Organisations
Les professionnels de la qualité de vie au travail : une identité en construction
Dans le cadre d’un mémoire de master consacré à la qualité de vie au travail (QVT), nous nous sommes intéressés à l’identité des professionnels qui portent aujourd’hui la QVT dans les entreprises. Qui sont-ils ? Comment se positionnent-ils ? Quelles sont les actions qu’ils mènent au quotidien et comment s’y prennent-ils pour les déployer ? C’est à ces différentes questions que nous avons tenté de répondre.
Qui sont les professionnels de la qualité de vie au travail ?
Notre étude cible en priorité les responsables des politiques de QVT dans les entreprises, la fonction publique et les associations. Mais nous avons aussi interrogé les personnes qui mènent des démarches liées à la QVT : animateurs de communautés de pratiques ou de communautés managériales, responsables de politiques sur les risques psychosociaux… Ce qui est intéressant, c’est que ces professionnels partagent une même vision sur les enjeux de la QVT : redonner la parole au terrain, partir du travail réel, revaloriser le collectif de travail… Pour aller vers plus de performances. Ils précisent que le sujet de la QVT apparaît à un moment où les politiques de RH sont remises en question : l’évaluation individuelle, l’application de dispositifs décidés par les directions générales se sont avérées contre-productives. En synthèse, si les organisations veulent évoluer et s’adapter, elles doivent tenir compte des aspirations de leurs collaborateurs.
Comment se positionnent-ils et quelles sont les actions déployées ?
Ce que nous avons découvert, c’est que ces professionnels se sont positionnés sur des projets QVT en deuxième partie de carrière. Après avoir acquis une expérience solide dans et en dehors de leur structure (beaucoup ont continué à se former au cours de leur vie professionnelle), ils ont eu envie de porter une démarche qui avait du sens pour eux. Nous avons donc rencontré des gens qui voulaient « s’épanouir » au travail et qui voulaient partager cette conviction que le travail est aussi source de plaisir. Beaucoup étaient passionnés par leur nouveau métier.
Nous avons aussi rencontré des acteurs « stratégiques » : pour imposer cette nouvelle façon de voir, il faut agir par étape, sous peine d’être perçu comme un utopiste. Beaucoup d’entre eux ont réussi à faire jouer leur réseau en interne pour mettre en place des démarches innovantes. Je pense par exemple à quelqu'un qui a implanté une communauté managériale dans un univers très bureaucratique, grâce à des « sponsors » haut placés qui lui ont témoigné leur confiance.
Nous avons dressé une typologie des professionnels de la QVT. La personne que je viens de citer fait partie des « développeurs » : ce sont eux qui initient les projets ou les politiques. Dans leur action, ils peuvent s’appuyer sur des « déployeurs » qui vont diffuser la politique en interne. On retrouve par exemple dans cette catégorie les personnes qui animent des « groupes pluridisciplinaires locaux », chargés de débattre du travail et de promouvoir la QVT. Il y a aussi les « chercheurs intervenants » internes. Souvent docteurs en sciences humaines (ergonomie, sociologie…), ils vont par exemple offrir un appui ponctuel à un service chargé de se réorganiser. Même si la profession n’est pas encore très structurée, il existe donc un panel d’acteurs qui peuvent aider les entreprises à développer des politiques sur le sujet de la QVT.
Beaucoup de gens que nous avons interrogés ont besoin de soutien et de moyens. De soutien premièrement car ils ont besoin d’avoir la confiance de la direction pour « oser l’expérimentation », qui est le mode d’action privilégié des démarches de QVT. Il leur faut une certaine marge de manœuvre au départ pour implanter des projets innovants. Ils ont ensuite besoin de moyens humains et financiers pour faire avancer le projet. C’est là que l'on se demande s’il faut ou non formaliser les politiques de QVT dans l’entreprise par le biais d’accords spécifiques. D’un côté, cela permet de donner de la lisibilité et des moyens complémentaires. Prenons l’exemple d’EDF : aujourd’hui, le pôle « innovation, diversité et performances au travail » qui déploie l’accord de QVT est doté d’une équipe de conseil interne qui peut intervenir à la demande des services pour les aider à implanter une nouvelle organisation ou un nouveau produit. Mais d’un autre côté, s’il y a un accord, celui-ci doit rester suffisamment souple pour permettre des démarches novatrices. C’est pourquoi il est préférable de procéder par étapes et par exemple de signer un accord de méthode avant de signer un accord de fond.
Le 7 avril prochain, Ariane Conseil organisera un petit-déjeuner gratuit sur les enjeux et les acteurs de la santé et la qualité de vie au travail, à l’hôtel Banke à Paris (9h00-11h00). Une table-ronde animée par Rodolphe Helderlé, responsable éditorial de Miroir Social, avec les interventions de : Air France, Banque de France, CFE-CGC, EDF, Elior Concessions Autoroutes.
- Santé au travail parrainé par Groupe Technologia