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21 / 10 / 2011 | 124 vues
Didier Porte / Membre
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Intranet syndical : du nouveau...

Le réseau intranet est la propriété de l’employeur. Lui seul peut décider de l’ouvrir, ou non, aux communications syndicales, en vertu de l’article L.2142-6 du Code du Travail. Cette possibilité de diffuser des tracts électroniques sur le réseau interne de l’entreprise sera prévue et organisée dans un accord collectif. Il s’agira, selon les cas, d’ouvrir un site syndical sur l’intranet de l’entreprise, ou de permettre l’envoi de tracts (selon une périodicité et des limites techniques prévues par l’accord) sur la messagerie des salariés. L’accord collectif peut évidemment autoriser ces deux modalités (voir pour des détails « Le syndicat, la toile et le réseau », InFOjuridiques n° 53, avril 2006, et le dossier qui y est consacré sur le site de FO).
 
La question qui s’est posée à la Cour de Cassation était la suivante. Dans l’UES Cap Gemini, deux accords ont été conclus : l’un portant sur les moyens des délégués syndicaux, l’autre, de 2002, sur la diffusion de l’information sociale et syndicale. L’employeur a estimé que ces accords n’étaient applicables qu’aux seuls syndicats représentatifs. Il a donc refusé à un syndicat autonome non représentatif (le CG-AS) l’accès à l’intranet syndical, modalité prévue dans un des accords. Le syndicat a saisi la justice pour contester cette éviction. Le syndicat s’est notamment basé sur le principe constitutionnel d’égalité.
 
Le 6 mai 2010, la Cour d’Appel de Paris a sanctionné l’UES en la condamnant à ouvrir aux syndicats non représentatifs qui possédaient une section syndicale dans la structure le bénéfice de l’accord de 2002. L’affaire a été renvoyée en cassation. Les hauts magistrats ont finalement donné raison au syndicat non représentatif, par un raisonnement simple.

La Cour de Cassation a retenu, de prime abord, que les articles du Code du Travail (L.2142-3 à L.2142-7) relatifs à l’affichage et à la diffusion des communications syndicales à l’intérieur de l’entreprise visaient toutes les organisations syndicales qui avaient constitué une section syndicale dans l’entreprise, laquelle constitution n’est pas réservée à une condition de représentativité. La Cour en déduit que les dispositions d’une convention ou d’un accord collectif visant à faciliter la communication des organisations syndicales ne peuvent être limitées aux seuls syndicats représentatifs et doivent bénéficier à tous les syndicats qui ont constitué une section syndicale. À défaut, il y aurait méconnaissance du principe d’égalité (Cass. soc., 21 septembre 2011, n° 10-19017 et 10-23247, P+B).
 
En conséquence, la Cour de Cassation ouvre l’accès de l’accord de 2002 applicable à Cap Gemini à toutes les organisations ayant constitué une section syndicale, dont le syndicat CG-AS, pourtant non représentatif. Désormais, ce dernier peut accéder à l’intranet de l’entreprise pour communiquer auprès des salariés.
 
  • C’est un pouvoir certain que confère la Cour de Cassation aux syndicats non représentatifs. En effet, il est plus compliqué pour le représentant de section syndicale, qui ne dispose que de quatre heures de délégation par mois, de tracter par voie papier que de cliquer pour envoyer un message à tous les salariés ou pour mettre à jour sa page sur l’intranet.

 

Il est tout de même cocasse que la Cour se réfère, pour arrêter sa décision, au principe constitutionnel d’égalité, alors que c’est au nom de ce même principe qu’elle avait décidé, par une décision du 22 septembre 2010 (n° 09-60410), que « ne méconnaît pas le principe constitutionnel d'égalité la disposition d'un accord collectif, plus favorable que la loi, qui subordonne l'octroi d'avantages à des syndicats à une condition de représentativité » (il s’agissait en l’espèce d’exclure un syndicat non représentatif du bénéfice de la convention collective de la Société Générale. Le syndicat voulait s’appuyer sur cette convention pour désigner un représentant syndical national, à l’instar des syndicats représentatifs. Il en a été empêché au nom du principe d’égalité de traitement).
 

  • La question que la Cour de Cassation devra donc trancher une fois pour toute est celle-ci : un syndicat représentatif est-il placé dans la même situation qu’un syndicat non représentatif au regard du principe d’égalité de traitement ?

De nombreuses questions, actuellement en suspens (ex : un RSS peut-il être désigné représentant syndical au CE dans les entreprises de moins de 300 salariés ?), dépendent de cette réponse…

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