Organisations
Le cautionnement : un des attributs majeurs de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
Dans le cadre des entretiens du Ciriec (*), Vincent Bouillaguet, Président de l'Association Française de Cautionnement Mutuel , a bien voulu rappeler, à un moment où se dessine de profondes réformes sur la responsabilité des gestionnaires publics, l'historique de la création l'AFCM, son rôle et l'importance d'un dispositif qui a fait la preuve de son efficacité depuis plus d'un siècle.
Qu’est-ce que l’AFCM ?
L’Association Française de Cautionnement Mutuel (AFCM) a été créée en 1908 sous l’impulsion de Joseph Caillaux, ministre des Finances afin de démocratiser l’accès aux fonctions de comptable public. Dès son origine l’AFCM s’est placée sous la tutelle du Ministère chargé du budget (en fait la Direction Générale des Finances Publiques). Les statuts de l’AFCM sont approuvés par le Ministère en charge du budget et d’autre part le Président de l’AFCM, une fois élu par ses pairs, doit être agréé par le Ministre.
Depuis plus d’un siècle cette association est gérée par des comptables publics issus des administrations financières mais aussi de l’Éducation Nationale, des Collectivités locales ou encore de la Sécurité Sociale. Le cautionnement comme la prestation de serment sont deux préalables à l’installation d’un comptable public.
L’AFCM garantit l’État et les collectivités publiques. L’AFCM n’est pas une assurance. Les comptables publics ont la possibilité (mais au contraire du cautionnement, ce n’est pas une obligation) de s’assurer auprès d’une compagnie. Le montant des cautionnements est fixé par l’État en fonction de la taille du poste comptable ou du volume des opérations traitées.
Quand un débet (somme dont un comptable public ou un particulier est déclaré débiteur envers le Trésor) est prononcé contre un comptable public et après épuisement de toutes les voies de recours, le comptable peut demander une remise grâcieuse au Ministre, si elle n’est que partielle ou refusée, le comptable fait jouer son assurance personnelle. Dans le cas d’un reste à charge non réglé par le comptable, la Direction des Créances spéciales met en demeure l’AFCM de verser le montant du cautionnement auquel le comptable est astreint (même chose en cas de détournement mais sans passer par la remise gracieuse et l’assurance). L’AFCM, sans discuter, verse à cette direction les montants réclamés jusqu’à hauteur du cautionnement garanti. L’AFCM est alors subrogée dans les droits du Trésor et poursuit le comptable public afin de recouvrer les sommes ainsi versées.
Comment est organisée l’AFCM ?
Cette association ne vit que des cotisations de ses adhérents (51428 adhérents). Elle emploie 37 salariés. L’Assemblée Générale se compose de soixante délégués régionaux, répartis en quatre régions représentant les adhérents des différents groupes de comptables et régisseurs. Ces délégués élisent le Comité de direction (21 membres) qui se réunit une fois par trimestre. Un bureau, composé de huit membres, présidé par moi-même, se réunit une fois par mois. L’AFCM développe une action sociale importante à travers la location de plus de 400 appartements réservés aux jeunes fonctionnaires à des prix inférieurs au marché. Elle propose des prêts aux adhérents et aux retraités, octroie des subventions scolaires annuelles aux plus démunis, des réductions pour des séjours en villages de vacances. L’AFCM est cofondatrice de la Fondation de l’Avenir, organisme de recherche médicale et la soutient par des subventions annuelles.
Une réforme de la responsabilité des gestionnaires publics va être mise en place au 1er janvier 2023, quel est votre constat ?
Souhaitant que la gestion publique se rapproche de la gestion privée, le gouvernement a mis au point une réforme comprenant différentes mesures. La Cour de discipline budgétaire et financière va être supprimée ainsi que la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics. La responsabilité des gestionnaires publics sera mise en place au 1er janvier 2023. Elle vise à sanctionner uniquement des fautes graves d’un montant significatif en regard du budget impacté. Ordonnateurs et comptables peuvent être sanctionnés, sont cependant exclus les élus et les ministres. La séparation entre les ordonnateurs et les comptables publics, elle, demeure.
La réforme vise à mieux exercer la mission de jugement des gestionnaires publics avec des pouvoirs de sanctions plus importants vis-à-vis de celui qui commet réellement la faute. Cependant, le texte de loi manquant de précisions, une abondante jurisprudence risque de voir le jour. Le gouvernement a choisi la voie de l’ordonnance pour légiférer sur cette réforme. Le parlement n’aura donc d’autre choix que de ratifier ou pas le texte sans pouvoir débattre sur le fond.
Que devient le Cautionnement obligatoire ?
Le cautionnement est un des attributs majeurs de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics. Il permet de garantir gratuitement l’État ou la collectivité pour tout type de débet (juridictionnel, administratif, vol ou détournement…). L’ordonnance sur la responsabilité des gestionnaires publics, qui ne traite que des mises en cause juridictionnelles, ne l’évoque pas.
Cela veut-il dire qu’il disparait ?
J’ai bon espoir que les pouvoirs publics auront à cœur de conserver cette garantie offerte par un opérateur qui n’a jamais failli en 114 ans d’existence et qui verse, à hauteur du cautionnement, les sommes réclamées par la Direction des Créances Spéciales du Trésor, quelle que soit l’origine de la somme mise à la charge du redevable. J’espère donc que les décrets d’application sauront réparer cet oubli qui remet en question l’existence de notre association mutuelle.
Quelques chiffres :
- 51248 adhérents.
- 1,061 milliard d’euros. de cautionnement garantis à l’État.
- 660 413 euros de cautionnement versés sur débets pour les 6 dernières années.
(*) Pour en savoir plus sur le Ciriec France : https://www.ciriec-france.org/ciriec/cms/7124-7449/le-ciriec-france-presentation.dhtml