Droits d’alerte : les super pouvoirs du L.2312-59
Depuis la disparition du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), les droits d’alerte de l’élu au CSE permettent à un élu d’agir pour protéger les salariés. En premier lieu, le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ou libertés individuelles.
Le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), pilier essentiel dans la défense des droits des salariés, jouait un rôle crucial dans la prévention des risques professionnels et l’amélioration des conditions de travail au sein des entreprises. Il offrait aux élus des salariés des droits importants, notamment en matière de santé, d’hygiène et de sécurité. Le CHSCT avait la capacité de recourir sans contrainte à des expertises et disposait d’un droit de veto dans certaines circonstances.
Permettre aux élus d’agir en CSE
Cependant, depuis le 1er janvier 2020, une partie de ses prérogatives a été transférée au Comité social et économique (CSE). La CSSCT (Commission santé, sécurité et conditions de travail) du CSE a pris le relais, mais avec des contraintes accrues en termes d’action. En effet, il n’est pas toujours aisé d’obtenir l’aval de la majorité du CSE, surtout lorsque des organisations syndicales ne détiennent pas la majorité.
Dans ces situations, les élus se retrouvent bien seuls, même lorsque la santé, la sécurité et les conditions de travail des salariés sont en jeu. Heureusement, des outils subsistent pour permettre à un élu d’agir, qu’il ait ou non l’assentiment du CSE.
Parmi ces outils figurent les droits d’alerte de l’élu au CSE.
Ils demeurent essentiels pour garantir la protection des salariés et la vigilance face aux enjeux liés à leur bien-être au travail. Citons le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement (L. 4133-1 à 4), le droit d’alerte en cas de danger grave et imminent (L. 2312-60) et le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ou libertés individuelles (L. 2312-59), que nous allons détailler.
Atteinte aux droits des personnes ou libertés individuelles
Elément clé pour la protection des droits des travailleurs dans l’entreprise, ce droit permet à un élu au Comité Social et Economique de signaler toute atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise.
Ces atteintes peuvent notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral, ou de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.
L’employeur est tenu de procéder sans délai à une enquête avec l’élu du comité et de prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.
En cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, le salarié, ou l’élu au CSE, peut saisir le bureau de juge ment du Conseil de prud’hommes. L’intérêt de cet article réside dans sa capacité à protéger les travailleurs contre les atteintes à leurs droits et à leur santé. Il offre un mécanisme de signalement et de résolution des problèmes, contribuant ainsi à la création d’un environnement de travail sûr et respectueux.
De plus, il renforce le rôle du comité social et économique en tant que gardien des droits des travailleurs.
L’article L. 2312-59 du Code du travail n’est pas incompatible avec le droit d’alerte du CSE, ils sont complémentaires et servent tous deux à protéger les droits des travailleurs.
Comment le mettre en œuvre ?
Si l’employeur refuse d’appliquer les dispositions de l’article L. 2312-59 du Code du travail, le salarié ou l’élu au CSE peut prendre des mesures légales.
Voici les étapes à suivre :
1. Saisir l’employeur : l’élu au CSE doit d’abord saisir l’employeur de la situation.
2. Enquête de l’employeur : l’employeur est tenu de procéder sans délai à une enquête avec l’élu du comité et de prendre les dispositions nécessaires pour remédier à la situation.
3. Saisir le Conseil de prud’hommes : en cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, et à défaut de solution trouvée avec l’employeur, le salarié ou l’élu au CSE, si le salarié intéressé averti par écrit ne s’y oppose pas, peut saisir le bureau de jugement du Conseil de prud’hommes.
4. Décision du juge : le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d’une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor
Les différents droits d’alerte
- Droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement : L. 4133-1 à 4 Ce recours est utilisable si, de bonne foi, l’élu (ou un travailleur) estime que les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre font peser un risque grave sur la santé publique ou l’environnement. Il doit faire l’objet d’une traçabilité au moyen d’un registre. Même s’il faut l’avoir à l’esprit, il est moins prégnant dans le secteur de l’Assurance. Ce qui n’est pas le cas pour les deux droits qui suivent.
- Droit d’alerte en cas de danger grave et imminent : L. 2312-60 Ce droit d’alerte est un outil à la disposition de chaque élu au CSE. Il peut être enclenché si un élu (ou un travailleur) a un motif raisonnable de penser qu’une situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que toute défectuosité dans les systèmes de protection.
- Le danger grave = susceptible d’entraîner des blessures ou des suites sérieuses de type agression, accident, maladie, incapacité
- Le danger imminent = susceptible de survenir dans un délai très rapproché. Sans entrer dans le détail (un développement ultérieur sera nécessaire), indiquons néanmoins l’existence également d’une obligation de traçabilité ; un registre spécial doit exister dans la forme requise et être accessible aux élus (D. 4132-1).
- Droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes ou libertés individuelles : L’article L. 2312-59 du Code du travail est un élément clé pour la protection des droits des travailleurs dans l’entreprise. Il permet à un élu au CSE de signaler toute atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise. Cela comprend les faits de harcèlement sexuel ou moral, ou toute mesure discriminatoire.