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02 / 08 / 2021 | 72 vues
Jean François Draperi / Membre
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RECMA : coopération dans une finalité de changement social

Le premier numéro de la Revue des études coopératives (REC), daté d’octobre-décembre 1921, s’ouvrait  sur une « lettre à nos lecteurs » dont les premières lignes sont les suivantes : « La Revue des études coopératives tient, au moment de son apparition, à exposer à ses lecteurs les raisons qui ont décidé de sa constitution et les buts qu’elle poursuit. Sans doute, on voudra d’abord savoir qui nous sommes. Les uns coopérateurs militants, les autres professeurs, unissant parfois ces deux qualités, nous avions librement formé dès avant la guerre un petit groupe d’amis qu’unissaient les mêmes tendances démocratiques et de communes habitudes scientifiques (1) ». La REC s’annonce d’emblée comme une revue engagée dans la cause coopérative.


Les militants et professeurs sont liés par cet engagement qui leur fait nouer une relation amicale dépassant les cloisonnements professionnels : « La revue que nous présentons au public est née de ce désir d’entraide intellectuelle, osons le dire, de cette obligation de conscience qui s’imposait à nous ». L’« obligation de conscience » est née de la conviction que la coopération est le moyen de résoudre les questions sociales. Les auteurs précisaient que leur objet ne se limitait pas à l’exercice de la coopération. L’entraide se partage : « Nous n’avons jamais dissocié le problème coopératif du problème social tout entier ».

 

Coopération dans une finalité de changement social


La REC se présente ainsi comme la première revue française qui se donne pour mission de répondre aux problèmes de la société. C’est cette préoccupation qui explique son ouverture internationale : « De toute évidence, les problèmes sociaux ne peuvent pas s’étudier d’un point de vue strictement national ». La revue prend ainsi le sous-titre « Problèmes d’économie nationale et internationale. Questions sociales ».
Ces quelques mots sont très instructifs : ils ont suffi à solidement ancrer la REC. Naturellement, les centres d’intérêt ont changé, les champs de pratiques se sont transformés, les sciences sociales se sont spécialisées et les méthodes de recherche se sont complexifiées mais la posture est définie dans ces quelques lignes : la revue associe les militants coopératifs et les enseignants-chercheurs convaincus de la nécessité de produire et d’échanger des réflexions scientifiques sur la coopération dans une finalité de changement social.


Cette association est indubitablement l’une des raisons de la longévité de la REC, devenue RECMA en 1986. Elle explique au moins en partie que, dans les moments difficiles, la revue ait pu trouver les soutiens et les ressources d’universitaires, de militants et de sociétés coopératives, lui ayant permis de franchir de nombreux (parfois sérieux) obstacles.

 

Le sommaire, qui est resté inchangé jusqu’à la mort de Charles Gide en 1932, comprend quatre parties : les articles généraux traitant de doctrine ; ceux abordant les problèmes internationaux ; les articles techniques et les monographies coopératives ; les chroniques et bibliographies en lien avec l’objet de la revue. Ce plan intègre la double orientation de la REC : il distingue les questions générales, qui intéressent les universitaires spécialistes des sciences économiques, sociales et politiques et les questions pratiques et techniques qui concernent plutôt les coopérateurs.

 

Cette double orientation d’une recherche à la fois théorique et appliquée ne peut être maintenue que par l’association de ces deux populations autour de l’engagement coopératif. Une association sans doute plus difficile à faire vivre aujourd’hui qu’en 1921, ne serait-ce qu’en raison de la normalisation des publications universitaires. Ainsi, la reconnaissance académique de la revue, désormais classée par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES), rend la publication d’articles doctrinaux ou techniques moins aisée.

 

Or cette dissociation risque d’éloigner les coopérateurs non seulement en tant qu’auteurs mais aussi en tant que lecteurs (et encore en tant que soutiens économiques de la revue). C’est pourtant l’un des enjeux majeurs souligné en 1921 : « Dès maintenant, jouissant du concours des militants éprouvés que notre mouvement coopératif a placés à la tête des organismes centraux de propagande et d’achats possédant la collaboration précieuse d’un grand nombre des universitaires français les plus actifs et les plus réputés, nous espérons acquérir l’adhésion d’un nombre toujours croissant des sociétés coopératives ». Réciproquement, « un mouvement comme le mouvement coopératif, qui groupe en France 1 500 000 familles et réalise environ un milliard de ventes annuelles et dont les ambitions demeurent immenses, ne peut pas faire moins que de posséder une revue d’étude et de libre critique ».
 

La revue ambitionne enfin de gagner un public plus large (notamment les intellectuels) à la cause coopérative. « La réalisation que nous allons tenter est malaisée […], que l’on veuille bien mesurer l’extrême difficulté de la tâche entreprise » (p. 6). De fait, si l’on peut se féliciter du chemin parcouru et qu’un tel projet ait réussi à perdurer un siècle durant, on peut aussi bien admettre que tout reste à faire.

 

Neuf témoins présentés par des plumes contemporaines


Le numéro de juillet 2021 permet au lecteur de découvrir quelques questions fondamentales dont la RECMA s’est emparée entre 1921 et la fin des années 1980. Nous espérons qu’il lui donnera l’envie de découvrir d’anciens numéros (2) et qu’il contribuera à éclairer les pas des rédacteurs pour les années à venir. Toutefois, puisque nous devions nécessairement faire un choix, celui de faire connaître des textes qui ont accompagné l’évolution des conceptions coopératives dès la naissance de la revue, puis la redécouverte (et re-théorisation) de l’économie sociale, dans ses différentes expressions, au cours du dernier tiers du XX e siècle, sans intégrer les vingt-cinq dernières années (dont nous présentons toutefois une vue d’ensemble à la fin de cette introduction) à notre lectorat s'est imposé à nous.


Pour accompagner le lecteur dans la découverte de cette sélection de textes et d’auteurs anciens, chaque article reproduit en fac-similé est précédé d’une introduction rédigée par un membre du comité de rédaction ou ami de la revue qui en restitue l’apport, le contexte et l’actualité.

 

Charles Gide (introduction par Jean-François Draperi)


Le choix du premier article s’imposait : le « Manifeste coopératif ». Charles Gide y résume sa conception de la coopération. L’œuvre de Charles Gide scelle le tournant que la coopération française a connu au cours de la seconde moitié du XIXe siècle : la coopération de travail, dont Jean-Philippe Buchez avait été le théoricien, laisse la prééminence à la coopération de consommation, dont la fondation de l’Alliance coopérative internationale (ACI) en 1895 avait consacré le bien-fondé. S’opposant aux « participationnistes », les coopérativistes trouvent en Charles Gide le grand théoricien qui va concevoir la République coopérative en miroir du « commonwealth coopératif » de Robert Owen. Après avoir formé une génération d’économistes, Charles Gide a presque disparu des bibliographies des économistes. Son œuvre est cependant très accessible (3).

 

Bernard Lavergne (introduction par David Hiez et Maryline Filippi)


Héritier et continuateur aujourd’hui méconnu de Charles Gide, Bernard Lavergne a poursuivi les questionnements majeurs de la coopération de consommation (comme celui du rapport des consommateurs avec les salariés ou celui de la relation avec l’économie publique) jusqu'au début des années 1960. Ses travaux sur les régies le placent au cœur du débat entre l’économie coopérative française, exclusivement centrée sur l’entreprise privée, que Georges Fauquet développe, la conception belge de l’économie collective d’Edgard Milhaud et la version anglaise portée par Sidney et Beatrice Webb au sein du fabianisme, creuset des travaillistes. Cofondateur de la RECMA, Bernard Lavergne a également été son principal animateur pendant une soixantaine d’années, comme David Hiez et Maryline Filippi le rappellent. On conçoit bien que les théoriciens du coopératisme devaient donner une réponse à la question du rapport de pouvoir entre consommateurs et travailleurs. Le mouvement apporta également une réponse concrète.

 

Ernest Poisson (introduction par Michel Dreyfus)


Le premier secrétaire général de la Fédération nationale des coopératives de consommateurs (FNCC), Ernest Poisson, a été le premier artisan de la réalisation concrète du projet de République coopérative dont Charles Gide avait esquissé les traits à la fin du XIXe siècle. Animateur de la FNCC de 1921 à 1940, Ernest Poisson a conçu et instauré un accord unique en France entre une grande fédération d’entreprises (la FNCC) et les syndicats de salariés (précisément la CGT, syndicat dominant de toute la période). Si la FNCC su garder son unité, elle a, dans la décennie 1980, connu la même faillite que la quasi-totalité des fédérations de coopératives de consommateurs européennes, abandonnée à son sort aussi bien par les syndicats de salariés que par les partis politiques auxquels elle avait tant participé.

 

Georges Fauquet (introduction par Danièle Demoustier)


Une page s'est tournée avec le grand rénovateur de la pensée coopérative européenne à partir de l’entre-deux-guerres qu'a été Georges Fauquet. La rupture introduite par son petit livre Le secteur coopératif a été comparée (toutes proportions gardées) à celle provoquée par l’œuvre d’Émile Durkheim dans les sciences sociales. Avec Georges Fauquet, la coopération avait enfin sa pensée scientifique. L’attention portée aux faits plutôt qu’aux valeurs revendiquées et la rigueur du raisonnement ont donné les termes de l’analyse coopérative contemporaine. Les deux interprétations produites par Charles Gide et Georges Fauquet ont été reprises et respectivement renouvelées par Henri Desroche et Claude Vienney. Toute l’économie et la sociologie coopératives du XXe siècle peuvent se comprendre à partir de ces deux filiations Gide-Desroche et Fauquet-Vienney. La première s’appuie sur une lecture qui donne une place centrale à l'utopie, alors que la seconde s’attache de préférence aux faits matériels. De là à opposer deux lectures idéaliste et matérialiste, il n’y a qu’un pas que nous ne franchirons pas. Aucune des deux traditions ne néglige l’importance des valeurs ni celle des faits matériels. Ce qui les oppose est indubitablement la posture épistémologique, à travers les places qu’elles attribuent à la connaissance scientifique dans les pratiques sociales.

 

Diva Pinho (introduction par Maurice Parodi)


Cette question sera centrale dans l’événement majeur que le mouvement coopératif a connu au XXe siècle : sa place éminente dans les politiques économiques menées par les pays accédant à l’indépendance politique à partir des années 1960. Comme le montre Maurice Parodi, les pays en développement ont dès lors représenté un troisième pôle politique et économique, à côté des deux conceptions libérale et socialiste. Dans ce pôle d’une grande hétérogénéité, les coopératives agricoles et artisanales ont joué le rôle que le marché libre occupe dans les pays capitalistes et que l’État tenait dans les pays « socialistes ». Le développement des savoirs et des savoir-faire coopératifs est une condition majeure de la réussite du projet tiers-mondiste.

 

Henri Desroche (introduction par Jean-François Draperi)


C’est cette raison qui a poussé Henri Desroche à sillonner l’hémisphère sud entre 1970 et 1986. Il ambitionnait alors de fonder l’Université coopérative internationale (UCI), avec le soutien de l’ACI en la personne de Françoise Baulier. Il est parvenu à implanter cette université dans quarante pays de l’hémisphère sud. Les travaux résultant de cette expérience remarquable ont été publiés dans la revue fondée et animée par Desroche de 1960 à 1990, Les Archives de sciences sociales de la coopération et du développement (Asscod). L’autobiographie raisonnée est la démarche qu’il a inventée pour se donner les moyens de soutenir le développement coopératif et réussir à convaincre ses interlocuteurs de se former à la coopération et de s’inscrire dans une démarche de recherche-action : une recherche sur l’action, réalisée par les acteurs et pour l’action. Dépassant Charles Gide, la révolution de la relation entre praticiens et chercheurs proposée par Henri Desroche est aujourd’hui encore mal comprise et largement ignorée. Sans doute en raison de sa radicalité, alors qu’elle a fourni les preuves de son efficacité.

 

Claude Vienney (introduction par Marie-Claire Malo et Annie Camus)


Après l’accès aux indépendances, le deuxième événement important que le mouvement coopératif et l’économie sociale, puis sociale et solidaire, ont connu au cours du XXe siècle est leur évolution dans le cadre d’une économie capitaliste dominante, surtout après la chute du mur de Berlin en 1989. Il revient à Claude Vienney d’avoir produit l’œuvre majeure interprétant cette évolution. Aux côtés d’André Chomel, il a été l’animateur de la RECMA jusqu’au milieu des années 1990. Pendant ces années, la RECMA a accueilli de nombreuses analyses sur les évolutions des coopératives dans un contexte d’accentuation de la concurrence avec les sociétés de capitaux. Claude Vienney est décédé en 2001, après avoir écrit une lettre dans laquelle il exprime sa vision de la RECMA et les conditions qui lui paraissent devoir être respectées pour assurer son avenir.

 

Jacques Moreau (introduction par Chantal Chomel)


L’article de Jacques Moreau, alors président du Groupement national de la coopération (GNC), annonce les travaux à venir de Bernard Enjolras sur les isomorphismes institutionnels (n° 261, 1996). Chantal Chomel montre toute l’actualité des travaux de Jacques Moreau. Elle souligne que le mouvement de banalisation qui se poursuit est « contrebalancé » par un renouvellement de la vie démocratique des coopératives, la multiplication des innovations et l’émergence de nouvelles formes juridiques. Elle précise que les statuts sont fondamentaux mais qu’ils ne suffisent pas à prévenir les coopératives des risques de banalisation. Celles-ci doivent avant tout répondre aux besoins de la société dans laquelle elles sont insérées. Ce qui rappelle opportunément le vœu de Jacques Moreau en faveur d’une économie sociale sans rivages.

 

André Chomel (introduction par Éric Bidet)


Un autre événement (et non des moindres) a transformé la RECMA en profondeur : la décision prise en 1984 d’élargir son objet à l’économie sociale, qui joint les associations et les mutuelles aux coopératives. Ancien directeur financier du Crédit coopératif, André Chomel a également été le collaborateur d’Henri Desroche à Économie et Humanisme, dans les années 1950. Il a fait le lien entre Henri Desroche et Claude Vienney, qui échangeaient peu et dont les choix se tournaient le dos : d’un côté les utopies créatrices, de l’autre les grandes organisations. Or la revue d’Henri Desroche a disparu en 1990 et celui-ci est mort en 1994. André Chomel estimait que la RECMA doit reprendre son héritage. Ainsi, dans les dernières années du XXe siècle et au regard de son histoire, la RECMA s'est trouvée face à la responsabilité de reprendre les deux traditions portées par Claude Vienney et Henri Desroche.


On aura remarqué la domination masculine dans ce survol de la pensée coopérative, qu’on n’y voie pas un choix sexiste de notre part. Ce fait témoigne du fait que, à l’image de tous les mouvements sociaux et populaires, la coopération n’a pas échappé à l’ordinaire institutionnalisation de l’inégalité entre hommes et femmes. Raison de plus pour se féliciter du changement important observé ces deux dernières décennies et repérable dans l’identité des signatures des textes introductifs.
Il ne faudrait pas que le dépassement de cette injustice s’accompagne d’une autre ségrégation qui donnerait le pouvoir des mots et de la pensée aux seuls professionnels de la recherche et de l’enseignement. Sous cet angle, la RECMA a été exemplaire. Ernest Poisson, André Chomel et Jacques Moreau étaient d’éminents praticiens, Georges Fauquet était médecin et les universitaires Charles Gide, Bernard Lavergne, Claude Vienney et Henri Desroche n’en étaient pas moins des militants engagés dans le mouvement coopératif, jusqu’à y jouer des rôles décisifs à l’échelle internationale.

 

La RECMA de la fin du XXe siècle à nos jours


Les textes republiés dans ce numéro s’étalent entre 1921 et 1990. En 1997, André Chomel a proposé à Jean-François Draperi de prendre les rênes de la RECMA. La transmission s’est accompagnée de recommandations proposant à la fois de s’inscrire dans la double filiation Gide/Desroche et Fauquet/Vienney et de renouveler le projet éditorial en vue de pérenniser la revue sans trahir son identité. Ce qui, en substance, peut être résumé en cinq points :

  • maintenir le lien entre praticiens et chercheurs, en le faisant évoluer ;
  • poursuivre l’étude des transformations des entreprises coopératives françaises et européennes ;
  • élargir les approches théoriques à des disciplines autres que l’économie et faire reconnaître la revue auprès des chercheurs ;
  • s’ouvrir à la coopération et à l’économie sociale de l’hémisphère sud ;
  • intégrer les études des nouveaux projets, de la créativité du mouvement et des innovations de l’économie sociale et solidaire. 



Ces transformations n’auraient pu advenir sans que le fonctionnement interne de la revue n'évolue lui aussi. En effet, jusqu’à la fin des années 1990, les articles étaient rédigés par un petit groupe d’amis : les membres du comité de rédaction et leurs réseaux.

 

La plupart des auteurs, à la fois chercheurs et praticiens, étaient à même d’analyser l’économie sociale et solidaire (ESS) à travers leur propre expérience du terrain. Puis, dans le sillage de la reconnaissance universitaire de l’ESS, la RECMA a accueilli de nouvelles signatures de chercheurs dans des champs disciplinaires divers. Aux textes issus des disciplines traditionnellement représentées dans la revue (économie, sociologie et droit), des articles de géographie, d’histoire, et surtout de sciences de gestion se sont ajoutés, de sorte à préserver un équilibre entre les textes académiques et ceux de praticiens. Au sein du comité de rédaction, cet exercice difficile a donné lieu à un débat permanent sur les conditions d’exercice de cet équilibre : son principal intérêt est de rappeler ce trait identitaire de la revue aux collaborateurs.


Au cours des deux premières décennies du XXIe siècle, les mutations subies par l’ESS dans la diversité de ses expressions ont fait émerger des questions inédites, dont la RECMA a rendu compte. L’émergence puis la diffusion rapide du modèle de l’entrepreneuriat social ont généré des controverses sur l’identité de l’ESS, qui a fait l’objet d’une définition plus extensive (donc plus diluée) dans la loi Hamon de 2014. Les branches historiques de l’économie sociale ont été diversement affectées par les réglementations européennes et unanimement mises à l’épreuve du néolibéralisme, ce qui a généré des questionnements récurrents sur les phénomènes de mimétisme et de banalisation, les risques liés à la tentation du gigantisme des organisations, la nécessité d’améliorer le fonctionnement démocratique (rebaptisé « gouvernance ») et le constat d’une certaine atonie militante dans des mouvements depuis longtemps institutionnalisés.

 

Cependant, les articles de la RECMA fondés sur des études de terrain ont simultanément pu témoigner de l’irruption de nouvelles formes de l’économie sociale, soit avec un statut hybride (les SCIC, réglementées en 2001), soit à partir de structures de petite taille, très souvent ancrées sur un territoire et portées par des acteurs qui, au-delà de la satisfaction de leurs besoins propres, visent à promouvoir un nouveau projet de société.


Les évolutions de l’économie sociale au début du XXIe siècle ont aussi été au centre des communications présentées aux colloques de l’Association pour le développement des données sur l’économie sociale (ADDES), fondée en 1983 pour lancer une approche statistique et quantitative de l’économie sociale. La RECMA a régulièrement publié une sélection de ces textes. C’est le fruit d’un long compagnonnage entre la revue centenaire et l’association, qui se traduit aussi par la présence d’un tiers des membres de l’ADDES au sein du comité de rédaction de la RECMA. Ce partenariat connaîtra une nouvelle étape dès le prochain numéro, par l’insertion d’une nouvelle rubrique intitulée « périmètres et mesures de l’économie sociale », réalisée par l’ADDES. Merci à Éric Bidet et à Nadine Richez-Battesti, coprésidents de l’ADDES, pour cette heureuse initiative.


Alors que le début des années 2000 a été marqué par une pluridisciplinarité croissante, au cours de la décennie suivante, la RECMA, qui publiait déjà des articles francophones du Québec ou de Belgique, s’est davantage ouverte aux pays du sud. Avec la publication de dossiers consacrés à l’ESS en Amérique latine (2015), en Asie (2016), au Maghreb (2019) et en Afrique de l’ouest (à paraître en octobre 2021), elle poursuit un double objectif. Heuristique, d’abord, puisqu’il s’agit d’investiguer d’autres conceptions et expériences de l’économie sociale et solidaire que celles relevant de la tradition occidentale (voire strictement française) et de les donner à connaître à notre lectorat. Le second objectif est de permettre le tissage de liens entre les auteurs des pays concernés, auxquels la priorité est donnée pour la rédaction des articles et les auteurs et lecteurs qui constituent la communauté « recmienne ». Si les auteurs étrangers qui soumettent leurs textes sont toujours plus nombreux, il reste à établir des contacts avec les chercheurs et les acteurs de nombreux pays où l’ESS nous reste inconnue.


Une première étape a été franchie en 2021, avec le renouvellement du réseau des correspondants internationaux, qui sera appelé à s’élargir ces prochaines années. Nous remercions et souhaitons la bienvenue aux collègues internationaux qui ont répondu favorablement à notre invitation et qui sont appelés à jouer un rôle essentiel dans la RECMA de demain.

 

(1) Comité de rédaction, REC, 1921, p. 1.
(2) Accessibles en ligne sur le site de Gallica : https://urlz.fr/fWny.
(3) Marc Pénin a assuré la direction scientifique de la publication de l’essentiel de l’œuvre de Charles Gide en douze volumes aux éditions L’Harmattan, entre 1999 et 2010.

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