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Un job ou un stage à Canal+ : ça peut aussi se gagner...
« Gagner un stage ou un job… », une innovation de Canal+ en matière de recrutement. Le grand match de l'innovation.
Gagner des stages ou des jobs à Canal +, c'est ce que propose un défi organisé avec l'école Telecom de Lille 1.
Faire « phosphorer » de jeunes têtes bien faites sur la télé de demain, récolter quelques bonnes idées sans bourse déliée, mieux repérer de futurs « potentiels » qui vont se la donner sans compter, et tout cela en restant dans son fauteuil, bien calé, à déguster la dernière et superbe série de Fabrice de La Patellière... Pourquoi se priver ?
Pour ces jeunes étudiants, l'espoir peut-être hypothétique, de décrocher un jour un stage, au pire une paire de lunette 3D, un iPad, un Xbox et, cerise sur le gâteau, la possibilité de visiter les plateaux d'enregistrement des émissions...
Des défis avec de grandes écoles, les entreprises en organisent régulièrement : Canal+ n’innove pas en la matière.
En revanche, mettre en appétence en proposant comme lot un stage ou un emploi n’est pas sans poser quelques questions d’éthique… Généralement, les gagnants de ces défis se voient offrir des cadeaux, des voyages, au mieux rencontrent les dirigeants de l'entreprise.
Déjà de nombreux stagiaires…
Des dizaines et des dizaines de stagiaires travaillent pour Canal+. Quoi de plus normal ? Mais quand leur nombre atteint des sommets, quand ces stagiaires remplacent des CDI, occupent des fonctions opérationnelles essentielles, dirigent parfois des projets, la dérive est consommée. Pour quelques centaines d’euros par mois, de jeunes stagiaires cravachent espérant décrocher le sésame : un CDI ! Le rêve mais…
Une procédure de recrutement longue et sinueuse...
Même en travaillant comme des forcenés, les stagiaires ont peu de chance de décrocher le CDI tant attendu. En premier lieu, Canal+ recrute très peu, pas assez… Il existe encore du « gras » parait-il… ?
Ensuite, les conditions économiques, la prudence, imposeraient de faire des économies, y compris sur la masse salariale.
Enfin, stagiaire ou pas, le futur éventuel et potentiel recruté devra subir entre 7 et 10 entretiens, dont le dernier sera systématiquement effectué avec le PDG B. Meheut.
Car c'est bien connu, les DRH de pôles, les patrons d'entreprises, les responsables de services peuvent tous se tromper. Le recrutement n’est pas une science exacte. On le constate régulièrement, les erreurs de casting sont légion...
Évidemment, la raison est à chercher ailleurs...
- Sept à deix entretiens, cela prend a minima 6 mois. Toujours cela de gagné en masse salariale. Et comme jusqu’au bout de la procédure, le futur éventuel recruté a 50 % de chances de se faire retoquer par le PDG, on repart pour 6 ou 7 mois : encore un an de masse salariale économisée.
Pendant ce temps, ça tourne. C’est bien la preuve que les services peuvent fonctionner sans ressource supplémentaire, voire en réduction.
Pourtant, celles et ceux qui sont en CDI, en CDD, ou déja stagiaires en poste savent combien la charge est importante. Des journées de travail très longues, des cadres qui occupent 2 fonctions, des mobilités ou des détachements en nombre…
Oui, les ressources manquent, de nombreuses entreprises sont en tension, il faut créer de l'emploi en interne, recruter, intégrer des prestataires et des stagiaires. Mais par éthique et par respect, ne mettons pas en jeu l’emploi.
- Le défi en grande école, c'est d'abord un travail d'équipe, une réalisation collective. Offrir en lot un stage ou un emploi dénature le projet, le détourne de sa fonction première.
Le recrutement de stagiaires ou d'un salarié doit suivre des règles établies pour tous. Y déroger, c'est ouvrir la porte à toutes les dérives, des plus nobles aux plus malsaines. Il ne saurait y avoir d'instrumentalisation de l'emploi, et notamment de l'emploi des jeunes, tellement problèmatique aujourd'hui dans notre pays. C'est une fausse bonne idée.
Bonne chance à tous ces jeunes étudiants.