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27 / 05 / 2025 | 12 vues
Fabien Brisard / Abonné
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La Sécurité sociale : les leçons de Jacques Dutronc

Pour Michel Monier, Ancien Directeur général adjoint de l’UNEDIC et membre du Think Tank CRAPS ( Le Cercle de Recherche et d’Analyse sur la Protection Sociale) ..."La Sécu n’a jamais su « planquer ses sous », elle les distribue à un public toujours plus nombreux quitte à donner moins à chacun et sous condition de ressources "...

 

La Sécurité sociale fête ses 80 ans, Dutronc ses 82 ans. L’une et l’autre en ont connu des succès et péripéties ! La première s’est appliquée à faire toujours plus, à « toujours retourner sa veste du bon côté… », celui de l’universalité. Elle s’est faite prodigue jusqu’à ce que la veste de la protection sociale, « tellement retournée, craque de tous les côtés ». Le second a creusé son sillon, fidèle à lui-même, quitte à surjouer le rôle du dandy nonchalant provocateur sans jamais, finalement, « retourner sa veste ». Jacques a dit, dès 1980, « j’ai déjà donné », la Sécu aurait dû le dire dès 1981, quand l’OCDE alertait sur la crise de l’État-providence !

 

L’anniversaire de la Sécu se fête, jusqu’ici, à bas bruit… forcément, il s’agit, une fois encore, de la réformer pour satisfaire l’ardente obligation d’économiser. Dutronc sera fêté par une Symphonique Célébration… Il est ce qu’il a été, la Sécu de 2025 n’est plus ce qu’elle était dans ses jeunes années, elle ne l’est plus, mais s’entête à rester accrochée au mirage de son financement « sur le travail » et à affirmer encore son ambition d’universalité. La Sécu n’a jamais su « planquer ses sous », elle les distribue à un public toujours plus nombreux quitte à donner moins à chacun et sous condition de ressources : voilà le paradoxe de l’universalité ! Ce sont ses financeurs qui, aujourd’hui, disent « on a déjà donné ».

 

Parce qu’il faut la réformer, parce qu’elle n’est pas un cadeau telle « la fille du père Noël, tombée là par hasard » il ne suffit plus de se satisfaire de reparamétrer, une fois encore, tel ou tel de ses dispositifs. La Sécu, ce « petit jardin qui sentait bon » non pas le métropolitain, mais l’heureux compromis du CNR, doit aujourd’hui être mise dans les mains de nouveaux promoteurs qui reconstruiront le tout, selon les règles communautaro-sociales d’aujourd’hui, en différenciant les volets « sociaux » et « assurantiels ». La mixité sociale, la survie de l’universalité de la protection sociale, est à ce prix : celui de la distinction entre solidarité et assurance sociale.


La première financée par l’impôt ou la taxe, la seconde par les cotisations, des employeurs et des salariés, sur le travail. Refuser de reconstruire la protection sociale sur des fondations différenciant « solidarité » et « assurance » c’est accepter de ne pas comprendre, toujours avec Jacques Dutronc que, parce qu’il l’aide à s’endormir, « Derrick n’a pas été remboursé par la Sécu ». Ne pas différencier solidarité et assurances socialesc’est accepter aussi que la Sécu continue de satisfaire tous les « et moi, et moi, et moi », mais c’est, surtout, ne pas voir que la société aujourd’hui n’est pas celle de 1945 ni que le mode de production fait de moins en moins de place au travail, même si l’emploi salarié augmente.

 

Les totems de 1945 n’ont plus de socle, il faut finir de les « détricoter » (là, la leçon n’est pas de Jacques Dutronc, mais de Denis Kessler).


La famille-CNAF, la santé-CNAM sont-elles aujourd’hui encore des assurances sociales qui doivent être financées à plus de 60 % par des cotisations sociales ou sont-elles de la solidarité générationnelle à financer par tous, pour chacun, par la fiscalité ?
 

La valeur ajoutée créée par « le robot » substitué au travail doit-elle échapper au financement des assurances sociales ?
Les actifs ont raison de s’approprier le « Qui se soucie de nous ? », du Dutronc de 1987.
Le qui se soucie d’eux se reformule : le travail doit-il financer la solidarité ?
À ne pas répondre à la question, le filet de protection des assurances sociales finira hamac de la solidarité : on s’y reposera, mais de façon précaire.

 

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