Organisations
Portabilité : création d’un nouveau droit
Dans nos sociétés occidentales, le travail est reconnu comme une valeur centrale nécessaire pour la construction de l’individu et pour la cohésion sociale ; la sécurité qui en découle est fondamentale.
La Protection Sociale forgée tout au long du 20 ème siècle et surtout à la suite des ordonnances de 45, est aujourd’hui mise à mal car nous vivons une situation de chômage durable, où la multiplication des contrats de courte durée et l’émergence des travailleurs pauvres bousculent et perturbent notre représentation du contrat social et du parcours professionnel.
Pour l’heure le rattachement des droits des salariés à leur seul contrat de travail génère une insécurité croissante. Cette état de fait regrettable à plus d’un titre, donne une légitimité de fait à la « portabilité des droits »
- Le cadre que constitue la sécurisation du parcours professionnel distingue deux dispositifs : l’un législatif et le second conventionnel, organisant chacun le maintien des garanties après la rupture du contrat de travail.
L’article 4 de la loi Evin n° 8961009 du 31 décembre 1989
Il prévoit l’obligation d’assurer aux retraités, chômeurs ou invalides le maintien de la couverture des frais de santé de leur contrat collectif obligatoire. Cette disposition s’effectue à la demande de l’ex-salarié pendant six mois à partir de la rupture du contrat de travail. Naît alors un contrat individuel d’assurance frais de santé avec l’organisme assureur. Le tarif des cotisations ne peut être supérieur de plus de 50 % des tarifs globaux applicables aux salariés actifs (décret 90-726 du 30/09/1990).
- La jurisprudence récente (cas « Azoulay » Cour d’Appel de Lyon du 9 février 2009) a ré-ouvert un débat ancien sur l’interprétation de l’obligation de « maintenir cette couverture ». Pour certains cet arrêt de la Cour de Cassation « sonne le glas des régimes d’accueil » moins avantageux pour les ex salariés ; les organismes assureurs vont devoir réviser les modalités des contrats individuels.
L’avenant n° 3 du 18 mai 2009 à l’Accord Interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail (article 14)
Il permet aux salariés licenciés de bénéficier, au 1er juillet 2009, de la portabilité des garanties en santé et prévoyance en cas de prise en charge par le régime d’assurance chômage des ex salariés, pour une durée égale à celle du dernier contrat de travail dans la limite de neuf mois.
Exemple : pour un CDD d’un mois, le salarié pourra garder le bénéfice de ses garanties prévoyance et complémentaire santé pendant un mois. Force Ouvrière tenait à inclure les CDD même de courtes durées et cela faisait partie de ses revendications premières.
L’article 14 de l’ANI engage la responsabilité de l’employeur.
Conditions
« Le bénéfice du maintien de ces garanties est subordonné à la condition que les droits à couverture complémentaire aient été ouverts chez le dernier employeur » et que le salarié n’est pas fait l’objet d’un licenciement pour faute lourde.
Financement du maintien des garanties
« Il est assuré conjointement par l’ancien employeur et l’ancien salarié dans les proportions et dans les conditions applicables aux salariés de l’entreprise ou par un système de mutualisation défini par accord collectif. A défaut d’accord collectif, ce système de mutualisation peut être mis en place dans les autres conditions définies à l’article L.91161 du code de la sécurité sociale ».
Deux situations se distinguent alors :
- soit un système de cofinancement : l’ancien employeur et l’ancien salarié participent alors « dans les proportions et dans les conditions applicables aux salariés de l’entreprise »;
- soit un système de mutualisation mis en place au niveau de la branche ou de l’entreprise ; le maintien des garanties est alors intégré dans le contrat collectif et donc les salariés licenciés ou en fin de contrat pourront bénéficier du maintien des garanties « gratuitement » pendant la période en question.
La Confédération Force Ouvrière engage les Fédérations à négocier dans les branches professionnelles afin qu’une mutualisation soit mise en place. Déjà certains secteurs d’activité l’ont inclus dans leurs accords.
Modalités de mise en place
Si le salarié souhaite renoncer à la portabilité de ces garanties il devra le notifier à l’employeur par écrit dans les 10 jours suivant la date de cessation du contrat de travail. En cas de non paiement de sa quote-part à la date d’échéance des cotisations, l’ancien employeur sera libéré de toute obligation et il perdra le bénéfice des garanties qu’il aurait perçu au titre de la même période.
Obligation d’informations réciproques
Le salarié doit fournir à son ancien employeur la justification de sa prise en charge par le régime d’assurance chômage et de son côté l’employeur devra remettre au salarié une notice d’information fournie par l’organisme assureur, mentionnant ce nouveau dispositif.
- Pour permettre l’articulation des deux dispositifs, les partenaires sociaux ont demandé aux pouvoirs publics, dans l’avenant 3 du 18 mai à l’article 14 de l’ANI, de permettre que le délai de six mois de la loi Evin soit reporté à la date à laquelle la portabilité des droits prend fin.
En conclusion : certes l’avenant signé par quatre organisations syndicales n’est pas parfait, il ouvre néanmoins une voie dans laquelle nous devons nous engager,.c’est ainsi que nous avons construit notre dialogue social. Il faudra franchir de nouvelles étapes afin de rendre effectif à tous les salariés ce nouveau droit facteur de progrès social.
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