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À quoi sert l’entretien annuel chez Canal+ ?
Mais avant de secouer les pratiques des managers (au risque d'un « pschitt » généralisé), a-t-on vraiment fait le point sur les objectifs recherchés ? A-t-on fait le bilan des entretiens menés depuis 5 ou 6 ans sur les 4 000 salariés du groupe ? Constate-t-on une amélioration de nos pratiques professionnelles, une plus grande efficacité individuelle et collective ? Le doute est permis...
- Sur ces sujets, directions et DRH restent frileuses. Depuis plusieurs années, nous proposons par exemple de porter ce débat au sein des instances de représentation du personnel, comité d’entreprise et CHSCT.
Contenu, finalité, forme des entretiens, exploitation, retours, construction d’un avenir individuel et collectif... Nous pourrions échanger et réflechir ensemble. Rien de franchement révolutionnaire. Pourtant, refus systématique. Circulez, il n'y a rien à discuter !
Comme si la représentation du personnel se trouvait dans l’incapacité de fournir réflexions et analyses, comme si l’entretien annuel figé dans son modèle actuel depuis 7 ans ne devait pas se réformer, comme si cet entretien n’avait aucune conséquence sur la vie quotidienne des salariés, leur état moral ou psychologique… Nous savons bien qu’il n’en est rien.
- Élément révélateur, même s’ils sont encore une toute petite minorité, de plus en plus nombreux sont les salariés qui refusent l’entretien annuel parce qu’ils ne s’y retrouvent plus, ni dans la forme, ni dans le fond. Parfois, ils ne savent pas exprimer leurs doutes et leurs réticences, mais au fond, beaucoup sentent bien l'inadéquation de ces méthodes d'évaluation avec leur quotidien professionnel.
Cette réflexion est d’autant plus urgente que l’évaluation peut avoir de graves conséquences sur l’état psychologique et la santé des salariés. Il est devenu obligatoire par exemple de prendre en considération l'équilibre vie professionnelle/vie personnelle. À Canal+, c'est encore impossible, ce débat nous est refusé!
Il apparaît évident que l’évaluation individualisée des performances s’avère finalement la plus délétère de toutes les évaluations. Il serait temps de sortir d’un modèle figé et devenu archaïque pour entrer dans une démarche renouvelée où le jugement collectif aurait autant d’importance que le jugement individualisé.
Si travailler, c’est inévitablement souffrir d’une part et prendre des risques de l’autre, le sentiment d’injustice que provoquent les évaluations portées sur le travail de chacun ne sont pas nouvelles. Ce qui est nouveau, c’est que chacun aujourd’hui se retrouve seul face à l’évaluation.
En effet, chaque salarié peut en faire l’expérience, faute de méthode partagée ou plus exactement de méthodologie, l’évaluation dans sa forme purement individualisée contiendra toujours une part d’arbitraire.
- Il serait intéressant de formaliser quelques entretiens d'un même salarié avec 2 ou 3 managers différents ; nous serions étonnés de la disparité des jugements, hors objectifs déjà fixés à l'avance, promotion, éviction, sanction...
Comme le relèvent certaines études, l’évaluation individualisée génère des conduites de concurrence généralisée entre salariés, pouvant aller jusqu’à la conduite déloyale.
Ces questions sont particulièrement prégnantes dans les périodes de crise comme aujourd’hui.
Un constat, la simplification de l’entretien annuel. Si l’on peut se réjouir de ce que l'EAI se simplifie, on peut se questionner sur les objectifs de cette simplification. L’an dernier, nous nous sommes focalisés sur l’utilisation à des fins de sanction des entretiens annuels.
Ainsi, le terme « insuffisance professionnelle » avait-il fait fortune auprès de dizaines de salariés dont certains ont exprimé une révolte toute légitime à la lecture de ces sentences.
Nous le savons, 2013 sera une année difficile, une année de transition, une année compliquée sur le terrain de l’emploi. L'on peut alors imaginer que les procédés de l'an passé seront à nouveau à l'œuvre cette année.
Si les mentions défaut de communication, manque de partage, réactivité insuffisante, leadership à développer etc. apparaissent sans raison dans votre entretien, alors il est grand temps de vous interroger sur votre position, votre place dans l’organisation, particulièrement si ces jugements ne reflètent en rien la réalité. Tout est bon pour déstabiliser ici où là des dizaines de cadres, le tout sans justification réelle au regard du travail réalisé.
- L’entretien annuel doit refléter la réalité de l'année écoulée et permettre de préparer l'année suivante. Il n’est pas là pour servir de support à l’ajustement du corps social de l’entreprise. C'est une déviance qu'il nous faut dénoncer, corriger et réorienter.
L'entretien annuel, outil d'évaluation, de progression professionnelle, d'aide à la mobilité, ou simple outil d'ajustement des effectifs ? À quoi sert-il, par qui est-il lu ? S'il est lu... Certaines déviances récentes obligent à la prudence et à la réaction...
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