Chronique vécue d'une VAE militante
Au départ, je pensais venir à un groupe chargé de travailler sur le concept de VAE militante mais j'ai vite compris que le meilleur moyen d'avancer était, pour les membres du groupe, de mettre en œuvre cette VAE pour eux-mêmes. Rien de tel qu’une bonne expérience vécue pour faire le tour de la problématique et améliorer le dispositif pour l’avenir
J'ai un peu hésité par crainte d'un surcroît de travail et sur le peu d'espoir d'utiliser concrètement cette VAE, compte tenu de mon âge (j’ai 60 ans) et de mon éloignement géographique qui réduit le champ de possibilité.
- Finalement, je me suis dit qu'il fallait y aller pour faire la démonstration qu'un salarié qui n'a fait aucune étude secondaire (j’insiste sur ce point) n'a en poche que le certificat d'étude primaire et deux CAP, pouvait avoir, grâce au militantisme (formidable outil d'émancipation sociale), acquis de nombreuses compétences dans des domaines aussi variés que l’animation d’équipe, la rédaction, la gestion de base de données, la maitrise des outils informatiques, le droit, l’action sociale…
Bilan de compétence
Grâce à cette expérience j'ai eu, dans un premier temps, la possibilité de faire un bilan de compétence avec le CIBC de l'Aveyron.
Cela m'a obligé à faire un retour sur 35 ans de vie professionnelle et militante et, surtout, de mieux cerner mes acquis et découvrir dans quelle direction poursuivre car je ne voyais pas très bien quel diplôme je pouvais valider. Ce bilan a été déterminant dans la poursuite de ma démarche. Sans lui, cette VAE n’aurait peut-être pas été menée à son terme. C’est un aspect important qu’il faut souligner, car de nombreux militants, la « tête dans le guidon », n’arrivent probablement pas à prendre le recul nécessaire pour faire ce travail ou s’auto-censurent.
Parallèlement, les réunions régulières avec l'IRT et les autres militants impliqués dans le dispositif, la dynamique de ce collectif m'ont aidé à rester mobilisé et à trouver les réponses aux questions pratiques qui se posaient à moi.
Synthèse de pratique professionnelle avec l'AFPA
Suite aux recommandations du CIBC de l'Aveyron j'ai pris contact avec l'AFPA de Rodez pour vérifier si la validation que j'entrevoyais était pertinente et, une fois ma décision prise, débuter le travail sur cette VAE. Là aussi, l'aide de l'AFPA a été prépondérante pour rester mobilisé, pour préparer mon dossier de « synthèse de pratique professionnelle » et me mettre à jour sur les aspects du titre professionnel qui m'étaient les moins familiers pour la session de certification.
- C’est un aspect un peu négatif de la VAE militante, car les multiples compétences que l’on peut acquérir ne sont pas toujours en phase avec les référentiels métiers et il faut se couler dans un certain moule pour obtenir une certification, certification qui par ailleurs passe à côté d’une grande partie des compétences acquises.
Pendant les deux ans qu'a duré cette expérience, j'ai trouvé auprès de l'IRT, du CIBC de l'Aveyron, de l'AFPA de Rodez, de mon organisation syndicale, la CFDT (qui m'a laissé du temps) et de mon employeur, le Conseil Régional Midi-Pyrénées (qui m'a accordé le financement de la VAE), tous les points d'appui nécessaires pour la mise en œuvre et la réussite de ce projet.
- La certification que j’ai obtenue ne couvre pas toutes les expériences acquises au cours de toutes mes années de militantisme à divers niveaux de mon organisation.
La vie militante dans une organisation est très riche et ne se cantonne pas (comme l’on aurait trop souvent tendance à le penser) au rôle de délégué du personnel ou d’élu du comité d’entreprise. Elle se décline aux niveaux professionnel et/ou interprofessionnel, dans le public ou le privé (j’ai fait les deux), dans les syndicats professionnels, les fédérations les unions locales, départementale ou régionales. À la base dans les entreprises ou les administrations avec des mandats aussi divers que délégué du personnel ou au comité d’entreprise, au comité d’hygiène et sécurité, dans la fonction publique au comité technique, en commission administrative paritaire. De même, il y a les élus en conseil des prud’hommes, dans des organismes comme l’Assurance-maladie, les Assedic et j’en oublie.
Quelle entreprise offre un champ aussi large ?
Comment prennent-elles en compte les acquis des militants. Je me souviens d’un camarade qui dans sa fédération (dont il a été permanent pendant 6 ans) s’était spécialisé dans l’ergonomie. De retour dans son entreprise il a proposé ses services pour étudier tous les postes de travail. Celle-ci, plutôt que d’y voir une opportunité, y a vue une intervention syndicale qui allait mettre tout « sens dessus dessous ».
- Elle l’a remis à sa machine. Quel gâchis !
Mais ont peut aussi s’interroger sur l’action des organisations syndicales. Si certaines ont des dispositifs pour leurs permanents des plus haut niveaux dans leurs démarche de reclassement, cela ne descend pas nécessairement jusqu’aux militants de base qui ont pourtant, dans certains cas, multiplié les expériences.
L’expérience de l’IRT de Toulouse doit pouvoir se poursuivre et être pérennisée par les différents acteurs concernés afin que les potentialités acquises par l’action militante (qu’elle soit syndicale, associative ou politique) soient prise en comptent dans les parcours des militants.