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Les modalités de versement de la contrepartie financière de non-concurrence
Depuis un arrêt de la Cour de cassation du 16 juillet 2002 (n° 00-45135), la clause de non-concurrence doit nécessairement prévoir le paiement d’une indemnité compensatrice, fixée soit par la convention collective, soit par le contrat de travail. La jurisprudence a été conduite à en préciser les modalités de versement.
L’interdiction du versement durant l’exécution du contrat de travail
Pour la Cour de cassation, la contrepartie financière de la clause de non-concurrence a pour objet d'indemniser le salarié qui, après rupture du contrat de travail, est tenu d'une obligation qui limite ses possibilités d'exercer un autre emploi, de sorte que son paiement ne peut intervenir avant la rupture (Cass. soc., 7 mars 2007, n° 05-45511).
L’employeur ne peut donc pas prévoir de s’acquitter de la contrepartie financière « en avance », en versant une indemnité au salarié au mois le mois, durant l’exécution du contrat de travail.
Même si une ligne distincte est mentionnée sur le bulletin de salaire, identifiant clairement la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, cette interdiction s’applique.
La solution est logique car la contrepartie financière de la clause de non-concurrence est directement liée à l’interdiction de concurrence, laquelle intervient à la rupture du contrat de travail.
En présence d’une cause prévoyant une contrepartie financière payée mensuellement durant l’exécution du contrat, l’employeur ne peut pas obtenir la restitution des sommes versées et le salarié qui respecte la clause a droit à une indemnisation (Cass. soc., 17 novembre 2010, n° 09-42389).
La solution est sévère pour l’employeur, condamné à payer une indemnité de non-concurrence qui n’est pas valable et qui est donc totalement inutile…
La Cour de cassation justifie sa position en considérant que le paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence en cours d'exécution du contrat s'analyse en un complément de salaire qui n'est pas dénué de cause (Cass. soc., 15 janvier 2014, n° 12-19472).
Les risques du versement en capital lors de la rupture du contrat de travail
En principe, la contrepartie financière est versée au salarié mensuellement, à la rupture du contrat de travail, à supposer naturellement qu’il respecte l’interdiction de concurrence.
- NB : Il est rappelé, à cet égard, que la contrepartie financière revêt la nature d’un élément de salaire, soumis comme tel à cotisations sociales. Elle se voit appliquer l’indemnité de congés payés (10 % en principe) (Cass. soc., 28 novembre 2001, n° 99-46032). Il est donc essentiel de préciser si la contrepartie financière s’entend « congés payés inclus ». À défaut, le salarié est fondé à solliciter un complément égal à 10 %.
La question se pose de savoir si l’employeur peut verser la contrepartie financière en une seule fois, avec le solde de tout compte du salarié.
Pour la Cour de cassation, lorsque la convention collective prévoit le versement de la contrepartie financière sous forme d'une indemnité mensuelle, cette indemnité prend naissance mois par mois et le salarié ne peut pas en obtenir le paiement immédiat en capital dès la date de la rupture de son contrat de travail (Cass. soc., 16 décembre 2015, n° 14-21890).
Tels que les motifs de l’arrêt sont libellés, il est permis de penser que l’employeur pourrait choisir de payer l’indemnité de non-concurrence en une seule fois (le salarié ne pouvant l’exiger).
Cette solution est particulièrement risquée.
D’une part, si le salarié ne respecte pas l’interdiction de concurrence, l’employeur devra alors engager une action pour le remboursement de la contrepartie financière indûment versée.
D’autre part, la Cour de cassation pourrait juger que le versement de l’indemnité de non-concurrence en capital ne libère pas l’employeur de tout paiement ultérieur si le salarié respecte son obligation de non-concurrence au mois le mois…
Il est donc conseillé de verser la contrepartie financière mensuellement ou, à tout le moins, selon la périodicité prévue par la convention collective.
Le point de départ du versement
La contrepartie financière n'est pas due au salarié à la date de rupture du contrat de travail mais, plus précisément, à la date à laquelle il est tenu à l’obligation de non-concurrence.
Ainsi, en cas de licenciement avec dispense d'exécution du préavis, la date d'exigibilité de la contrepartie financière est celle du départ effectif du salarié de l'entreprise (Cass. soc., 22 juin 2011, n° 09-68762).
Par conséquent, la majoration de salaire correspondant à la contrepartie financière doit être ajoutée au salaire perçu par le salarié pendant le préavis dont il est dispensé d’exécution.
Enfin, précisons que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ne peut pas être payée au salarié en une fois à l’issue de la période d’application de la clause (Cass. soc., 2 mars 2005, n° 03-42321).