ESS France - constatant la nécessité de politiques publiques et privées facilitatrices en santé et dans le domaine socio-sanitaire, concernant d’abord les personnes les plus défavorisées et les plus précaires - a confié une mission au CIRIEC-France pour conduire une étude sur la place des acteurs de l'Économie Sociale et Solidaire dans le système de santé, sur leurs perspectives de contribution durable aux politiques publiques nationales et locales dans le domaine et sur les initiatives nécessaires pour y parvenir.

Le rapport que nous venons de publier (1) est le résultat d’une enquête, menée en concertation auprès de ces acteurs, concernant le diagnostic qu’ils font entre leurs activités, les besoins actuels, les limites et freins ainsi que les projections et leviers possibles.

Il s’inspire de différents travaux publiés (rapports, études, ouvrages, articles) autour des projets de santé dans leur globalité (prévention, soin, promotion) et s’attache à faire transparaître les grands points de tension du secteur sous la forme d’un état des lieux (première partie).

Puis à partir de ces constats, en lien avec les données issues des auditions, la seconde partie projette des recommandations dans la perspective d’un système de santé qui prendrait mieux en compte l’expertise et les potentialités de l’ESS. Ces propositions sont établies à partir des principaux constats relevés lors des auditions et des analyses effectuées.

Il en ressort essentiellement que la nature et l’importance de l’action des acteurs de l’ESS dans le système de santé sont largement méconnues, et dans certains cas, déniées voire combattues.

Dans le même temps, s’expriment des aspirations à une réforme du système de santé pour un accès aux soins plus accessible et plus solidaire.

La recommandation générale et prioritaire qui est faite par la mission est d’ouvrir un chantier « santé » au sein d’ESS France : il s’agirait d’œuvrer au renforcement du poids et de l’audience de l’ESS au sein de la société, de construire les voies et moyens pour y parvenir, et de faire entendre les propositions des acteurs de l’ESS pour améliorer l’efficience du système de santé, pour plus de solidarité et pour réduire les inégalités.

Afin d’y parvenir, il est nécessaire que les acteurs publics de la santé et ceux de l’ESS construisent et partagent des éléments d’appropriation culturelle communs (même langage par exemple)

L’objectif est de permettre ainsi de construire une relation forte, éclairée, partenariale et non concurrentielle avec les acteurs publics nationaux et locaux.

La mission propose à ESS France les axes de travail suivants:

1 – Satisfaire le besoin criant de travailler ensemble sur le thème de la santé au sein de l’ESS

2 – Améliorer la visibilité des acteurs de l’ESS dans le champ de la santé

3 – Prendre des initiatives en direction des pouvoirs publics et des citoyens

4 – Proposer aux pouvoirs publics notamment locaux des solutions de collaboration opérationnelles gagnant-gagnant

5 – Agir pour l’innovation

6 – Sensibiliser les acteurs de l’ESS notamment ceux intervenant sur les marchés concurrentiels

L'analyse et les recommandations du présent rapport combinent trois types de « conseils » :

• En matière de santé – et tout particulièrement de prévention pour une meilleure santé de la population - les acteurs de l’ESS manquent d’une vision commune et rassembleuse. Les auditions menées par la mission du CIRIEC et les rapports consultés l’ont montré.

ESS France est légitime à ouvrir un chantier interne « prévention et santé » pour déterminer une vision commune fondée sur les valeurs d’intérêt général de l’ESS, pour définir une stratégie de coordination des acteurs de l’ESS et pour identifier des thématiques et services, sur lesquels l’ESS pourra ensuite s’engager.

• Les plans nationaux, en matière de santé et de prévention, se succèdent sans relâche depuis une trentaine d’années. Les politiques publiques se réorganisent (gouvernance, financement, modèle économique, coordination des acteurs, régulation …). La prise en considération des citoyens est une nécessité demandant un partage des connaissances et des décisions par une démarche d’acculturation réciproque.

ESS France est légitime à peser auprès des pouvoirs publics pour promouvoir les gouvernances démocratiques et les modèles non lucratifs mais aussi pour promouvoir des propositions et des projets concrets. Si l’ESS se donne plus de visibilité, s’organise et se coordonne en conséquence, son poids, sa capacité à agir, sa capacité à travailler avec de multiples acteurs en feront un allié naturel pour les pouvoirs publics.

• Un mouvement de réappropriation culturel est en cours : les acteurs auditionnés et d’autres (Labo de l’ESS, Institut Montparnasse, Le Mouvement associatif par exemple) se réapproprient les valeurs de l’Éducation populaire (qui a donné naissance, au fil du XXème siècle, au mouvement ESS). Toucher directement la population par l’éducation et des services, c’est à la racine du mouvement ESS.

ESS France est légitime à capitaliser sur ce mouvement de réappropriation de l’Éducation populaire et à l’amplifier. Pour cela, les acteurs ESS de la prévention et de la santé doivent être clairement identifiés (il n’y a pas de honte à « marketer ») pour devenir des partenaires visibles, fiables et incontournables pour la population et les pouvoirs publics. Cette dynamique peut revivifier l’élan démocratique et s’exprimer au niveau territorial, au niveau national et au niveau européen. La diffusion du projet « Maisons des 1000 premiers jours » en est une bonne illustration et pourrait, par exemple, devenir avec d’autres, un projet pilote d’ESS France.

En bref, le monde de l’ESS en France et ESS France ont vocation à être un « laboratoire » de revitalisation démocratique et participative, pour œuvrer pleinement dans le domaine de la santé.

(1) Pour plus de détails sur cette étude:

https://www.ciriec.uliege.be/notre-reseau/sections-nationales/france/publications/avec-leconomie-sociale-et-solidaire-agir-ensemble-pour-la-bonne-sante-de-toutes-et-tous-2024/