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11 / 10 / 2024 | 193 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Direct

Comment faire du dialogue professionnel l’outil des salariés, animé par les élus, pour porter leur expression collective sur le travail réel ?

Retour sur le direct du 1er octobre porté par JVConseil sur la mise en application chez Orange et à l'UNAPEI 92 d'un profond changement dans la façon de façonner syndicalement l'expression des salariés sur les conditions d'exercice de leur travail. L'occasion d'illustrer la capacité des élus à instruire le vécu des salariés pour l'imposer à l'ordre du jour des réunions des CSE.

 


Serpent de mer que celui du droit d'expression collectif des salariés sur les conditions d'exercice de leur travail. Un droit intégré dans les Lois Auroux de 1982, sur lequel les syndicats ont toujours été en difficulté pour un faire levier d'action. Notamment parce que le calendrier du dialogue social est toujours plus dicté par des informations-consultations du CSE sur des thématiques générales ou des projets de réorganisation, qui laisse peu de place au recueil du point de vue des salariés sur le terrain. Il y a institutionnalisation. Et cela contribue à mettre "Le dialogue social sous contrôle" titre du dernier ouvrage coordonné par Baptiste Giraud et Jérôme Pélisse aux éditions PUF. 


« Sans même en avoir conscience, les élus parlent à la place des salariés et non plus en leur nom. Or se donner les moyens de parler en leur nom signifie de recueillir, d'objectiver et factualiser leur parole pour amener les lignes hiérarchiques opérationnelles à répondre aux problèmes soulevés par les équipes », considère Joseph Vrezil, ancien syndicaliste, directeur de projet et cadre supérieur, devenu consultant et formateur pour les CSE. « Orienter le temps syndical sur l’instruction du travail réel et des problèmes prioritaires vécus par les salariés permettra de dynamiser le dialogue social et de redonner de la légitimité aux représentants du personnel », précise celui-ci.


Le direct a été l'occasion d'illustrer comment des élus de CSE pouvaient travailler autrement, avec des résultats. Chez Orange, l'ensemble des élus du CSE du siège formé à l'approche portée par JVConseil travaille sur des tableaux d'alerte qui structurent les points présentés à la direction en CSE. « Le recueil et la structuration des retours des salariés sont des actions d'autant plus utiles à rappeler aux élus qui n'ont pas connu les DP et les CHSCT et qui constatent à quel point des représentants de proximité sont aucun repère », note Fatima Hamadi, l’élue CFE-CGC qui a coordonné cette méthodologie avec la volonté de convaincre les 13 autres CSE de l'intérêt de celle-ci.

Les occasions de traiter des alertes ne manquent pas. Cela peut concerner l'accroissement de la charge de travail pour ceux qui restent après un PDV.

Tab

Ou le stress liée à des mobilités forcées.

Mob

« Il est essentiel que l'encadrement de proximité accepte de s'impliquer dans le processus d'instruction des tableaux. Cela sous-entend d'entretenir des relations de confiance », reconnaît Fatima Hamadi qui partage un panorama des axes à objectiver.

Questions
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A l'UNAPEI 92, une association spécialisée sur la prise en charge des personnes en situation de handicap mental qui emploie 1000 salariés, les moyens du dialogue social n'ont rien de comparable avec ceux dont disposent les syndicats d'Orange. Il n'empêche, c'est d'abord un premier CSE qui s'est formé pour mettre en place une stratégie de collecte des informations auprès des salariés puis les élus des 4 autres, à la faveur d'un passage à un CSE unique.
 

Les tableaux d'alerte brillent là aussi par leur diversité.

Unapei
 

« Face à la rigueur de nos tableaux, un encadrant a décidé de consacrer un temps en réunion d'équipe pour faire le point sur les préconisations et les réponses de la direction », se réjouit Emilie Laborde, la secrétaire du CSE et militante CGT par ailleurs. « C'est une autre façon de peser dans le rapport de force. C'est moins visible qu'une grève mais c'est un travail d'équipe très efficace. On gagne en légitimité à la fois auprès des salariés mais aussi auprès de la direction », précise-t-elle après un premier mandat très stérile, encalminé dans les réunions.

Pas de monopole syndical

Mais les syndicats n'ont pas le monopole pour capter l'expression des salariés, les directions ne s'en privent pas. Que ce soit au travers des multiples sondages dispensés que dans les groupes d'expression qu'elles sont susceptibles de mettre en place, en mettant ou non les représentants des salariés dans la boucle comme partie prenante. Par ailleurs, le programme d'accompagnement AP2 porté et financé par la CARSAT Aquitaine vise à conjuguer prévention et performance sous le prisme de l'expression des salariés. La cible : les PME, ces entreprises où la présence syndicale est très partielle « Nous formons et accompagnons des binômes de salariés qui vont animer les espaces de discussion en maîtrisant notamment les techniques d'analyse des situations de travail. Nous demandons à ce que les élus participent à la démarche soit dans binôme, dans le COPIl, ou dans le groupe de travail. La direction doit accepter les contre arguments et il ne doit pas y avoir de sujet tabou », précise Philippe Verdeguer, Ingénieur conseil à la CARSAT Aquitaine, qui a accompagné la société Sicsoe (70 salariés), PME bordelaise sur le marché de l'embouteillage, alors même qu'une démarche d'amélioration continue était déjà en place dans chaque service. 
 

Selon Joseph Vrezil, « ces démarches participatives, pilotées par les Directions d’entreprise, sont indispensables pour solutionner des situations-problèmes ; c’est même la condition de leur réussite. Mais la production de tableaux d’alertes vise, en amont de cette étape de transformation, de construire et restituer aux salariés eux-mêmes leur propre vécu sur le travail pour redonner du sens à la socialité du travail afin qu’ils puissent se reconnaître dans ce qu’ils vivent : et c’est aux représentants du personnel d’assurer cette reconnaissance ».