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La « déconnect attitude », une question de société
Le rapport récent du CAS (Centre d’Analyse Stratégique) sur les conséquences des TIC (technologies de l’information et de la communication) sur les conditions de travail) peut nous amener collectivement et individuellement à nous interroger très sérieusement sur l’usage des TIC dans notre vie quotidienne, et pas seulement entre les murs du travail.
La diffusion massive de l’internet mobile conduit à des changements comportementaux tout à fait considérables que nous pouvons tous constater pour nous-mêmes et pour les autres.
Je me garderais d’une vision manichéenne sur le sujet car bien entendu, l’internet mobile apporte quantité de services aussi indispensables qu’inutiles, selon les cas, et les individus.
Le fait est que le smartphone a un pouvoir magnétique inédit qui bouleverse notre façon de travailler et de communiquer. Il bouscule aussi l’équilibre des sphères de vie et peut conduire à des tensions dans les foyers.
Depuis une quinzaine d’années, les nouvelles technologies se reproduisent à une vitesse importante et nous les adoptons bien souvent sans savoir quel usage nous en ferons. C’est l'un des constats réalisés dans le rapport du CAS : « la réalité de l’offre est supérieure à la promesse de vente ».
On achète un smartphone pour le « phone » et on se retrouve à l’utiliser pour plein d’autres choses, pour finalement se demander si l'on a été bien « smart » de l’acheter. Mais on ne peut plus s’en passer non plus.
Donc que faire, face à « l’addictphone » ?
Nous avons lancé sur notre site laqvt.fr (site d’actualité sur la qualité de vie au travail) une initiative intitulée « la déconnect attitude ».
Il ne s’agit pas de proposer de revenir en arrière de 30 ans. Nous prônons à la fois la nuance, la prudence, l’équilibre et la prévention.
La « déconnect attitude » a clairement une dimension de qualité de vie au travail. Il s’agit de mettre en évidence la responsabilité qui appelle à la fois :
- au droit à la déconnexion porté par Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit à la Sorbonne, qui renvoie à la responsabilité collective ;
- au devoir de déconnexion que je développe plus en détail dans un article sur laqvt.fr, qui renvoie à la responsabilité individuelle ; le devoir ne signifie pas une obligation d’éteindre son smartphone dès la sortie des murs de son travail, mais plutôt une régulation que chacun peut réaliser à sa façon pour ne pas se laisser déborder par son usage.
La « déconnect attitude » doit se concevoir dans l’articulation entre ces deux niveaux de responsabilité. La responsabilité collective concerne l’organisation, mais pas seulement ; quantité d’autres parties prenantes ont leur mot à dire : les pouvoirs publics, les partenaires sociaux, les associations, les assureurs de prévoyance…
La « déconnect attitude » comporte aussi un volet plus sociétal, en particulier en direction des jeunes générations qui ne sont pas encore sur le marché du travail. Dimension que je ne développerai pas ici.
Cette question de la déconnexion ne doit pas être réduite à une question d’usage des TIC : nous évoquons bel et bien le débordement du travail sur la sphère privée et les TIC contribuent à l’accélération de ce phénomène qui trouve d’autres origines comme l’accélération du temps, la financiarisation des organisations et la recherche de l’excellence sous toutes ses formes.
C’est évidemment toutes ces causes qu’il faut aussi interroger dans les réflexions autour de la mise en œuvre réelle d’un droit à la déconnexion et d’une appropriation de chacun à son devoir de déconnexion.
Il est grand temps de concrétiser l’idée de déconnexion. Participez tous pour vous-même, pour vos proches, pour votre équipe et pour tous.