Organisations
La réforme de la formation, c’est terminé
Le 12 décembre, les partenaires sociaux sont censés conclure la phase des négociations interprofessionnelles sur la réforme de la formation.
Nous sommes désormais plusieurs à le penser, la réforme de la formation est dores et déjà un échec.
Il n'y aura aucune réforme de la formation ; que les partenaires sociaux parviennent demain à un accord ou pas, c'est plié.
Comme l'a écrit le sociologue Michel Crozier, dans un livre paru en 1979, on ne change pas une société par décret. La formation est un processus personnel d'acceptation et d'appropriation du changement. Personne ne peut apprendre à la place d'une autre personne et on ne peut contraindre personne à apprendre (de là les piètres résultats de l'école).
- L'ANI de 2003 et la loi de 2004 suffisaient pour la formation tout au long de la vie.
La loi avait simplement besoin d'être améliorée avec, par exemple, un DIF obligatoirement financé par l'employeur (comme les congés payés) et opposable à ce même employeur (comme le CIF).
La loi de 2009 a été un échec car elle a été écrite en pensant à ne froisser personne en prévision de la mère des batailles de 2010, la réforme des retraites (demi-échec aussi).
Il est parfaitement stupide et contreproductif de prétendre changer les lois en matière de formation tous les 3 ans. C'est la meilleure façon de ne jamais réussir à changer. La formation n’est pas de la communication (pas plus que la politique, d’ailleurs).
En matière d’éducation et de formation, il faut au moins 20 ans pour changer les mentalités, inverser le cours des choses. Les Français veulent des résultats rapides mais sans persévérer ; sans efforts soutenus et durables, nous n’obtiendrons rien tant collectivement qu’individuellement.
Par ailleurs, la formation ne pourra fonctionner correctement tant que l'État ne se sera pas réformé lui même et en premier lieu cet ingouvernable mammouth qu'on appelle Éducation nationale et qui handicape désormais tout le pays.
Il faut enfin que chaque Français balaie devant sa porte : a-t-il envie de se former, de changer ? Pas sûr quand on apprend que plus de 70 % d'entre eux estiment qu'ils n'en ont pas besoin (la formation, c'est bon pour le voisin ou le collègue)
Quant aux menaces récurrentes de l'État de légiférer sans les partenaires sociaux, c'est du bluff. L'État n'a plus d'expertise dans ce domaine. Quand on voit l'indigence des pré-rapports réalisés en 6 mois par l'IGAS sur le CPF et le conseil en évolution professionnelle, quand on rencontre des conseillers du Ministère du Travail, on se rend compte que l'expertise n'est plus dans le public. C'est le privé qui peut encore sauver le pays mais encore faudrait-il ne pas l'étouffer sous la règlementation et le poids des charges excessives.