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Open data : une mission sénatoriale sans complaisance qui considère qu'il reste beaucoup à faire
La mission d'information du Sénat sur l'accès aux doculents administratifs confiée à Jacques Hyest et Corinne Bouchoux a rendu ses conclusions mi-juin. Elles sont sans complaisance, considérant que si des avancées ont été réalisées, il reste bien du chemin à parcourir. Il en ressort plus d'une vingtaine de propositions ou recommandations à l'attention de la CADA (commission d'accès aux documents administratifs) mise en place en 1978 !
Liste des principales recommandations pour améliorer l’effectivité du droit d’accès à l’information publique
Accélérer la communication des documents administratifs
Recommandation n° 1
Créer un « référé communication » devant le juge administratif saisi par la CADA dès réception de la demande d’avis lorsque la question de la communicabilité du document auquel l’accès est demandé a déjà été tranchée par elle-même ou par la jurisprudence, ou si le document figure sur une liste fixée par arrêté après avis de la CADA.
Accélérer le traitement des demandes d’avis par la CADA en donnant délégation au président et au rapporteur général, sous réserve d’en rendre compte à la prochaine réunion de la commission, lorsque la question a déjà été tranchée.
Améliorer le suivi du traitement des demandes d’accès aux documents administratifs.
Recommandation n° 2
Pour chaque administration ou organisme auprès duquel peut s’exercer le droit d’accès aux documents administratifs, introduire l’obligation de tenir un fichier anonyme des demandes de communication, indiquant les dates de réception et de réponse ou d’envoi, le type de documents demandés, le cas échéant le motif du refus, le sens de l’avis de la CADA…) et d’établir un bilan annuel de l’accès aux documents administratifs.
Prévoir la transmission de ces bilans à la CADA qui pourra publier la liste des « mauvais élèves », après avoir recueilli leurs observations.
Guider l’administré
Recommandation n° 3
Prévoir que la demande de communication puisse porter sur des informations, sans que le demandeur en ait à identifier le support, dès lors que l’accès à celles-ci présente un caractère d’urgence vitale, notamment en matière de santé.
Recommandation n° 4
Prévoir la publication systématique des répertoires d’informations publiques sur les sites internet des administrations et organismes soumis à l’obligation de communication.
Recommandation n° 5
Mettre en place sur la page d’accueil de chaque portail administratif un point d’entrée électronique normalisé pour les demandes de communication, assorti d’un dispositif d’envoi d’avis de réception automatique valant preuve de la saisine.
Présenter sur les sites des administrations les principes et modalités d’exercice du droit d’accès aux documents administratifs ou installer un lien renvoyant aux pages de présentation du droit d’accès sur le site de la CADA.
Construire un droit d’accès numérique à l’information publique
Garantir la qualité et l’étendue de la diffusion en ligne
Recommandation n° 6
Mettre en ligne systématiquement et sans délai les documents d’intérêt général les plus fréquemment demandés, dont la liste serait fixée par décret.
Recommandation n° 7
Privilégier, dans toutes les procédures de consultation ou d’information préalable, la mise en ligne sans délai des documents communiqués. À cette fin, prévoir, sur le site internet de chaque administration concernée, une page consacrée aux consultations et aux débats publics, conçue selon un modèle normalisé, commun à toutes les administrations.
Recommandation n° 8
Reconnaître aux citoyens un droit d’obtenir de l’administration la mise en ligne de tout document librement communicable et fréquemment demandé.
Ce droit serait mis en oeuvre dans les mêmes limites et avec les mêmes garanties que le droit de communication.
En particulier :
- le citoyen pourrait saisir la CADA, afin qu’elle rende un avis, préalablement à tout contentieux, sur la légitimité de la demande de mise en ligne ;
- l’administration devrait justifier de son opposition à la diffusion.
Seraient pris en compte, pour décider de la mise en ligne, à la fois l’intérêt de la demande, évaluée à partir du nombre de demandes identiques présentées auparavant, et les coûts de cette diffusion pour l’administration.
Recommandation n° 9
Afficher clairement et de manière uniforme le caractère officiel des sites publics.
Recommandation n° 10
Veiller à l’intelligibilité pour le plus grand nombre des informations publiques mises en ligne en recourant, lorsque c’est possible, à des procédés de visualisation (cartes, graphiques…) et en les commentant.
Promouvoir une démarche raisonnée d’ouverture des données : pilotage et priorisation, anticipation et normalisation, contrôle.
Recommandation n° 11
Recenser l’ensemble des bases de données détenues par l’administration, en précisant, pour chacune, sa nature, sa qualité et ses caractéristiques techniques afin d’évaluer l’opportunité et le coût de son ouverture ainsi que, pour celles déjà mises en ligne, celui de leur amélioration ou de leur mise à jour.
À partir de ce recensement, établir une cartographie systématique des bases de données publiques.
Recommandation n° 12
Classer l’ouverture des données publiques par priorité : identifier les jeux de données à rendre prioritairement disponibles ou, s’ils sont déjà en ligne, à enrichir, en fonction des coûts et des attentes exprimées par la société civile ou les administrations.
Permettre aux administrations, pour le surplus, de mettre en ligne d’autres jeux de données ne présentant pas de difficulté particulière dans la mesure où cela ne retarde pas les mises en ligne prioritaires et à la condition qu’elles signalent le niveau de qualité de ces informations.
Recommandation n° 13
Inscrire les objectifs et le calendrier d’ouverture des bases dedonnées publiques dans les contrats d’objectifs des administrations.
Prévoir l’obligation, pour chaque administration, de rendre compte régulièrement et précisément de l’avancée des opérations.
Confier au secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP), le suivi, à partir des comptes rendus établis par les administrations, de l’ouverture de leurs données.
Préparer l’ouverture des données
Recommandation n° 14
Anticiper l’ouverture éventuelle des données dès le stade de leur production ou de leur recueil. À cet effet :
- prévenir, lors des appels d’offre, les clauses susceptibles de grever les données de droits contrecarrant cette ouverture ;
- organiser le recueil des données et structurer la base sur laquelle elles sont enregistrées dans la perspective de l’ouverture, afin de faciliter, en particulier, les extractions, les occultations ou les anonymisations ;
- systématiser l’utilisation de formats d’enregistrement et de traitement des données ouverts et réutilisables ;
- prévoir l’automatisation de la production des jeux de données diffusés en open data.
Recommandation n° 15
Établir un référentiel général de réutilisabilité des données, portant à la fois sur leur format, leur structuration, leur granularité, leur contextualisation, ainsi que sur la documentation des algorithmes permettant de procéder à des extractions et des agrégations.
Définir en particulier des modèles de réutilisation standardisés respectant les normes d’interopérabilité et de lisibilité par une machine.
Recommandation ° 16
Imposer le recours à des outils juridiques standardisés :
- l’une des deux licences types (licence ouverte ou licence ODBL), en fonction du type d’usages, sous réserve d’adaptations limitées ;
- des clauses types figurant dans des « clausiers » ou formulaires types rassemblant l’ensemble des clauses conformes à la démarche d’open data, en vue de la rédaction des appels d’offre publics.
Recommandation n° 17
Former à l’open data des acteurs identifiés au sein des administrations centrales et déconcentrées, ainsi que dans les collectivités territoriales et au sein des grands opérateurs publics ; renforcer les compétences techniques internes en matière d’open data. Afficher dans l’organigramme et la présentation budgétaire les moyens et le personnel affectés à l’open data.
Sensibiliser les administrations et les agents publics aux enjeux d’intérêt général de l’open data et aux gains d’efficacité susceptibles d’en résulter pour l’action publique, y compris dans l’exercice de leur activité.
Renforcer les contrôles sur la réutilisation des données
Recommandation n° 18
Reconnaître à la CADAa une capacité d’autosaisine aux fins de poursuite des réutilisations frauduleuses.
La doter en conséquence de moyens juridiques et humains d’investigation.
Alourdir significativement le quantum des sanctions afin de les rendre dissuasives, en relevant le plafond de l’amende maximale encourue.
· Repenser l’écosystème de production des données.
Recommandation n° 19
Anticiper la réduction des ressources propres actuelles des opérateurs producteurs de données, ou de celles résultant des monopoles légaux dont ils bénéficient. Dans ce but :
- poursuivre le mouvement de rationalisation de leurs coûts de fonctionnement ;
- développer des services complémentaires susceptibles de générer des ressources fiables dans un environnement concurrentiel.
Garantir dans les contrats d’objectifs des administrations et des établissements publics concernés le maintien des ressources budgétaires nécessaires à la collecte et au traitement des données publiques dont ils ont la charge.
Recommandation n° 20
Promouvoir des recherches de haut niveau sur les retombées de l’ouverture des données publiques, l’appréhension de la valeur ainsi créée et les modalités alternatives de financement de la production, par l’État, de ces données.
Recommandation n° 21
Réfléchir aux moyens de faire bénéficier la collectivité du nouvel écosystème créé par l’ouverture des données publiques et la gratuité de leur réutilisation, dans trois directions :
- le recours aux financements et aux enrichissements de contenu coopératifs ;
- le développement de services ou de modes d’accès premium, soumis à tarification, à la condition toutefois que l’accès standard aux données demeure gratuit ;
- l’exploitation des retombées positives générées par l’infrastructure d’ouverture des données publiques.
Aménager une régulation spécifique de l’ouverture des données de santé.
Recommandation n° 22
Renforcer les compétences au sein des administrations sanitaires pour leur permettre d’exploiter effectivement les données du Sniiram auxquelles elles ont accès.
Recommandation n° 23
Améliorer la prise en compte des besoins de la recherche dans l’accès aux données de santé.
À cet effet :
- examiner l’opportunité de définir un cadre adapté pour permettre la conduite de projets de recherche reposant sur la fouille de données ;
- réfléchir à une simplification de la procédure autorisant l’accès aux données du Sniiram pour les équipes de recherche qui permette un examen éclairé de la pertinence de la demande.
Recommandation n° 24
Clarifier la gouvernance des données de santé. Dans ce but :
- séparer nettement les fonctions de gestionnaire et de régulateur des bases de données ;
- assurer la transparence des liens d’intérêt de toutes les parties prenantes aux missions d’orientation et de surveillance de l’ouverture de ces données ;
- systématiser le suivi des règles encadrant la réutilisation des données mises à disposition.