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04 / 09 / 2020 | 3492 vues
Louis DUVAUX / Abonné
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Altran redéploie son personnel de Toulouse : un PSE déguisé ?

Selon Airbus, 3 à 5 ans seront nécessaires pour retrouver le niveau d'avant-crise. Les entreprises du secteur aéronautique ont réduit leur sous-traitance dans les métiers de l’ingénierie et des services industriels. L’absence de débouché local met la filière aéronautique en péril. Dans ce contexte, fin juillet 2020, la direction d’Altran a informé les institutions représentantes du personnel du déploiement probable à très court terme (octobre 2020) du projet « Toulouse engineering centre » (TEC) de réorganisation d'Altran sud-ouest.
 

Ce projet prévoit :

  • le déploiement d’un centre d’ingénierie mondial basé à Toulouse, le « Toulouse Engineering Centre » (TEC), la création d'une entité juridique spécifique et le transfert des activités aéronautiques & industrielles basées à Toulouse au sein de cette entité, en application de l’article L1224-1 du Code du travail, soit près de 2.000 salariés ;

  • un plan de formation pour faire évoluer l’expertise acquise dans l’aéronautique vers le ferroviaire, le spatial, le naval, l’énergie etc. ;

  • un déploiement important vers la recherche et l’innovation dans les technologies d’ingénierie numérique et les nouveaux programmes de l’industrie, à l’instar d’Altran Research, avec une part non négligeable de financement par le CIR.  
     

La CFTC considère que le projet TEC va fortement de modifier les conditions de travail des salariés concernés : 

  • le transfert de près de 2.000 salariés (sur 2.750) travaillant pour la branche aéronautique, des fonctions d'assistance et administratives vers cette nouvelle entité juridique appelée « Altran Participation 2 » ;

  • la perspective de renégociation de tous les accords collectifs pour les salariés transférés ;

  • la négociation d’accords d’entreprise APLD et APC (potentielle remise en cause des accords d'entreprise et des contrats de travail, y compris sur le temps de travail et les salaires) ;

  • les possibilités de carrière réduites du personnel des deux entités ;

  • le partage des locaux entre les salariés transférés et les salariés non transférés ;

  • la représentation du personnel en partie amputée pour les deux entités.
     

Si la direction d'Altran affirme qu’avec la création du Toulouse Engineering Centre, elle souhaite effectuer un virage ambitieux vers la sortie de crise pour préserver l’emploi et les compétences du bassin toulousain, la CFTC redoute des perspectives bien sombres. Quand bien même la direction assure que la baisse des coûts journaliers (du fait de la signature des deux accords précités) des consultants concernés rendrait l’offre du TEC concurrentielle, nous craignons que les risques d’une telle opération ne pèsent que sur les salariés.
 

C’est oublier un peu vite que l’ensemble du secteur aéronautique est touché par la crise à Toulouse et que la concurrence va très probablement être efficace.
 

  • Le groupe Capgemini sera-t-il capable de relocaliser le millier de salariés Altran actuellement en inter-contrat à Toulouse ?

  • Les perspectives d’un retour à l’équilibre de la structure TEC à trois ans prévue par le plan sont-elles crédibles ?

  • Le dumping économique réalisé ne menacera-t-il pas les autres salariés de Capgemini à Toulouse et ailleurs ?

  • Pourquoi la négociation des accords (APLD et APC) se fait-elle dans un cadre national alors qu’ils seront appliqués localement et qu’il existe des partenaires sociaux locaux ?

  • Comment comprendre que DRH et responsable des affaires sociales d'Altran sud-ouest ne semblent pas faire parties du personnel transféré ?
     

Cette nouvelle organisation pourrait aussi se terminer par des PSE (c’est la menace de la direction pour faire aboutir la négociation de l’APC).
 

Nous attendons avec crainte et impatience les communications des syndicats impliqués (la négociation se tient au niveau du groupe, pas au niveau local, alors que la CFTC est représentative à Toulouse ; elle n'a pas voix au chapitre). Nous attendons de connaître ce que la direction d'Altran prévoit en contrepartie des concessions sévères qui seraient imposés aux salariés du TEC car l’essentiel du modèle économique de ce projet est basé sur le « new cost rate » (comprendre baisse des coûts de production)...
 

À noter que les salariés qui refuseraient l’application de ces accords pour leurs propre compte seraient licenciables « économiques » dans les conditions actuelles de leurs rémunérations.
 

Avec TEC, Altran n’est-il pas en train d’inventer l’« offshore-inshore » et le « low cost » n’est-il pas en train de se transformer en « coup bas » ?

 

Quid de Capgemini ?
 

Le groupe Capgemini est désormais propriétaire du groupe Altran, suite à la réussite de l'OPA amicale.
 

Face à la même situation de crise à Toulouse, Capgemini a choisi de créer une plate-forme mondiale de services avec maintien de l'emploi et développement des compétences. Altran utilise les mêmes éléments de langage mais, contrairement à Capgemini, crée une structure juridique distincte. Déjà constituée en unité économique et sociale, rien ne l'y oblige : créer et configurer une société, organiser le transfert de personnel, casser la représentation des instances sociales etc. coûte cher... Tout cela ressemble à un plan social déguisé. D'un côté, une politique volontariste de sortie de crise par le haut ; de l'autre, la mise à l'écart et la menace de perte d'emploi. Deux cultures pas encore fusionnées... Qui pilote chez Altran ?

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