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La Justice doit être rentable : l'analyse prud’homale d'une spécialiste du droit social
Le syndicat FO Magistrats a organisé fin novembre à la Cour d'Appel de Paris un colloque sur le thême « la justice doit elle être rentable » ?
Professeur de droit à Paris, directrice de recherche au CNRS, Évelyne Serverin participait à ce colloque.
Cette spécialiste du droit social a notamment étudié la sphère prud’homale et ses difficultés croissantes à rendre la justice en temps voulu. « Il y a eu en 2012 une véritable rafale de condamnations de l’État français (jugements du TGI de Paris) pour déni de justice par les retards des délais de procédures », a rappelé Évelyne Serverin.
Dans certaines juridictions engorgées, notamment celles de la région parisienne, le salarié justiciable doit en effet attendre de longs mois, parfois des années, pour obtenir un jugement.
Si le délai moyen national pour le traitement d’une affaire reste stable avec 13,5 mois en 2010, cela cache de grandes disparités.
En 2009, il fallait ainsi attendre 19,2 mois en moyenne à Bobigny. Ce délai est passé à 22,9 mois en 2010.
Autre exemple, à Nanterre, la moyenne d’attente est passée de 19 à 21,4 mois. « Aux délais raisonnables peuvent donc se substituer des durées excessives, qui peuvent atteindre quatre années pour l’obtention d’un jugement simple ».
L’État a en effet choisi de mesurer l’efficience de la justice à partir de l’offre de services, censée permettre d’aller vite dans le traitement des affaires.
Pour la juriste, cet axe est lié à la notion de ressources budgétaires. L’offre va ainsi être un outil servant à mesurer ce qu’est la meilleure dépense pour obtenir (à l’instar d’une usine) « des biens produits qui seront les affaires terminées ! ». La réforme de la carte judiciaire en 2010 relève de ce raisonnement. « La logique de l’ajustement par l’offre l’a emporté, cela en supprimant les plus petites juridictions et en laissant filer les grandes, cependant déjà surchargées ».
Évelyne Serverin constate que tout cela s’est fait « sans tenir compte de la demande locale, des caractéristiques spécifiques des bassins d’emploi, leurs évolutions, leurs besoins en moyens ».
Soixante-deux conseils de prud’hommes ont ainsi été supprimés et la réforme ne prévoit aucun ajustement à venir en fonction des besoins qui pourraient être constatés. « Personne ne s’y intéresse ! », regrette Évelyne Serverin.
Source> FO Hebdo
Professeur de droit à Paris, directrice de recherche au CNRS, Évelyne Serverin participait à ce colloque.
Cette spécialiste du droit social a notamment étudié la sphère prud’homale et ses difficultés croissantes à rendre la justice en temps voulu. « Il y a eu en 2012 une véritable rafale de condamnations de l’État français (jugements du TGI de Paris) pour déni de justice par les retards des délais de procédures », a rappelé Évelyne Serverin.
Dans certaines juridictions engorgées, notamment celles de la région parisienne, le salarié justiciable doit en effet attendre de longs mois, parfois des années, pour obtenir un jugement.
Si le délai moyen national pour le traitement d’une affaire reste stable avec 13,5 mois en 2010, cela cache de grandes disparités.
En 2009, il fallait ainsi attendre 19,2 mois en moyenne à Bobigny. Ce délai est passé à 22,9 mois en 2010.
Autre exemple, à Nanterre, la moyenne d’attente est passée de 19 à 21,4 mois. « Aux délais raisonnables peuvent donc se substituer des durées excessives, qui peuvent atteindre quatre années pour l’obtention d’un jugement simple ».
Logique de l'offre
Ces dysfonctionnements préjudiciables aux salariés ne sont pas le fait du hasard. Pour Évelyne Serverin, les projets annuels de performance (PAP) et autres indicateurs statistiques, de plus en plus prônés par l’État pour organiser le fonctionnement de la justice, ne s’intéressent pas à la demande réelle, aux besoins des tribunaux.L’État a en effet choisi de mesurer l’efficience de la justice à partir de l’offre de services, censée permettre d’aller vite dans le traitement des affaires.
Pour la juriste, cet axe est lié à la notion de ressources budgétaires. L’offre va ainsi être un outil servant à mesurer ce qu’est la meilleure dépense pour obtenir (à l’instar d’une usine) « des biens produits qui seront les affaires terminées ! ». La réforme de la carte judiciaire en 2010 relève de ce raisonnement. « La logique de l’ajustement par l’offre l’a emporté, cela en supprimant les plus petites juridictions et en laissant filer les grandes, cependant déjà surchargées ».
Évelyne Serverin constate que tout cela s’est fait « sans tenir compte de la demande locale, des caractéristiques spécifiques des bassins d’emploi, leurs évolutions, leurs besoins en moyens ».
Soixante-deux conseils de prud’hommes ont ainsi été supprimés et la réforme ne prévoit aucun ajustement à venir en fonction des besoins qui pourraient être constatés. « Personne ne s’y intéresse ! », regrette Évelyne Serverin.
Source> FO Hebdo
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