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01 / 03 / 2010 | 6 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Le crédit d’impôt recherche : arme anti-délocalisation sans cran de sûreté

En juin 2010, le centre de R&D grenoblois inauguré il y moins de deux ans par Yahoo France fermera. La stratégie visant à localiser l’ingénierie en Inde ou encore à Taiwan. L’entreprise aurait perçu entre 400 et 500 000 euros au titre du crédit d’impôt recherche en 2008. Idem en 2009. En théorie, rien n’oblige une entreprise qui a touché du CIR à le rembourser en cas de délocalisation. « Je le déplore car cela entraîne des effets d’aubaine. Nous allons prendre des dispositions », a déclaré Christian Estrosi, Ministre de l’Industrie lors d’une séance de questions-réponses organisée par l’Ajis (Association des journalistes de l’information sociale) le 16 février dernier. En septembre 2009, c’est le centre de R&D de Wipro de Sofia Antipolis qui fermait après avoir touché 5 millions d’euros au titre CIR. Le Ministère de l’Industrie a dû faire pression pour que Wipro réinjecte le montant perçu dans l’enveloppe du PSE qui concernait 61 ingénieurs. Des moyens de pressions indirects qui devraient aussi permettre de doper le montant du PSE de Yahoo France à ses 78 ingénieurs licenciés.

Des conditions d'éligibilités flexibles

Mais au-delà des conditions de remboursement en cas de délocalisation, ce sont les conditions d’éligibilités et de suivi du CIR que beaucoup mettent en cause. La CFDT de Thales Avionics ne manquent pas de s’interroger sur les 50 millions d’euros de CIR en 2009 alors que l’entreprise délocalise. Le député UMP Gilles Carrez a donné un bilan de la réforme de 2008 sur le CIR dans un rapport remis en juillet 2009. Il y apparaît que le CIR bénéficie massivement aux grandes entreprises.

 La réforme de 2008 a en effet permis aux entreprises de percevoir un CIR plafonné à 100 millions d’euros avec un abattement fiscal de 50 % la première année, puis de 40 % la deuxième année avant de passer à 30 %. Le tout en remboursant le CIR de façon anticipée. Pour le collectif Sauvons la recherche, « cette réforme est un scandale du fait du manque d’évaluation des dossiers. L’État paye comptant et sans évaluation ». Un collectif qui ne comprend pas pourquoi le secteur tertiaire (banques, assurances, sociétés de conseil) est le grand bénéficiaire du CIR, et pas l’industrie. Il faut dire que les critères d’éligibilité au CIR sont larges : « création ou amélioration d’un produit, d’un procédé, d’un processus, d’un programme ou d’un équipement qui doit présenter une originalité ou une amélioration substantielle ne résultant pas d’une simple utilisation de l’état des techniques existantes ». Le collectif s’interroge le sens du terme « amélioration substantielle » et « sur les qualités des personnels qui seraient en mesure d’apprécier cette amélioration ». Et Sauvons la recherche de souligner : « aujourd’hui, le crédit d’impôt recherche (CIR) représente un investissement pour l’État de l’ordre de 4 milliards d’euros par an [en 2009] en créances fiscales. Cela se traduit par une dépense fiscale de 1,4 milliard d’euros [payés] en 2008 ».

Le meilleur système au monde

 

« Le CIR, cela ne coûte pas cher, cela marche » - Nicolas Sarkozy Avec le CIR, le gouvernement a décidé de privilégier l’outil d’incitation fiscale. « Les aides directes ont traditionnellement pour objectif de stimuler des programmes de R&D que les pouvoirs publics jugent importants pour leurs retombées sur l’ensemble de l’économie. Dans un contexte de concurrence exacerbée et de progrès technologique rapide, le CIR permet aux entreprises de faire elles-mêmes ces choix. Trente pour cent de crédit d’impôt, cela permet à une entreprise, avec le budget destiné à deux chercheurs, de constituer une équipe de trois. Avec notre nouveau CIR, l’un des systèmes le plus avantageux au monde, nous renforçons la position de la France dans cette compétition. Je suis convaincue que nous continuerons à voir de nouvelles décisions d’implantation de centres de R&D dans les prochains mois », déclarait la Ministre de l’Économie Christine Lagarde, le 10 décembre 2008 lors des assises européennes de l’innovation. La veille, Nicolas Sarkozy avait affirmé dans son discours introductif : « Le CIR, cela ne coûte pas cher, cela marche. Il faut quand même le savoir, la France dispose maintenant du dispositif fiscal le plus attractif au monde en termes de recherche ».

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