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21 / 02 / 2014 | 39 vues
Nicolas Fourmont / Membre
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Réforme de la formation : qui aura le vent en poupe, qui l'aura de face ?

Au-delà de toute valeur de jugement, il est très rare que des réformes soient engagées et que les équilibres antérieurs ne soient remis en cause. L’accord national interprofessionnel (ANI) portant sur la formation professionnelle, signé par les partenaires sociaux le 14 décembre 2013, ne déroge pas à la règle.

Le tableau synthétique ci-dessous vise à faire le point sur les acteurs que la réforme va avantager et ceux dont la tâche risque d’être complexifiée.   

 

 

Dynamiques prévisibles

 

Les acteurs concernés

 

 

Analyses commentées

 Ils ont le vent en poupe...

Les cadres

Demain, il sera demandé aux salariés d’être les principaux acteurs de leur évolution professionnelle. Les cadres sont généralement familiers de ces logiques qui visent à organiser la gestion de leur carrière et à mobiliser des actions de formation. L’ANI va donner davantage de moyens à ces catégories de personnel.

Les salariés des grandes entreprises

Les grandes entreprises, qui ont l’habitude de mobiliser des moyens de formation importants, continueront d’investir pour répondre à leurs besoins. Mais en parallèle, l'ANI va prochainement donner plus de moyens aux salariés. Ceux des grandes entreprises pourront mobiliser le CPF pour doper leur évolution de carrière. Les dernières informations portées à notre connaissance laissent présager que le CPF soit abondé de 24 heures de formation par an et non 20 heures, comme l’ANI du 13 décembre 2013 le prévoyait.

Les chômeurs

L’un des objectifs de cette réforme de la formation visait à favoriser l’accès des demandeurs d’emploi à la formation. Il est question de relever les fonds de la formation destinée aux chômeurs, revalorisés de 600 à 900 millions d’euros.

Les OPCA

(organismes paritaires collecteurs agréés)

L’ANI renforce le rôle des OPCA en matière de financement (CPF) et d’information aux entreprises et aux salariés.

La réforme place les OPCA au centre du dispositif et elle réclame une montée en compétence rapide. Techniquement, un système d’information d’envergure devrait voir le jour afin de suivre et gérer les compteurs du CPF.

Plus largement, il s'agit d'une lourde responsabilité qui pèse sur les épaules des organismes collecteurs : les OPCA feront-ils face aux enjeux de demain ? Les moyens financiers vont-ils être mis en œuvre pour relever le défi ?

Les régions

Les régions portent déjà dans leurs attributions la formation des adultes. L’ANI renforce le positionnement des régions. En creux, les perspectives de cofinancements et l’information des acteurs (dynamique des bassins d’activité et d’emploi) sont attendues de ces collectivités locales. Nous sommes en plein dans les dynamiques de GPEC territoriales qui ont le vent en poupe.

 

Ils ont le vent de face...

Les organismes de formation de petite taille

Avec le CPF, les formations certifiantes, qualifiantes et diplômantes sont mises au centre du dispositif de formation. Cela n’était pas une exigence dans le cadre du DIF et cette différence risque d’avoir des incidences dans le secteur de la formation.

Les organismes de formation qui souhaiteront dispenser des formations dans le cadre du CPF devront développer des modules en lien avec des besoins de branches professionnelles. Nous allons aller de plus en plus vers des conventions avec des branches et/ou des régions (développement de dynamiques territoriales). Tous les organismes de formation n’auront pas la capacité de s’adapter à cette nouvelle donne. Le secteur de la formation devrait donc se concentrer.  

Notons que le secteur est composé de 58 700 prestataires de formation (chiffres de 2011), dont 23 % sont des particuliers. La donne va changer pour ces indépendants qui ont beaucoup à perdre avec le passage du DIF (système ouvert) au CPF (système contrôlé et plus restrictif quant à la délivrance de formation).

Les TPE/ PME

Comme la CGPME le craignait, la réforme va affaiblir les mécanismes de péréquation financière existants. Aujourd’hui, les grandes entreprises contribuent davantage en matière de formation que les entreprises de moins de 50 salariés. Il y a une logique à cela, notamment dans une relation donneur d’ordres/sous-traitants.

Mais à compter du 1er janvier 2015, les contributions au financement de la professionnalisation vont baisser pour les grandes entreprises (passant de 0,5 % à 0,4 % de la masse salariale) et nettement augmenter pour les petites entreprises (0,15 % à 0,3 %). En conséquence, les TPE/PME vont davantage contribuer à la professionnalisation mais vont-elles pour autant davantage former leurs salariés ? Rien n’est moins sûr.

Les employés, les  ouvriers et les intérimaires

Les ouvriers et les employés accèdent moins à la formation que les autres catégories professionnelles. Les entreprises jouent moins bien le jeu de la formation professionnelle vis-à-vis de ces salariés. Les investissements sur les salariés identifiés comme portant la valeur ajoutée de l’entreprise captent généralement la plus grande partie des enveloppes de rémunération, ainsi que les moyens de formation.

 

 

L’employeur a une responsabilité vis-à-vis de ses salariés. Cela demeure et la jurisprudence se renforce en la matière. Mais la capacité des gens à piloter leur trajectoire professionnelle est un enjeu central dans le monde du travail actuel. La réforme de la formation risque de renforcer les inégalités existantes.

Le danger est que nous trouvions :

  • d’un côté, ceux qui se saisiront des dispositifs de formation mis à leur disposition ;
  • de l’autre, les salariés qui estimeront que le système reste opaque. Ces derniers seront alors les grands perdants.

Sans actions fortes, la fracture entre les salariés devrait se renforcer.

Mais comment amener les salariés les plus éloignés de la formation à actualiser régulièrement leur(s) qualification(s) et leurs compétences ? La réforme actuelle dit peu de choses sur cette question cruciale.

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