posée et il est urgent de se saisir du problème. L’objectif principal, afin de garantir la pérennité de l’entreprise, n’est-il pas, si ce n’est de développer la clientèle, d’au moins la conserver ?
Si jusqu’à présent la Poste se cantonnait à recruter des CDD et des intérimaires, nous voyons de nouvelles formes d’emplois surgir. Tout naturellement, on constate donc une surenchère en matière de recrutement de force de travail variable. En 2010, il y avait 13 700 contrats à durée déterminée (CDD). En 2020, il y avait 8 813 CDD, 2 905 apprentis, et 1 221 contrats de professionnalisation. À ces chiffres doivent être rajoutés des intérimaires recrutés en fonction des besoins locaux, pour lesquels nous n’avons pas de vision précise. Concernant les nouvelles formes d’emploi, on constate l’embauche des CDI intérimaires depuis quelques années et d’autres nouveautés voient le jour : les CDD seniors et l’extension de l’utilisation des CDI étudiants.
S’il est vrai que, grâce à ce type de propositions, la Poste permet à certaines catégories de population de mettre la tête hors de l’eau, en matière de précarité, cela reste bien fragile.
L’équation postale à résoudre
La priorité sera-t-elle de continuer de recruter de la force de travail permanente avec le risque, en cas de détérioration de la situation, de devoir s’orienter vers des dispositifs de départs contraints ?
Pour notre fédération, les effectifs en place sont déjà insuffisants et la Poste doit au moins remplacer chaque départ par un emploi pérenne à temps complet. Ou alors la priorité serait-elle de conserver les emplois existants quitte, face aux incertitudes, à ne plus recruter que de la force de travail variable en attendant une situation plus stable ? Clairement, la Poste a choisi cette seconde option et le dernier accord socle le démontre bien.
Le modèle social de l’emploi revendiqué par notre fédération
Nous revendiquons un modèle social respectueux et à la hauteur des enjeux de l’emploi de demain. Pourquoi ?
- Pour améliorer les conditions de travail.
- Pour mieux répartir la charge de travail.
- Pour mieux assurer les formations et les actions de développement.
- Pour améliorer la qualité de service.
- Pour permettre la prise de congés.
- Pour assurer de vrais remplacements de toutes les absences.
- Pour réduire les incivilités.
- Pour assurer une présence postale de qualité sur tout le territoire…
Les raisons pour améliorer l’emploi et les conditions de travail sont multiples.
Orange : pour une politique de l'emploi socialement ambitieuse
D’année en année, les plans stratégiques se succèdent chez Orange, dépossédant l’entreprise de son capital humain au profit de la filialisation. Depuis 2012, l’entreprise aura supprimé plus de 40 % de ses effectifs. Entre 2020 et 2022, la direction d’Orange évalue une diminution d’encore environ 7 000 équivalents temps plein contrat à durée indéterminée (ETPCDI) si elle ne recrute pas. Notre fédération dénonce cette politique drastique de réduction des coûts et de la masse salariale qui dégrade les conditions de travail et la qualité de service.
De l’aveu de l’entreprise, cela fait des années qu'il manque constamment environ 3 000 ETPCDI pour faire face aux besoins. Entre les besoins et les effectifs, ce déficit allait de 2 155 à 3 850 ETPCDI d’ici 2022, selon les données affichées pour la période 2020-2022 dans le rapport sur les parcours emploi et compétences (PEC) présenté au comité social et économique central (CSEC) d’octobre 2020. Mais, par un curieux tour de passe-passe, la direction a abouti à une réduction de cet écart.
Aujourd’hui, en jouant sur ses estimations des besoins et des départs, la direction nous présente une possibilité de sureffectif de 808 ETPCDI « seulement ». Notre fédération conteste ces manipulations de chiffres qui aggravent la sous-estimation des besoins réels en personnel. Les sous-effectifs affectent l’ensemble des domaines, plus particulièrement des secteurs clefs comme la distribution (les boutiques), la relation client, grand public et les activités transverses. FO com' s’oppose à cette politique de l’emploi lourde de conséquences sur les conditions de travail. La déflation constante des effectifs génère en effet une forte pression sur les salariés restants et sur les services en flux tendu. Nous sommes convaincus qu’elle affecte également la compétitivité de l’entreprise.
Pour ne prendre que l’exemple du réseau commercial, les chiffres sur l’activité des télécoms publiés par l’ARCEP montrent que, depuis la réouverture des boutiques, le revenu issu de la vente de terminaux et équipements mobiles (1,1 milliard, soit 12 % du revenu total du marché de détail) a augmenté de 4,1 % en un an, soit un niveau trois fois plus important que celui du quatrième trimestre 2019. Ces résultats nous confortent dans notre conviction qu’il est inepte de massivement fermer nos boutiques et de se défaire de nos vendeurs. D'autant plus au moment du lancement de la 5G !
Dans un environnement hautement concurrentiel où le numérique est l’essence même de l’activité d’Orange, il est primordial de conserver les compétences en interne et de (ré-)internaliser l’ensemble des activités. Il faut donc massivement recruter en CDI pour faire face aux objectifs et aux enjeux stratégiques de demain. Dans un contexte aggravé par la crise sanitaire, l’entreprise qui se veut « socialement responsable » doit impérativement prendre les besoins du personnel en considération pour permettre à ses membres de faire face aux transformations des métiers du groupe et aux nouveaux défis technologiques. Elle en a les moyens ; il faut juste qu’elle en ait l’ambition.
La numérisation ou comment nuire à l'emploi
Les métiers sont de plus en plus confrontés à des bouleversements et des mutations majeurs avec, notamment, l’arrivée du numérique qui prend chaque jour un peu plus de place dans notre environnement de travail. À la rentabilité, la polyvalence, la flexibilité ou la compétitivité se rajoutent maintenant ces nouvelles technologies qui obligent à innover et à s’adapter de plus en plus vite et à être « agiles ». Pour nos dirigeants et les pouvoirs publics, si nous voulons garder et conforter notre place sur un marché mondialisé et ultra-concurrentiel, nous devons nous y plier, quel qu’en soit le prix. Nos entreprises (Poste, Orange et Télécoms) n’échappent pas au phénomène, au contraire.
Par définition, le progrès devrait être synonyme d’amélioration et de vie meilleure; c’est une transformation vers le mieux. Aujourd’hui, le développement technologique et la numérisation sont d’une telle « puissance » et d’une telle rapidité qu’ils en deviennent, dans bien des cas, un « fléau ». Souvent, au lieu de rendre le travail plus acceptable, avec de meilleures conditions pour l’exercer et plus de sens, il est au contraire vecteur de contraintes et de régression sociale.
Prenons de nouveaux métiers issus de cette transformation industrielle. Le métier de VTC, présenté comme un taxi « auto-entrepreneur » libre et sans contrainte patronale, n’est en fait que la petite main d’une plate-forme qui ignore le droit du travail. Le coursier à vélo, payé à la course, se rapproche plus d’un « esclave » moderne que d’un salarié respecté et protégé.
Tout en perdant son sens, le travail devient synonyme de mal-être et source de maladie. Stress, épuisement professionnel, « bore-out » et dépression sont le fruit d’une charge mentale épuisante. Alors que la machine remplace depuis longtemps bien des tâches pénibles, répétitives et aliénantes, l’arrivée du numérique aurait dû conforter ce progrès. L’inverse se produit. Les nouvelles organisations du travail (telles la mise en place d’unités de production ou le lean management) ne s’appuient pas sur la technologie pour du mieux mais pour plus de rentabilité, de productivité et de flexibilité. Les entreprises demandent ainsi de faire toujours plus et toujours plus vite. La technologie est maître du monde, le salarié sa variable d’ajustement économique.
Dans beaucoup d’entreprises (à commencer par la Poste et Orange), les plans stratégiques servent à faire accepter ces conditions dégradées par les salariés en leur démontrant « qu’on n’a pas le choix » au regard des situations économiques. Il faut ainsi faire des efforts, à commencer par les efforts pécuniaires, il faut être flexible. À coups de puissantes démonstrations de chiffres, on nous expose de grands et inévitables projets nous faisant croire que les salariés sont acteurs de leur destin professionnel.
Ce constat, qui ne va qu’en s’amplifiant, rend le combat syndical encore plus indispensable et d’une urgence absolue. Notre organisation syndicale s’insurge face à des situations sociales et professionnelles « d’un autre âge » sans revalorisation des compétences ni évolution au sein des effectifs de travail. Pour FO com', il est impératif de définir les évolutions des différentes activités, secteur par secteur, et correctement dimensionner les emplois à y consacrer. De plus, notre organisation syndicale revendique des formations à hauteur des changements qui doivent se faire sans dégradation des conditions de travail, avec des règles d’hygiène et de sécurité adaptées et le respect des droits sociaux.
La compétitivité et la rentabilité ne doivent pas être le corolaire d’un emploi massacré, d’organisations de travail dégradées, de santé mise en péril aussi bien sur le plan physique que psychologique et d’une reconnaissance nulle. À force de tirer sur la corde, elle va finir par casser...
C'est pourquoi nous exigeons toujours l’abandon de la réforme de l’assurance chômage. Reportée deux fois pour cause de crise sanitaire, la réforme de l’assurance chômage devrait entrer en vigueur le 1er juillet prochain. Depuis le début, notre organisation s'oppose à cette réforme et en demande l’abandon. C’est en ce sens que notre confédération a déposé un recours devant le Conseil d’État.
Alors que tout chômeur doit pouvoir bénéficier d’un revenu de substitution, le principe de cette réforme est de baisser les allocations de chômage (environ 17 % d’après les calculs de l’UNEDIC), pour faire des économies budgétaires aux dépens des chômeurs. Le durcissement des règles d’indemnisation et la dégressivité pour les cadres ou la prise en compte des jours non travaillés dans le calcul de l’allocation vont affecter les salariés, notamment ceux alternant périodes travaillées et périodes de chômage.
Notre organisation syndicale évalue à 1,2 million le nombre d’allocataires qui vont être perdants et rappelle, qu’au contraire, « l’assurance chômage doit être adaptée à la situation des chômeurs pour améliorer leurs droits ».
L’emploi, fer de lance du progrès social
Jusqu’au milieu des années 1970, le travail assurait une certaine sécurité en garantissant l’accès à la protection sociale, notamment les droits à la retraite. L’emploi lié était souvent de qualité.Le premier choc pétrolier a sonné la fin de cette période de plein emploi et le chômage, d’abord à la marge, est devenu une réalité sociale et économique durable.
Selon l’INSEE, au premier trimestre 2021, le nombre de chômeurs en France s’élevait à près de 6 millions et cette situation devrait s’aggraver avec la crise sanitaire. D’après les chiffres avancés par la revue Alternatives Économiques, au 31 mars 2021, la France a perdu 700 000 emplois en six mois, soit le nombre d’emplois précédemment créés en trois ans. Paradoxalement, on estime à 300 000 le nombre d’emplois vacants en France. Ce phénomène s’explique en partie par le manque de qualifications, 17 % des jeunes sortant du système scolaire sans être qualifiés. Il manque des techniciens dans des secteurs comme les télécommunications, l’agroalimentaire et le bâtiment où la moitié des postes reste à pourvoir.
L’évolution rapide des technologies oblige les entreprises à une recherche quasi constante de 15 000 ingénieurs dans le secteur du numérique. Il est donc urgent de revoir le système éducatif en redonnant la priorité à la formation scientifique pour répondre aux besoins d’emplois générés par la révolution technologique et surtout donner les qualifications nécessaires aux jeunes afin de leur assurer une insertion optimale dans le monde du travail.
Emploi des jeunes et seniors : parcours du combattant
Depuis 1975, le taux de chômage des 15-24 ans a toujours été nettement supérieur à la moyenne nationale, avec un nombre élevé de « not in employment, education or training » (NEET). La crise sanitaire, qui a fait grimper ce taux de chômage au-delà de la barre des 20 %, va avoir un effet « systématique, profond et disproportionné », prévient l’OIT, tout en précisant que « les jeunes sont les premières victimes des conséquences socio-économiques de la pandémie. Il existe donc un risque que leurs vies professionnelles soient marquées à jamais, conduisant à une génération du confinement ». L’OCDE a dressé le même constat.
Le plan proposé par le gouvernement « un jeune, une solution » de 6,5 milliards d’euros comprend une incitation financière aux entreprises pour l’embauche d’une personne entre 18 et 26 ans, une aide pour les contrats d’apprentissage et de professionnalisation ainsi que la relance des contrats aidés. Les mesures gouvernementales, une fois de plus, sont non contraignantes pour les entreprises qui n’ont aucune obligation de garder le salarié. En revanche, le gouvernement compte bien agir sur le coût du travail avec des baisses de cotisations sociales patronales répondant ainsi à l’antienne du MEDEF. Pour notre organisation syndicale, ce plan d’urgence ne s’inscrit pas dans la durée et est loin d’être satisfaisant, le risque étant d’installer les jeunes dans la précarité.
Chaque jeune doit avoir accès aux formations supérieures qui répondent aux besoins actuels. Commencer par le chômage, c’est risquer d’être rapidement mis sur la touche. Il y a urgence puisque, après chaque crise (pétrolière dans les années 1970, financière en 2008 et aujourd’hui sanitaire), le taux de chômage des jeunes grimpe plus vite que celui de la population générale. En parallèle, notre organisation revendique l’accès au RSA pour les moins de 25 ans.
Au-delà des jeunes, l’emploi des seniors se dégrade également avec les reculs successifs de l’âge de départ en retraite. Le taux de chômage des seniors (60-64 ans) évalué à environ 7,5 % cache un fort taux d’inégalité : une personne sur cinq entre 59 et 61 ans n’a plus d’emploi, sans pour autant être à la retraite. Par découragement ou pour des raisons de santé, elle n’en recherche plus, sortant ainsi des statistiques officielles. L’âge est une des discriminations à l’embauche. D’après la DARES, c'est même souvent le premier motif de discrimination. Si c'était encore nécessaire, ces constats prouvent l’absurdité de la future réforme des retraites ; c’est pourquoi notre organisation syndicale en demande toujours l’abandon.
Pour lutter contre le chômage, on nous impose la précarité.
La menace quotidienne du chômage et la raréfaction du travail influent sur la qualité des emplois proposés. Depuis les années 1980, on voit un panel de situations intermédiaires et flexibles entrecoupées de périodes de chômage se développer : stage, intérim, intermittents, saisonniers, indépendants, CDD et CDII. Ces conditions d’emplois précaires permettent de faire sortir des milliers de travailleurs des statistiques officielles du chômage, sans pour autant leur procurer un emploi stable. Non comptabilisés comme chômeurs, ils sont le plus souvent dans des situations économiques critiques et/ou à la charge de tiers et des associations caritatives. Un million de personnes sont en emploi avec un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté (50 % du revenu médian).
Les ouvriers non qualifiés assurent un tiers des emplois précaires. Quant au taux global de précarité, il est de 14,4 % pour les femmes contre 12,8 % pour les hommes (chiffres 2018). L’emploi ne joue plus son rôle d’intégration sociale et l’insécurité sociale, financière et économique est accentuée par le temps partiel imposé. Pour lutter contre cette précarité, notre organisation ne cesse de revendiquer une réelle revalorisation du SMIC, l’encadrement de l’utilisation des emplois courts (mise en place de bonus-malus) et bien évidemment l’abandon du projet de loi de l’assurance-chômage.
Notre réflexion sur la question de l’emploi doit être globale et porter sur sa structuration car le sujet est complexe ; il englobe formation, industrialisation, recherche et développement. Seule une ambitieuse politique de l’emploi et de revalorisation des salaires, pensions et retraites est à même de lutter contre le chômage et de relancer l’économie par la demande.
Notre organisation syndicale revendique contrôle et contreparties à toutes les aides à l’embauche pour éviter les effets d’aubaine ainsi qu’un dispositif type ARPE qui favoriserait l’emploi des jeunes dans le cadre de départs anticipés de seniors. Les formations doivent être de qualité, certifiantes et qualifiantes. Enfin, cela ne peut se mettre en place qu’avec des moyens et des effectifs supplémentaires chez Pôle Emploi.
Quel avenir pour l'emploi et à qui va profiter la relance ?
Pour autant, un retour au plein emploi ne signifierait pas la fin de la précarité professionnelle et la disparition du sous-emploi. Bien au contraire, dans le cadre du libéralisme économique décomplexé, plein emploi se conjugue avec sous-emploi. Ainsi, si l’Allemagne fait figure de modèle avec un taux de chômage de 4,9 % en 2019, ce résultat est le fruit d’une politique de précarisation et de sous-valorisation du travail (mini emplois à 400 euros, déréglementation du marché du travail, explosion du temps partiel et de la pauvreté…). Derrière ces statistiques de complaisance se cachent des mesures de régression sociale inouïes et très éloignées d’une situation de plein emploi.
En France, via un « pacte productif 2025 », le gouvernement entend atteindre le plein emploi tout en répondant aux défis du numérique et du changement climatique. Pour ce faire, il compte s’appuyer sur trois choix politiques; la France doit rester une nation de production, augmenter ses exportations et pleinement être dans la course à l’innovation technologique. Mais attention à ne pas s’arrêter aux bonnes intentions ! Encore combien d’allègements fiscaux pour les entreprises, de diminutions de cotisations sociales patronales, de fragilisations de la protection sociale et juridique des salariés va-t-il falloir endurer ? Pour finalement combien de créations d’emplois ? Rappelons-nous le coûteux CICE qui devait, selon le MEDEF, créer un million d’emplois !
Les choix et les politiques sont d’autant cruciaux que l’emploi se transforme avec les nouvelles technologies, bouleversant les métiers et les secteurs d’activité. Robotisation puis numérisation, travail en réseau et en plate-forme remettent en cause nos méthodes d’organisation, de management et nos relations professionnelles dans leur globalité. Le contrat de travail vole en éclat, les conditions de travail se dégradent, épuisement professionnel et précarité s’intensifient.
Si les nouvelles technologies sont porteuses d’espoir, supprimant les travaux répétitifs, inintéressants ou pénibles, elles sont aussi trop souvent synonyme de destruction d’emplois et de déshumanisation du travail. Les auto-entrepreneurs exerçant des emplois en lien avec des plates-formes numériques par exemple ne sont pas indépendants. L’absence de contrat de travail n’est pas une liberté supplémentaire, elle leur confère les inconvénients du salariat sans les protections inhérentes.
Si, pour beaucoup, c’est une manière d’échapper au chômage, ils attendent un emploi plus stable, respectueux de leurs conditions de vie et mieux rémunéré. Ces emplois « ubérisés » s’apparentent plus à du travail à la tâche, d’ailleurs contesté dans de nombreux pays. Aussi, le statut de salarié ne vient-il pas de leur être reconnu au Royaume-Uni ?
Aujourd’hui, face à la mal nommée loi sur le travail et aux ordonnances « Macron », nos revendications sont plus que jamais d’actualité dans cette période de crise sanitaire. La priorité à l’emploi devrait obliger l’État à conditionner ses aides au maintien de l’activité et à la qualité des emplois. Combattre les dérives de la sous-traitance et de l’intérim, sanctuariser les fonds de la formation professionnelle, protéger et garder les entreprises stratégiques sur notre territoire, faire de la transition écologique un atout pour l’emploi industriel, former les salariés aux métiers de demain ou encore identifier les secteurs d’avenir... Toutes ces mesures doivent développer de vrais emplois avec de vrais salaires. Il en va du progrès social, de l’avenir de la protection sociale, de la justice sociale et de la démocratie.