Participatif
ACCÈS PUBLIC
20 / 01 / 2020 | 401 vues
Secafi (Groupe Alpha) / Abonné
Articles : 58
Inscrit(e) le 09 / 05 / 2012

Recul sur le droit à la formation en SSCT des élus du CSE : le Ministère du Travail persiste et signe

Après retrait de son document « questions/réponses » sur le CSE du 18 décembre dernier (pour cause de coquilles juridiques et suite à notre alerte), le Ministère du Travail vient de publier sur son site la dernière version de ce document qui confirme hélas sa position restreignant le droit d’accès à la formation en santé, sécurité et conditions de travail (SSCT) de trois ou cinq jours aux seuls membres des commissions de SSCT, excluant de fait les autres membres du CSE (réponse n° 83).
 

Ce recul assumé par le ministère nous paraît à la fois juridiquement contestable et opérationnellement dangereux. Pour quelles raisons ?
 

1/ La nouvelle position du Ministère du Travail indique que la durée minimale de formation en SSCT de trois ou cinq jours ne concerne que les membres de CSSCT et pas tous les élus de CSE : cela constitue un recul par rapport à la règle applicable avant les ordonnances Macron, en contradiction avec la garantie de maintien des prérogatives des IRP au sein des nouveaux CSE.
 

Avant les ordonnances Macron, tous les représentants du personnel au CHSCT disposaient du droit à la formation en SSCT d’une durée minimale de trois jours (entreprises de moins de 300 salariés) ou cinq jours (300 salariés et plus) : anciens articles L. 4614-14 et 15 du Code du travail.
 

Or, les compétences du CHSCT ont été intégralement transférées au CSE, seul ce dernier pouvant notamment être consulté (contrairement à la CSSCT).
 

Notons également que les prérogatives déléguées à la commission de SSCT et celles gardées en direct par le CSE ne sont pas définies par la loi et ne sont régies que par les accords spécifiques à chaque entreprise.
 

Le fait de ne pas sécuriser le droit à la formation en SSCT d’une durée minimale de trois ou cinq jours pour tous les représentants du personnel au CSE reviendrait donc à nier la garantie d’un droit constant transférant les prérogatives du CHSCT au CSE, garantie qui a pourtant été annoncée par les pouvoirs publics.
 

Priver les membres du CSE de leur droit à formation revient à les empêcher d’exercer leurs prérogatives et enlève beaucoup de sens au choix de regrouper CE et CHSCT dans une instance unique du CSE.
 

Dans la version d’avril 2018 de son « questions/réponses » sur le CSE (voir réponse n° 72), le Ministère du Travail reconnaissait que le droit à trois ou cinq jours de formation en SSCT concernait tous les élus de CSE, peu important qu’ils soient membres ou pas de la commission SSCT :

Art.72 QR 18042018

 


 

Dans sa nouvelle version du 16 janvier 2020 de « questions/réponses » (voir réponse n° 83), le Ministère du Travail indique que la durée minimale de trois ou cinq jours ne concerne que les membres de CSSCT, les élus de CSE non membres de la CSSCT (que la CSSCT existe ou non) ayant droit à une formation en SSCT, dont la durée n’est ni précisée ni garantie, ce qui revient en pratique à la rendre facultative :

Art83 QR du 16012020

 

 

 

2/ Largement contestable juridiquement, cette position est clairement contraire à la volonté du législateur.


L’article L. 2315-18 du Code du travail dispose : « Les membres de la délégation du personnel du comité social et économique et le référent prévu au dernier alinéa de l'article L. 2314-1 [référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes] bénéficient de la formation nécessaire à l'exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail… ».
 

Les modifications successives dans la rédaction de l’article L. 2315-18 (entre l’ordonnance n° 2017-1386 et l’ordonnance n° 2017-1718, puis la loi n° 2018-217) ont clairement montré la volonté du législateur que la formation en SSCT bénéficie à tous les élus de CSE de manière effective.
 

Un amendement adopté au Sénat (puis voté en commission mixte paritaire) est à l’origine de la rédaction définitive de cet article. Cet amendement déposé par le rapporteur Alain Milon indiquait dans son motif : « Cet amendement prévoit que tous les représentants du personnel au CSE, et pas uniquement ceux qui siègent au sein de la nouvelle CSSCT, bénéficient d’une formation dans ces matières, d’une durée de trois jours dans les entreprises de moins de 300 salariés et de cinq jours au-dessus de cette taille ».
 

Par conséquent, l’intention du législateur est indiscutablement que tous les élus du CSE bénéficient d’un droit à formation en SSCT d’une durée minimale de trois ou cinq jours.
 

Certes, le législateur a fait une erreur de rédaction en omettant de modifier la rédaction de l’article L. 2315-40 en conséquence, lequel évoque toujours les membres de la CSSCT pour la formation en SSCT de trois ou cinq jours. Mais l’article L. 2315-40 fait bien référence à l’article L. 2315-18, qui évoque tous les membres de la délégation du personnel du CSE. L’article L. 2315-40 dispose en effet : « La formation mentionnée à l'article L. 2315-18 des membres de la commission de santé, sécurité et conditions de travail est organisée sur une durée minimale de : 1° cinq jours dans les entreprises d'au moins trois cents salariés ; 2° trois jours dans les entreprises de moins de trois cents salariés ».
 

➡️ Le « questions/réponses » du ministère n’ayant aucune valeur juridique et ne s’appuyant sur aucun argument étayé, contrairement à notre position (déjà développée dans notre note du 19 décembre 2019), nous considérons que tous les élus du CSE bénéficient bien du droit à trois ou cinq jours de formation en SSCT.

Lien vers le dernier document à date du « questions /réponses » du Ministère du Travail : https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/qr_cse_16_01_2020_ok.pdf  

Lien vers les deux communiqués de SECAFI du 19 décembre 2019 et du 17 janvier 2020 : https://www.secafi.com/actualite/recul-sur-droit-formation-ssct-elus-cse-ministere-travail-persiste-signe,427.html

Auteurs du document pour tout contact : Luc Berard de Malavas : 06 75 85 73 24 / luc.berard-de-malavas@secafi.com I François Cochet : 06 84 60 70 88 / francois.cochet@groupe-alpha.com I Philippe Gervais : 06 80 91 60 64 / philippe.gervais@secafi.com

 

Pas encore de commentaires