"Poser les petits-fours et rejoindre les syndicats à la table des négociations"...
Richesse : ces inégalités qui desservent l’économie
D es hyper-riches toujours plus riches.
L’an dernier la fortune des milliardaires a augmenté de 2 000 milliards de dollars, un rythme trois fois plus rapide qu’en 2023, indique le récent rapport de l’Oxfam sur les « Inégalités mondiales », publié le 20 janvier, date de l’ouverture en Suisse du forum annuel mondial de Davos réunissant les grands acteurs économiques de la planète, dont de richissimes P-DG.
En France, depuis 2019, la fortune des milliardaires a augmenté de plus de 24 milliards d’euros au total, soit 13 millions d’euros par jour, indique le rapport
Clin d’œil à l’actualité budgétaire : 10 % de la fortune cumulée des milliardaires français suffirait pour atteindre l’objectif de 50 milliards d’euros d’économies recherché actuellement pour le budget 2025.
Toujours à la veille du Davos 2025, la Confédération européenne des syndicats (CES) rappelait que les P-DG des grandes entreprises européennes gagnent cent dix fois plus que le travailleur moyen, et lançait un avertissement : L’énorme écart de richesse nuit à la fois à l’économie et à la démocratie.
La secrétaire générale de la CES, Esther Lynch, ne mâche pas ses mots.
"L’écart de rémunération scandaleux entre les P-DG et les travailleurs montre qu’il est urgent de rééquilibrer l’économie en augmentant le nombre de travailleurs bénéficiant de salaires négociés collectivement.
Une rémunération plus équitable stimulerait la compétitivité en contribuant à mettre fin aux pénuries de main-d’œuvre en Europe et garantirait que davantage d’argent retourne dans l’économie au lieu d’être amassé sur des comptes offshore. (...) J’invite les P-DG réunis à Davos à cesser d’adopter des allures de philosophes, à poser les petits-fours et à rejoindre les syndicats à la table des négociations, dans la tradition européenne du dialogue social."
Décisions budgétaires : rien de bien inquiétant pour les plus riches !
La procédure, pour l’adoption d’un texte sans vote et sans débats, a été activée deux fois le 3 février.
Le Premier ministre, François Bayrou, l’a dégainée pour l’adoption définitive du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 et pour la première partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Sur fond de croissance déjà en berne (le PIB s’est contracté de 0,1% au quatrième trimestre 2024) et alors qu’il vient de revoir la prévision pour 2025 à la baisse, à 0,9% contre 1,1%, le gouvernement vise à ramener le déficit public à 5,4% du PIB cette année contre 6,1% en 2024.
Pour le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) la prévision de croissance est « optimiste », « supérieure à celle du consensus des économistes (+0,7%) ».
Quant à l’objectif à atteindre sur le déficit public, il « repose aussi sur des hypothèses macroéconomiques un peu optimistes, sur un net ralentissement des dépenses des collectivités locales et une forte maîtrise des dépenses d’Assurance maladie ».
Par l’architecture budgétaire qu’il a choisie, le gouvernement table sur des recettes supplémentaires à hauteur de 21 milliards d’euros et un recul des dépenses publiques de 32 milliards d’euros, dont, pour l’État, un « effort » de 23 milliards environ.
Quasiment tous les ministères connaîtront une baisse massive de crédits.
À titre d’exemples, la mission Travail perd 2,6 milliards par rapport à 2024 et le ministère de l’Écologie 2,1 milliards.
Des contributions très limitées
Outre l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu à l’inflation (+1,8% par tranche), la loi de finances prévoit une contribution (de 20%) dite différentielle sur les hauts revenus, au-delà de 250000 euros annuels pour une personne seule, de 500000 euros pour un couple. Mais la mesure, qui vise une recette de 2 milliards d’euros, n’est que pour 2025.
Concernant les grandes entreprises, une surtaxe sur les bénéfices s’appliquera à celles affichant un chiffre d’affaires supérieur à un milliard d’euros.
Quelque quatre cent cinquante sociétés sont concernées par cette mesure dont le rendement attendu est de 8 milliards d’euros.
Mais au lieu de deux, la surtaxe ne durera finalement qu’un an... Nombre de grands patrons ont toutefois piqué une colère.
En tête, Bernard Arnault de LVMH (fortune estimée à plus de 160 milliards d’euros), brandissant la menace de délocalisations en série.
La taxe sur les transactions financières (pour une centaine de sociétés à la capitalisation boursière supérieure à un milliard d’euros) est quant à elle modestement relevée de 0,1 point, passant de 0,3% à 0,4%. Les ultra-riches n’ont donc pas de quoi s’affoler.
L’examen du PLFSS par l’Assemblée conduira quant à lui à déterminer la portée réelle de la mesure de baisse des allégements de cotisations sociales patronales (lesquels induisent un manque à gagner de près de 80 milliards d’euros par an pour la Sécu). En octobre, la baisse était annoncée à quatre milliards d’euros, puis trois après le passage devant le Sénat. Le 23 janvier, à l’issue de la Commission mixte paritaire, elle avait encore fondu, à 1,6 milliard d’euros...