Organisations
La santé des postiers, c’est l’avenir de la Poste
La semaine dernière, à l'occasion de la journée mondiale pour la santé et la sécurité au travail, quelque 180 personnes (en majorité des postiers) ont participé au colloque organisé par la fédération FO com « la santé des postiers, c’est l’avenir de la Poste », au siège de la confédération FO. Evelyne Salamero, journaliste à FO Hebdo a suivi cette journée.
« Le temps n’est plus au diagnostic. Aujourd’hui, la question est : qu’est-ce qu’on fait ? ». Michel Debout, professeur de droit de la santé, a introduit en ces termes les travaux du colloque organisé par la fédération FO sur le mal-être au travail à la Poste.
Plusieurs experts et militants ont tour à tour apporté des éléments de réponse.
Marion Denneulin (du cabinet Technologia) a ainsi souligné la nécessité d’analyser les raisons de la montée de l’absentéisme et d’en faire un enjeu du dialogue social.
Cadres : de 9 000 jours d’arrêts maladie par an à près de 40 000 en moins de dix ans
À la Poste, le coût de l’absentéisme monte à 400 millions d’euros par an. Les postiers, notamment les facteurs, souffrent particulièrement, a confirmé une enquête SUMER (surveillance médicale des expositions aux risques professionnels) réalisée entre 2014 et 2015 auprès de 4 000 agents (dont 3 000 facteurs) et présentée lors de ce colloque par Paul Bouffartigue (sociologue) et Jacques Bouteiller (directeur de recherche au CNRS).
Chez les cadres, le nombre de jours d’arrêt maladie est passé de 9 000 à près de 40 000 en moins de dix ans, ce que l’augmentation de la moyenne d’âge ne suffit pas à expliquer.
Le seul moyen de faire évoluer les employeurs est que le coût des dégâts causés par le mal-être au travail leur incombe, alors qu’il est actuellement pris en charge par la collectivité au travers de l’Assurance-maladie, a insisté le fondateur et directeur général du cabinet Technologia, Jean-Claude Delgènes. Pour cela, a-t-il précisé, il faut que les troubles psychiques liés au mal-être au travail (comme le syndrome d’épuisement professionnel) soient reconnus comme des maladies professionnelles.
La direction craint les syndicats, témoigne un ancien médecin du travail de la Poste.« Pour redonner du sens au travail, il faut connaître le travail, son contenu. Il faut cesser de passer plus de temps à contrôler qu’à travailler. Il faut libérer le travail de l’encadrement », a défendu Denis Garnier, de la fédération FO des services publics et de santé, chargé de la prévention des risques pour la fédération hospitalière.
Jean-Paul Kaufmant (ancien médecin du travail à la Poste) a dénoncé la falsification connue de la hiérarchie au plus haut niveau, des indicateurs de résultats de l’entreprise parce qu’en réalité les objectifs imposés sont irréalisables.
Effectifs, organisation du travail… « Les belles paroles ne serviront à rien si l'on n’y met pas les moyens ».
Tous les intervenants ont souligné l’importance de l’action syndicale dans ce combat contre le mal-être au travail. Fort de son expérience auprès de la direction de la Poste Jean-Paul Kaufmant a indiqué : « Combien de fois ai-je entendu « pourvu que les syndicats ne nous mettent pas le bazar ! ». Ils vous craignent ».
Justement, la salle, essentiellement composée de postiers syndicalistes, n’a pas mâché ses mots. « On nous parle de changement de mentalités ; on nous dit que l’on va « adapter le poste de travail à l’homme ». Mais la vérité, c’est que les organisations du travail actuelles ne le permettent pas. Les moyens actuels ne le permettent pas. Les heures supplémentaires ne sont même pas payées ! Les absents ne sont pas remplacés. Les belles paroles ne serviront à rien si l'on n’y met pas les moyens », a ainsi dénoncé une militante.
« On cherche à émietter les forces sociales comme on cherche à détruire les garanties collectives ».Philippe Charry (secrétaire général de la fédération FO com) l’a souligné en conclusion du colloque : « La Poste doit avoir une organisation de la prévention indépendante et qui ait les moyens d’agir (…) Mais toutes les questions de santé au travail ramènent à la question économique, donc à celle de l’organisation du travail et des effectifs ».
Tous les intervenants ont également souligné l’importance de redonner sa place au « collectif de travail » face à une organisation du travail basée sur l’individualisation et l’isolement des agents.
« On cherche à émietter les forces sociales comme on cherche à détruire les garanties collectives », a résumé Philippe Charry, parfaite transition avec la manifestation pour le retrait de la loi sur le travail que les participants au colloque ont rejointe.
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