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29 / 06 / 2016 | 214 vues
Roman Bernier / Membre
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Transport aérien : quand les politiques RH tuent les « low-costs »

Le modèle de ressources humaines des compagnies à bas coût, basé sur un travail à faible coût et une extrême flexibilité, connaît de sérieux revers depuis quelques années. Au point de mettre en danger des compagnies a priori imperméables à la contestation sociale.

N’en déplaise aux pilotes d’Air France, « low-cost » n’est plus synonyme d’exploitation sociale. Ou en tout cas, plus pour longtemps. Depuis quelques années, on assiste à un long mais constant revirement des pouvoirs au sein des compagnies aériennes à bas coût. Si le chemin est encore long, les équipages (pilotes et personnel de cabine) commencent peu à peu à avoir du poids.

Grève des pilotes : les casseurs de grève d’EasyJet au pilori

Par le passé, EasyJet a déjà dû faire face à plusieurs grèves de pilotes, notamment en France. La compagnie à bas coût a toujours su, par un habile jeu de vases communicants, réussir à rendre ces grèves caduques ou du moins indolores.

Mais les grèves continuent de se répéter, à l’image de cette grève des pilotes néerlandais du syndicat VNV, qui protestent contre leur temps de travail et le non-paiement de leurs arrêts maladie. Si EasyJet a de nouveau essayé de « minimiser l'effet de cette grève » sur son programme de vols, la situation s’est compliquée quand l’association des pilotes de ligne néerlandais a dénoncé les plans d’EasyJet à la justice. La compagnie avait en effet envisagé d’utiliser des casseurs de grève dans le but de faire face à l’absence des 60 navigants. De fait, l’agence néerlandaise de presse a rapporté que la grève de 24 heures de vendredi dernier a bel et bien été annulée, pour que la justice se saisisse mieux de l’affaire !

Gageons que le remède anti-grève d’EasyJet ne fonctionnera plus.

Lufthansa : le PNC boude la filiale à bas coût du groupe

Mais les compagnies à bas coût historiques ne sont pas les seules à connaître des difficultés avec leur personnel.

Le groupe Lufthansa a ainsi le plus grand mal à recruter des stewards et des hôtesses de l’air pour pérenniser ses opérations, dans une Allemagne où le chômage est historiquement bas. Sur les 1 400 navigants nécessaires pour 2016, le transporteur allemand n’a réussi à en recruter que 500, soit à peine plus d’un tiers. En effet, les contrats courts et peu rémunérés de sa filiale à bas coût (Eurowings) sont peu attractifs.

Dans un objectif de reconstruction, la compagnie essaye désespérément de maintenir ses dépenses. Pour ce faire, elle a troqué CDI contre contrat courts dans le but d’obtenir jusqu’à 2 800 membres du personnel navigant en cabine (PNC) ou hôtesses de l’air. Mais ces contrats n’intéressent plus guère les employés : « traditionnellement la moitié des candidats viennent de l’hôtellerie-restauration mais au vu des perspectives offertes par ce secteur et avec des conditions de travail qui se détériorent chez Lufthansa, plus personne ne postule », explique Nicoley Baublies, porte-parole du syndicat de PNC UFO.

Par conséquent, pour mettre fin à une dispute juridique avec l’UFO, Lufthansa a accepté de recruter plus d’employés à plein temps. Mais pour un salaire de 1 417 € par mois (à peine plus que le salaire minimum allemand), l’entreprise a cessé d’être attractive.

La généralisation du modèle à bas coût donne-t-elle du pouvoir aux salariés ?

Il y a vingt ans, il aurait été difficile de penser que le pouvoir puisse être au moins des salariés au sein de compagnies à bas coût. Dès lors, comment l’expliquer ? Le fait est que désormais, les compagnies à bas coût sont devenues la norme. Ils comptent parmi les employeurs aussi importants que les compagnies classiques.

Il arrive même que des compagnies aériennes traditionnelles comme Lufthansa recrutent dans des conditions s’approchant de celles d’EasyJet. Cette généralisation semble avoir un parallèle : les salariés semblent désormais capables de faire remonter leurs exigences. Même Ryanair, bastion de l’anti-syndicalisme affiché, s’est ainsi vue mise à mal à plusieurs reprises devant la justice ou dans les médias. Il s’agit dans les deux cas d’hôtesses de l’air (Alessandra Cocca en Norvège et Sofia Lichani en France) qui semblent désormais intouchables. À cela s’ajoutent les différentes enquêtes de la Commission européenne sur les faux indépendants de l’aérien et la représentativité des pilotes via des syndicats ad hoc.

Le modèle à bas coût s’est largement répandu comme étant le modèle économique favori pour les vols intra-européens. Mais ce que de nombreuses procédures en justice n’ont pas réussi à accomplir, la généralisation du modèle et la montée des travailleurs aériens semblent de plus en plus près de le réaliser.

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