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Les délais de carence Pôle Emploi
Les délais de carence liés à l’assurance-chômage, ou « différés d’indemnisation », sont parfois méconnus. Tant l’employeur que le salarié doivent en connaître le régime, notamment en cas de négociation de départ.
Le différé d'indemnisation « congés payés »
L’article 21 du règlement général d’assurance-chômage du 14 mai 2014 (ci-après « RG ») prévoit le report du versement des allocations à l’expiration d’un délai qui tient compte de l’indemnité compensatrice de congés payés perçue par le salarié à la rupture du contrat de travail.
L’objectif de cette règle est simple : l’intéressé ne peut pas cumuler une indemnité de congés payés et des allocations d’assurance-chômage.
La durée du différé d’indemnisation « congés payés » est calculée en divisant le montant de l’indemnité compensatrice de congés payés par le salaire journalier de référence déterminé par Pôle Emploi (RG, art. 13).
Ce différé court à compter du lendemain de la fin du contrat de travail (terme du préavis, qu’il soit ou non exécuté).
Si toutes ou une partie des indemnités compensatrices de congés payés sont versées postérieurement à la fin du contrat de travail ayant ouvert des droits, l'allocataire et l'employeur sont dans l'obligation d'en faire la déclaration.
Les allocations indûment perçues par l’allocataire doivent alors être remboursées.
- NB. Pour les salariés qui relèvent d'une caisse de congés payés (par exemple, dans le secteur du bâtiment), le différé d'indemnisation « congés payés » est déterminé à partir du nombre de jours correspondant aux congés payés acquis au titre du dernier emploi, ce nombre de jours étant déterminé par la caisse.
Le différé d’indemnisation spécifique
Au différé « congés payés » s’ajoute un différé spécifique applicable lorsque le salarié a perçu des indemnités liées à la rupture du contrat de travail, quelle que soit leur nature, « dès lors que leur montant ou leurs modalités de calcul ne résultent pas directement de l'application d'une disposition législative » (RG art. 21 § 2).
Ce différé concerne donc les salariés qui ont perçu de leur employeur, lors de la rupture du contrat de travail, des indemnités supérieures à celles strictement prévues par la loi (indemnités dites « supra-légales »).
- Indemnités exclues
Ne sont donc pas visées : l’indemnité légale de licenciement, l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle pour sa partie n'excédant pas le montant de l'indemnité légale de licenciement, l’indemnité de fin de CDD et l’indemnité de fin de mission de travail temporaire, l’indemnité de clientèle des VRP, les indemnités de départ ou de mise à la retraite…
De même, sont exclus de l'assiette de calcul du différé spécifique les minima des sanctions indemnitaires prévues par le Code du travail (indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de requalification d’un CDD, indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement…).
Par ailleurs, selon la circulaire Unédic n° 2014-26 du 30 septembre 2014, l’indemnité forfaitaire de conciliation versée au salarié lors de la phase de conciliation devant le Conseil de prud’hommes (C. trav. art. L. 1235-1 et D. 1235-21) échappe au différé d’indemnisation spécifique.
Cette solution est avantageuse car l’indemnité transactionnelle versée au salarié en dehors de cette hypothèse fait naître un différé d’indemnisation spécifique (cf § 2.2).
La Cour de cassation a ajouté à ces cas d’exclusion l'indemnité pour jours de RTT non pris instituée par un accord d'entreprise, dans la mesure où celle-ci n'est pas inhérente à la rupture du contrat de travail mais correspond au montant de la rémunération légalement due au salarié en raison de l'exécution d'un travail entre 35 et 39 heures (Cass. soc., 31 octobre 2007 n° 04-17.096).
- Sommes incluses
Les indemnités ou sommes inhérentes à la rupture de contrat, quelle que soit leur nature, dont le montant ou les modalités de calcul ne résultent pas directement de l'application de dispositions législatives, entrent dans l’assiette de calcul du différé spécifique.
Il s'agit, d'une part, des indemnités ou sommes prévues par des dispositions autres que législatives et, d'autre part, de la fraction des indemnités ou sommes versées au-delà des minima ou des maxima prévus par la loi.
Pour l’essentiel, sont visées :
- l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle pour la fraction excédant le montant de l'indemnité légale de licenciement ;
- l’indemnité conventionnelle de licenciement, pour la part dépassant l’indemnité légale ;
- l’indemnité transactionnelle ;
- les sommes prévues dans le cadre d'un PSE pour la part dépassant les minima légaux ;
- les indemnités versées au VRP, pour la part dépassant l'indemnité légale de licenciement ;
- les indemnités de non-concurrence ;
- l’indemnité forfaitaire de conciliation pour la part excédant le montant résultant de l'application du barème de l'article D 1235-21 du Code du travail ;
- les indemnités accordées par le juge en cas de licenciement irrégulier ou dépourvu de cause réelle et sérieuse (C. trav. art. L 1235-2 et L 1235-3) pour la part excédant les minima légaux ou attribuées au salarié ayant moins de 2 ans d'ancienneté ou occupé dans une entreprise occupant moins de 11 salariés (Cass. soc., 15 juin 2010 n° 08-20.513).
Ici encore, si toute ou une partie de ces sommes est versée postérieurement à la fin du contrat de travail ayant ouvert des droits, le demandeur d’emploi et l'employeur sont dans l'obligation de les déclarer.
Les allocations indûment perçues par l’allocataire doivent alors être remboursées, qu'elles soient versées en exécution d'une décision de justice, à l'amiable ou à titre transactionnel (RG, art. 21 § 2 ; circ. Unédic 2014-26 du 30 septembre 2014).
- Calcul du différé spécifique
Le différé spécifique correspond à un nombre de jours égal au nombre entier obtenu en divisant le montant total des sommes incluses (cf § 2.2.) diminué, le cas échéant, du montant résultant directement de l'application d'une disposition législative (cf § 2.1), par 90.
Par exemple, un salarié a conclu une rupture conventionnelle et perçu à cette occasion une indemnité spécifique de rupture conventionnelle de 20 000 € alors que son indemnité légale de licenciement (théorique) s’élevait à 8 000 €. Son différé d’indemnisation est de 133 jours (20 000 - 8 000 / 90).
Le différé spécifique est plafonné à 180 jours, ramenés à 75 jours lorsque le contrat de travail a été rompu pour motif économique.
Ce plafond est donc atteint lorsque le montant des indemnités supra-légales est supérieur ou égal à 16 200 € hors rupture pour motif économique (16 200 / 90 = 180 jours) et 6 750 € en cas de rupture pour motif économique (6 750 / 90 = 75 jours).
Précisons que le différé « congés payés » et le différé spécifique sont applicables à toute prise en charge par Pôle Emploi et qu’ils se cumulent.
Le délai d’attente
L'article 22 du RG prévoit un report de la prise en charge au terme d'un délai d'attente de 7 jours, applicable à tous les demandeurs d’emploi.
Le délai d’attente est applicable à tous les cas de pris en charge : ouverture de droits, reprise du paiement de l’allocation et rechargement des droits.
Il s’agit d’un délai dit « préfix », qui ne peut faire l’objet ni d’une interruption ni d’une suspension.
Le point de départ du délai d’attente est fixé (RG, art. 23) :
- soit au lendemain du différé d'indemnisation congés payés et du différé d'indemnisation spécifique applicables, si l'intéressé est inscrit comme demandeur d'emploi à cette date et si les autres conditions d'attribution des allocations sont remplies ;
- soit au jour de l'inscription comme demandeur d'emploi, si celle-ci a lieu à l'issue du différé d'indemnisation congés payés et du différé d'indemnisation spécifique, ou à partir du jour où toutes les conditions d'attribution des allocations sont satisfaites.
NB. Le délai d’attente ne joue pas si Pôle Emploi l’a déjà appliqué dans les 12 mois précédents (RG, art. 22 al. 2). Le point de départ de ce délai de 12 mois est la date à laquelle le délai d’attente a effectivement commencé à courir dans le cadre d’une précédente prise en charge.