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Harcèlement moral : un effet de mode qui ne prend plus ?
L’« effet de mode » (parfois aussi appelé effet bandwagon ; en anglais, « bandwagon effect » qui signifie littéralement « wagon où se trouve l'orchestre ») définit l'effet d'un comportement grégaire dans lequel les individus se conduisent comme des moutons de Panurge. Soit le fait que certains esprits indécis finissent par prendre tardivement leur décision en imitant ce que pense ou fait la majorité…
Commençons par rattacher cet « effet de mode » à celui concernant le harcèlement moral. Celui-ci se manifeste par une conduite abusive qui par des gestes, paroles, comportements, attitudes répétés ou systématiques vise à dégrader les conditions de vie et/ou conditions de travail de quelqu'un. Ces pratiques peuvent causer des troubles psychiques ou physiques mettant en danger la santé de la victime...
Il faut bien comprendre que le harcèlement moral est une technique de destruction et non un syndrome clinique. C’est pourquoi, cette notion reste encore et toujours difficile à appréhender compte tenu de ses frontières floues. La jurisprudence de la Cour de cassation s’avère riche en la matière et elle n’a de cesse de nous fournir des illustrations de ce qui semble être devenu « un phénomène de mode »…
Dans cette affaire, une société qui exploitait plusieurs fonds de commerce d'horlogerie-bijouterie dans l'enceinte de l'aéroport de Paris Charles de Gaulle avait engagé un salarié en qualité de chef d'équipe débutant. Son contrat de travail précisait que ce dernier exercerait ses fonctions dans toutes les boutiques de l'aéroport tout en détaillant ses attributions. Environ un an après son embauche, le salarié a été désigné délégué syndical par le syndicat CGT. Par la suite, il a été affecté à une autre boutique et a accédé à un poste de chef d'équipe. Les années suivantes, il a continué d'êtrer muté de boutiques en boutiques… Après son retour d’arrêt de travail, il a été licencié pour inaptitude, avec impossibilité de reclassement conformément à l’autorisation donnée par l'inspecteur du travail. Contestant cette procédure, il a saisi la juridiction prud'homale afin de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur, notamment pour cause de harcèlement moral.
Quid juris : Ce chef d’équipe syndiqué était-il devenu victime d’un harcèlement moral de sa direction ?
Pour condamner l'employeur à des dommages et intérêts au titre d'un harcèlement moral, l'arrêt de la Cour d’appel de Paris avait retenu qu’il n'était pas possible d'attribuer exclusivement à une dégradation de ses conditions de travail ses premiers malaises tels que décrits dans le certificat médical.
En revanche, les certificats médicaux postérieurs, les traitements et prise en charge par une unité hospitalière de pathologie professionnelle, témoignaient manifestement et suffisamment de la dégradation de l'état de santé du salarié liée à ses conditions de travail et à la persistance de l'employeur à vouloir l'affecter dans un kiosque de 4 m².
Il convient de se reporter au Code du travail qui encadre la définition du harcèlement moral en précisant qu’aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Dès lors, la décision ferme et isolée de l'employeur visant à modifier l'affectation de son collaborateur ne pouvait s'analyser en agissements répétés constitutifs de harcèlement moral.
Aussi, la Haute Juridiction a infirmé l’arrêt rendu par les magistrats parisiens et condamné aux dépens le salarié chef d’équipe du fait de l’absence d'autres agissements que la décision maintenue de son employeur de l’affecter à un local commercial d'une superficie réduite.
Cependant, tout employeur doit rester vigilant car, il est tenu envers ses salariés à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, notamment en matière de harcèlement moral. Aussi, il doit prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral sachant qu’il dispose d’une totale liberté dans le choix des moyens à mettre en œuvre.
On ne répètera jamais assez qu’au moment où le harcèlement moral a atteint « son pic de notoriété » dans les litiges, on ne saurait être trop prudent de prendre les devants dans les entreprises en instaurant une politique de prévention active et d’actualisation régulière. Après tout, les « effets de mode » changent, non ?
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