Travail à la tâche salarié : un glissement facilité vers le travail non salarié
Face à la dérive du contournement du salariat chez les journalistes, une intersyndicale a lancé une campagne « stop-auto-entrepreneuriat » l'an dernier. Des employeurs du secteur se montrent en effet d’autant plus enclins à privilégier l’auto-entrepeneuriat qu’ils ne respectent déjà pas les droits des journalistes pigistes, ces salariés muti-employeurs rémunérés à la tâche dont une loi de 1974 reconnaît la présomption du contrat de travail en CDI.
« Si le Code du travail n’évoque pas la rémunération à la pige, celle-ci est prévue par la convention collective des journalistes sans être suffisamment encadrée. Des employeurs ont tout fait pour combattre ou contourner leurs obligations. Cela va des droits aux congés de maternité rémunérés aux primes d’ancienneté en passant par les indemnités de départ à la retraite. En cas de rupture de la collaboration de leur fait, des employeurs ont tendance à considérer les journalistes pigistes comme des indépendants dont la prestation peut être rompue du jour au lendemain », explique Martine Rossard animatrice du pôle pigistes du SNJ mobilisé contre les violations des droits légaux et conventionnels dans les médias, qui constate que les journalistes pigistes, souvent ignorants de leurs droits et dissuadés par les délais judiciaires, sont trop peu nombreux à saisir les prud’hommes.
Retrouvez son interview complète > Salariés à la tâche : « les droits des journalistes pigistes ne sont pas respectés »
Sur 35 000 journalistes titulaires de la carte professionnelle en 2016, près de 7 000 étaient à la pige ou en CDD… Le cadre dérogatoire du travail salarié « à la pige », sans temps de travail ni salaire définis, ne suffit pas à certains employeurs qui franchissent un cap supplémentaire avec l’auto-entrepreneuriat.
Le 28 février 2017, la Cour de cassation a confirmé la condamnation du groupe Le Figaro pour le travail dissimulé de 15 anciens journalistes traités comme « stagiaires » ou comme « contributeurs » payés en droits d’auteur et non en salaires pour leur travail rédactionnel sur le site d’actualité culturelle Evene.
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