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Agissements toxiques d'un responsable commercial : la Macif condamnée pour harcèlement moral
Des mois de souffrance pour les salariés, des dizaines d'arrêts maladie, les élus CGT en instances du personnel interpellés des dizaines de fois, l'intervention de la DIRECCTE : il aura fallu du temps et des efforts pour obtenir des résultats dans le dossier que nous allons évoquer.
Les agissements toxiques d'un responsable commercial en Île-de-France
Pour rappel, suite à de nombreux retours de la part de salariés, les élus CGT ont interpellé la direction sur les agissements toxiques d'un responsable commercial en Île-de-France, tels que refus de congés, entrave à la grève, refus d'application de tarifs favorables aux salariés, souffrance au travail, pressions commerciales, non-respect des instances, droit d’expression des salariés, avertissements injustifiés, rappels à l’ordre, convocation de salariés suite à des tracts CGT après visite de site, rapports à tout-va, arrêts maladies à répétitions dans la zone, signature de planning illégaux etc.
Responsables et employés se plaignaient d'un management directif et violent. Des situations gravissimes allant jusqu'à une tentative de suicide ont été portées à la connaissance de la DRH et de la direction. Les élus CGT ont suivi ce dossier de près et ont accompagné les salariés en souffrance.
Nous parlerons aujourd'hui d'une salariée, Mlle D., qui a aujourd'hui quitté l'entreprise suite à un licenciement pour inaptitude et qui a vécu un véritable calvaire sans que la DRH ne lui ai jamais apporté son soutien.
Mlle D. a été recrutée sur un poste de conseillère commerciale en 2006. Tout a commencé par une mutation d'office.
- Mlle D. a eu 8 responsables différents en 8 ans.
- D'octobre 2010 à 2018, elle a subi des actes de harcèlement moral. Plusieurs arrêts maladie ont suivi.
- Le responsable commercial demandait des notations en dessous de ce qu'elle réalisait réellement aux managers.
- En 2015, un manager l'a humiliée et insultée lors d'un entretien annuel. Détruite psychologiquement, elle a ensuite été arrêtée. Tout était fait pour la faire craquer.
- À son retour, elle a reçu un avertissement pour des soi-disant propos déplacés envers son manager.
- Mlle D. a été convoquée par le responsable commercial pour avoir parlé avec les élus CGT. Suite à cet épisode, elle a définitivement été arrêtée le 22 janvier 2018.
- Le 9 avril 2019, Mlle D. a, dans un premier temps, été déclarée inapte avec reclassement impossible dans l'entreprise avant que le médecin du travail ne modifie son rapport afin de permettre un reclassement dans une activité administrative.
- Cassée et fragilisée, Mlle D. a été licenciée pour inaptitude alors que la direction n'a proposé aucun poste de reclassement.
Un entretien avec un élu CFDT a eu lieu en juillet 2017.
Alors que Mlle D. a demandé une enquête pour harcèlement et une protection à la DRH, on lui a répondu : « Je n'ai aucun pouvoir. Je vous propose une alternative : quitter votre agence ou changer de poste ».
Par la suite, elle n'a eu aucune nouvelle de la DRH ni du délégué CFDT. La DRH a disparu de la circulation en juin 2019.
Mlle D. a saisi les prud'hommes de Niort dans ce dossier.
- L'audience s'est déroulée le 24 septembre 2020.
Pour le dossier de Mlle D., les prud'hommes de Niort ont rendu un jugement le 8 janvier, suite à une audience publique : la Macif a été condamnée pour harcèlement moral et absence de prévention des risques psychosociaux.
- Le dossier compte plus de 115 pièces.
Les éléments ne manquent pas pour caractériser le harcèlement moral : mutation de bureau, refus de candidature, commentaires dégradants, évaluations injustes, refus de paiements des heures supplémentaires, refus de congés, changement de poste de travail, insultes, agressions verbales et avertissements.
L'Inspection du travail a saisi le parquet de Versailles.
En janvier 2019, une enquête a été lancée par l'Inspection du travail de Cergy, qui a demandé à ce que le responsable commercial quitte ses fonctions managériales avant le 30 septembre 2019. Il a été nommé à un nouveau poste le 22 septembre, lequel comportait encore des liens managériaux et a amené l'Inspection du travail à saisir le parquet de Versailles pour harcèlement moral notamment. D'autres salariés sont concernés dans ce dossier.
- Le manager en poste a été muté discrètement.
- Dans la foulée, la médecine du travail a rappelé son obligation de prévention des risques psychosociaux à la Macif et a proposé la mise en place d'une psychologue à la direction. Celle-ci a fait le choix de mettre un formateur interne à l'entreprise à disposition afin de rappeler les règles et le « vivre ensemble ».
À noter que la DRH de l'époque, mise en difficulté, a quitté l'entreprise pour « réorienter sa carrière professionnelle ».
Responsabilité totale de l'employeur
La responsabilité de la direction de l'employeur est totale dans ce dossier. En laissant perdurer une situation de souffrance et en soutenant coûte que coûte un responsable commercial qui avait « des résultats commerciaux », en le laissant continuer de sévir, elle a négligé la santé de cette salariée.
D'autres salariés ont été victimes de cette gestion, que cela soit des managers ou des conseillers. La responsabilité incombe à la direction qui initie ces méthodes de gestion qui entraînent souffrance et mal-être parmi les salariés.
Les sujets de souffrance au travail sont traités à la va-vite, sans aucune réelle volonté de changer les choses. La priorité pour la direction est et reste les performances à tout prix, au mépris de la santé des salariés
Souffrance, prises de médicaments, angoisses, arrêts maladie de longue durée, licenciements pour inaptitude et renouvellement énorme des salariés en résultent.
Quand la direction va-t-elle enfin remettre de l'humain dans l'entreprise, ailleurs que dans sa communication vers l'extérieur ?
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