Un conflit portant sur la récupération des jours fériés travaillés par le personnel en poste touche l’établissement Orano (ex-Areva) de La Hague depuis le mois de décembre. Soutenu par les salariés et une intersyndicale (CFDT, CGT et UNSA/SPAEN), ce conflit est consécutif à la dénonciation d’un usage sur le mode de récupération des jours fériés travaillés…
Le mécanisme d’un conflit annoncé
La dénonciation unilatérale de la direction locale, associée au refus de négocier une nouvelle modalité partagée par les salariés, a engendré un climat social très tendu, notamment en raison des tensions sur les effectifs et les remises en cause annoncées de certains autres usages, comme les indemnités kilométriques et les journées de travail en horaire normal cyclées pour les employés en poste. Consciente du risque de conflit, l'intersyndicale a immédiatement demandé des négociations qui lui ont été refusées. Les salariés estiment aussi que la situation économique du groupe est la responsabilité des directions et que le plan de sauvegarde des emplois d'Orano fait largement payer ces erreurs (fautes) par le personnel…
Compétences en négociation
La direction locale d’Orano La Hague a fait le choix délibéré du conflit
La direction s’est appuyée sur deux organisations syndicales qui n’ont pas manifesté le désir de soutenir la revendication des salariés de maintenir une récupération et d’en compenser l’effort associé pour diverses raisons. Le conflit s’est donc développé au fur et à mesure de la mobilisation du personnel et des assemblées générales convoquées par l’intersyndicale CGT, CFDT et UNSA SPAEN. Mandatée par le personnel, l'intersyndicale a proposé des solutions de sortie refusées par la direction avant toute négociation. Si on décrit le dialogue social comme le moyen « privilégié » de règlement de problématiques sociales dans l’entreprise, on mesure alors que la direction locale d’Orano La Hague a fait le choix délibéré du conflit, pensant pouvoir imposer une mesure unilatérale aux salariés. Cela pose également une problématique de compétence en négociation de la part de la direction puisque la négociation ne s’est instaurée qu’au bout d’un mois de grève. Lorsqu’enfin les négociations ont débuté le 8 janvier après-midi, cette dernière a rejeté les propositions successives de l’intersyndicale construites autour des modèles de négociations raisonnées et à gains mutuels (peut-on demander des efforts à des salariés sans en compenser les effets ?), versant les protagonistes dans une stratégie de négociation contrainte…
Un conflit exacerbé
Le conflit s’est exacerbé suite à la décision de la direction locale de « bloquer » les congés annuels des autres salariés du site pendant tout le temps de la grève mais de manière différentes selon les catégories et les services du personnel… Cette action a eu pour conséquence un durcissement de la grève et des actions de blocage partiel (filtration des véhicules) de la route d’accès de La Hague le 8 janvier. La direction a enfin consenti à réunir pour négocier les organisations syndicales pour finalement refuser la proposition de l’intersyndicale de manière à décourager le personnel et briser le mouvement. Rien n’y a fait et une seconde journée d’action s’est déroulée après plusieurs manifestations du personnel devant le bâtiment de la direction locale les 9 et 11 janvier, faisant encore monter la pression entre les salariés et leurs dirigeants…
Une intervention de la direction générale
Jusqu’alors restée en dehors de ce conflit local et constatant que le conflit pouvait mener à passer une étape supplémentaire dans la confrontation, la direction générale (représentée par le directeur général, Philippe Knoche et le DRH du groupe, François Nogué) a décidé d’intervenir en se rendant sur place pour y réunir les protagonistes du conflit le 17 janvier. Après une intervention de l’intersyndicale et des autres organisations, le directeur général a répondu en reprenant l'une des options avancées. Il a pris le dossier en main en proposant de repousser la mise en place de la nouvelle disposition, instaurer une médiation entre les parties et donner un délai pour engager une solution partagée. L’intersyndicale a alors décidé de soumettre cette avancée au vote des salariés.
Les salariés valident très majoritairement la médiation
L’intersyndicale a réuni les salariés le soir même et a procédé au vote de la proposition du directeur général d’Orano. Un résultat très majoritaire (90 % des votes) à bulletins secrets a validé la solution de la médiation. La réponse a été signifiée à la direction générale et une réunion a été réalisée sur les modalités de mise en place de la médiation.
Une médiation pour une solution partagée
Les salariés et l’intersyndicale ont donc placé leurs espoirs dans une médiation sociale confiée à l’association Dialogues, permettant de rétablir les voies d’une solution partagée. D’abord envisagée avec l’administration du travail, qui ne pouvait être juge et partie, le cabinet dialogue et le médiateur Jean-Dominique Simonpoli, répond aux critères de volonté de reconstruire un dialogue social perdu sur le site de La Hague. Au moment où le groupe Areva change de nom et se transforme pour se redresser, les salariés, l’intersyndicale et la direction générale appellent à un renouveau du dialogue social chez Orano…