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01 / 06 / 2010 | 122 vues
Reixludwig Patricia Renée / Membre
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Harcèlement moral : un point sur la jurisprudence

La Cour de Cassation (Chambre sociale, le 26 mai 2010, cassation partielle) vient de rendre un arrêt important concernant la notion de durée des faits.

La Cour de Cassation pose un attendu de principe : « les faits constitutifs de harcèlement moral peuvent se dérouler sur une brève période ».


En conséquence, si le salarié produit des documents médicaux relatifs à une altération de son état de santé et prouve que des agissements qualifiables de harcèlement moral, tels qu'une rétrogradation, des menaces et des propos dégradants, ont été commis par l'employeur, alors la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral est fondée et justifiée, peu importe la durée de ces faits.

Un mode de preuve particulier


Le mode de preuve a été aménagé en faveur de la victime : le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et l’employeur doit prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement.

En pratique, cela signifie que :

  • le salarié doit établir la matérialité des faits qu’il invoque (cass. soc., 31 mars 2009, n° 07-45264 FD) ;
  • les juges doivent appréhender ces faits dans leur ensemble et rechercher s’ils permettent de présumer l’existence du harcèlement allégué (cass. soc., 30 avril 2009, n° 07-43219, BC V n° 120) ;
  • il revient à l’employeur d’établir que ces faits ne caractérisent pas une situation de harcèlement (c. trav., art. L. 1154-1 ; cass. soc., 24 septembre 2008, n° 06-43504, 06-45579, 06-45747 et 06-45794, BC V n° 175 ; cass. soc., 24 septembre 2008, n° 06-45517, BC V n° 177).

Source : revue fiduciaire
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le salarié peut prouver l’existence d’un harcèlement moral en produisant notamment des certificats médicaux, des courriers, des notes de service, des témoignages.

Exemples de faits ou de comportements qui caractérisent le harcèlement moral et cas de jurisprudence


Surnoms ridicules, reproches constants, volonté d'exclure le salarié du groupe, humiliations, discrimination par rapport aux autres salariés, retrait de toute responsabilité, tâches dégradantes ou sans rapport avec sa qualification, menaces, insultes ou injures.

La Cour de Cassation a considéré que :

  • le simple fait d'infliger deux sanctions disciplinaires en un mois, même irrégulières, ne constituait pas en soi un acte de harcèlement moral (Cour de Cassation, Chambre sociale, 16 juin 2004) ;
  • le fait d'engager à l'égard du même salarié plusieurs procédures de licenciement infructueuses pour motif disciplinaire, ne constituait pas en soi un acte de harcèlement moral (Cour de Cassation, Chambre sociale,8 janvier 2003) ;
  • le fait d'affecter une salariée dans un local exigu et sans outils de travail lors de sa reprise de travail, que ledit local était dépourvu d'un chauffage décent, que l'employeur avait également volontairement isolé la salariée des autres salariés de l'entreprise en leur demandant de ne plus lui parler, qu'il avait été encore jusqu'à mettre en doute son équilibre psychologique et avait eu un comportement excessivement autoritaire à son égard est constitutif de harcèlement (Cour de cassation, arrêt du 29 juin 2005) ;
  • le fait d'installer des salariés dans un bâtiment préfabriqué dépourvu d'électricité et de chauffage peut constituer un indice de harcèlement (pour la Cour de Cassation, les juges auraient dû rechercher si l'ensemble de ces éléments ne permettait pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral. Ceux-ci n'ayant pas effectué ces recherches, la Cour de Cassation a cassé leur décision et renvoyé l'affaire devant la Cour d'Appel de Limoges (Cass. soc., 31 mars 2010).

Responsabilité de l'employeur

  • Dans un autre arrêt rendu le 21 juin 2006, la Cour de Cassation s’est prononcée sur les responsabilités civiles qui peuvent être mises en oeuvre par un salarié victime de harcèlement moral. Ainsi, la victime pourra agir contre le « harceleur » mais également, même en l'absence de faute de celui-ci, contre son employeur (arrêt 1733 du 21 juin 2006).
Dans cette affaire, six salariés d’une association avaient porté plainte contre le directeur pour harcèlement moral, celui-ci s’étant montré « brutal, grossier, humiliant et injurieux » à leur égard. Le directeur s’était pourvu en cassation, arguant qu’au lieu de sa responsabilité, c’est celle de son employeur qui aurait dû être engagée, car il avait agi dans le cadre de sa mission.

La Cour de Cassation a jugé « qu’engage sa responsabilité personnelle à l’égard de ses subordonnés le salarié qui leur fait subir intentionnellement des agissements répétés de harcèlement moral » et que l’employeur devait aussi être mis en cause, car « l’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, notamment en matière de harcèlement moral, et l’absence de faute de sa part ne peut l’exonérer de sa responsabilité ».

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