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16 / 10 / 2014 | 2 vues
Denis Garnier / Membre
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Risques professionnels : les cliniques marchandes plus protectrices que les hôpitaux publics ?

À travers deux exemples concrets (la dérogation possible de travailler en amplitudes de 12 heures et le travail de nuit), cet article vous propose de comparer la prévention des risques professionnels à travers la réglementation applicable d’une part au personnel des cliniques commerciales et d’autre part au personnel des hôpitaux publics.

Le secteur privé aurait-il compris qu’un salarié en bonne santé est plus performant qu’un salarié malade ? En tout cas, pour l’instant, l’hôpital public ne se pose pas la question

La dérogation des 12 heures

  • L’hôpital public décide sans partage.
À l’hôpital, c’est le décret 2002-9 du 4 janvier 2002 qui fixe les règles portant sur le temps de travail. Sur l’organisation du travail et des négociations qui devraient s’imposer, quasiment aucune mesure ne contraint les établissements hospitaliers à rechercher le dialogue, au contraire. La loi précise, « qu'à défaut d'un accord sur l'organisation du travail avec les organisations syndicales représentant le personnel de l'établissement, le directeur décide de l'organisation du travail et des temps de repos » [1].

C’est clair et net. C’est la dernière réforme hospitalière dite « loi HPST » que le gouvernement actuel confirme et renforce et qui donne presque tous les pouvoirs au directeur qui n’est ainsi pas contraint de dialoguer.

  • Qu’en est-il dans les cliniques commerciales ?


C’est le Code du travail et les conventions collectives qui s’appliquent : FHP-Synerpa.

Lisons.

Conformément à l’article L3122-34 du Code du travail, la durée quotidienne de nuit ne peut excéder 8 heures. Toutefois, par accord d’entreprise, la durée quotidienne pourra être portée à un maximum de 12 heures. À défaut d’accord d’entreprise, après information et consultation du comité d’entreprise, ou à défaut après consultation des catégories de salariés concernés et ce, par vote anonyme ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés, la durée quotidienne pourra être portée au maximum à 12 heures.

  • La convention collective impose un accord ou un vote du personnel.
    • Dans la fonction publique, à défaut d’accord, c’est le directeur qui impose.


Le Code du travail précise qu’il peut également être dérogé aux 8 heures de nuit en cas de circonstances exceptionnelles, sur autorisation de l'inspecteur du travail donnée après consultation des délégués syndicaux et après avis du comité d'entreprise ou des délégués du personnel en cas :

  • de faits résultant des circonstances étrangères à l'employeur, anormales et imprévisibles ;
  • d'événements exceptionnels dont les conséquences n'auraient pu être évitées.


Cette demande de dérogation à la durée maximale quotidienne de travail, accompagnée des justifications utiles, du procès-verbal de consultation des délégués syndicaux, s'il en existe, est adressée par l'employeur à l'inspecteur du travail.

La dérogation ne peut être accordée par l'inspecteur du travail que si des périodes de repos d'une durée au moins équivalente au nombre d'heures accomplies au-delà de la durée maximale quotidienne sont attribuées aux salariés intéressés. Ce repos est pris dans les plus brefs délais à l'issue de la période travaillée.

  • Dans la fonction publique, il n’y a pas d’inspecteur du travail pour contrôler les motifs et les 12 heures sont imposées sous le seul contrôle du juge lorsqu’il est saisi. Lorsque le juge annule l’organisation en 12 heures, le directeur n’applique pas le jugement, le ministère ne dit rien. Dans le privé c’est la condamnation de l’employeur.

Le travail de nuit

  • Qu’en est-il dans les cliniques commerciales ?

Lorsqu’il y a dérogation à la durée normale de nuit (qui est de 8 heures), l’employeur est obligé de négocier des contreparties. Par exemple de définir des temps de pause avec mise à disposition d’une salle de veille équipée de relaxation ergonomique.

  • Les travailleurs de nuit qui souhaitent occuper ou reprendre un poste de jour et les salariés occupant un poste de jour qui souhaitent occuper ou reprendre un poste de nuit dans le même établissement ont priorité pour l’attribution d’un emploi ressortissant de leur catégorie professionnelle ou d’un emploi équivalent. L’employeur porte à la connaissance de ces salariés, par voie d’affichage, la liste des emplois disponibles correspondants.
  • Lorsque le travail de nuit est incompatible avec des obligations familiales impérieuses, notamment la garde d’un enfant ou la prise en charge d’une personne dépendante, le salarié peut demander son affectation sur un poste de jour.
  • En outre, lorsque le travail de nuit est incompatible avec des obligations familiales impérieuses, notamment la garde d’un enfant ou la prise en charge d’une personne dépendante, le salarié peut refuser d’accepter ce changement sans que ce refus constitue une faute ou un motif de licenciement.
  • Tout travailleur de nuit bénéficie, avant son affectation sur un poste de nuit et à intervalles réguliers d’une durée ne pouvant excéder 6 mois par la suite, à une surveillance médicale particulière.
  • Les établissements étudieront en liaison avec le CHSCT ou à défaut les délégués du personnel, les horaires les plus adaptés pour tenir compte des moyens de transport du personnel de nuit. De même, dans la détermination des horaires individuels et dans le cadre des demandes de transformation de l’horaire, l’employeur donnera priorité à un des salariés de nuit ayant des contraintes familiales ou sociales.


Rien de tout ceci pour le personnel de la fonction publique hospitalière...

  • À l’hôpital public

Là encore, dans la fonction publique hospitalière, peu de dispositions particulières, si ce n’est que la durée annuelle est 1 470 heures et la durée quotidienne de 10 heures maximum avec dérogation possible à 12 heures.

Dans la convention collective ont peut encore y lire que « pour lutter contre les mauvaises postures nuisibles à la santé des salariés et à la bonne marche du service, les établissements, en concertation avec les salariés concernés et les représentants du personnel, s’attacheront à mettre en place des équipements adaptés et des formations régulières permettant au personnel, par une meilleure connaissance, d’agir pour améliorer ses propres conditions de travail ».

Conclusion


À la lecture des différentes dispositions ci-dessus, nous pouvons conclure que le dialogue social, la prévention des risques professionnels et la prise en considération de la bonne santé des travailleurs sont ignorés dans la fonction publique hospitalière.

De plus, si l’on observe le Code du travail qui dégage l’employeur hospitalier de toute contraintes et condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre pour manquement aux règles de prévention des risques, on peut véritablement en conclure que la fonction publique néglige ses agents en toute impunité, ce qui n’est pas acceptable.

C’est pourquoi FO souhaite que les manquements aux obligations de sécurité et de prévention des risques puissent être verbalisés et sanctionnés dans les mêmes conditions que pour les employeurs du secteur privé.

[1] Article L6143-7 - 14° du code de la santé publique.

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Intervenant en prévention, nous avons constaté cet état de fait lorsque nous proposons nos services dans la fonction public ou territoriales. Le mots de refus sont toujours les mêmes pour mettre en place une véritable culture de la prévention dans l'organisation du travaill d'un hôpital ou d'une collectivité. Pourquoi ? Parce que l'Etat n'est pas sujet à respecter le code du travail, alors que pour le secteur privé pour un non respect de celui_ci, la sanstion peut_être lourde... Cherchez l'erreur !!!