La semaine de 4 jours : Que faut-il en penser?
La recherche d'équilibre entre la vie au travail et la vie professionnelle a pris, depuis la crise sanitaire et le développement du télétravail (remis d'ailleurs actuellement en question par certaines entreprises) une place importante dans les préoccupations des salariés et devra assurément être intégrée désormais dans les sujets de négociations avec les employeurs.
Dans ce cadre, la semaine de 4 jours qui a refait surface, depuis quelques mois notamment, interroge et suscite réflexions en France (où certaines entreprises ont commencé à tester le dispositif) comme dans certains autres pays européens.
On pourra prendre connaissance du rapport de la mission d’information parlementaire présentée à la commission des affaires sociales fin octobre.
Il apporte une contribution intéressante sur ce sujet d'actualité car selon un étude de l'IFOP publiée il y a quelques mois, 70% des personnes interrogées se disent favorables à l'instauration de la semaine de 4 Jours.
Cela dit il conviendra de bien être au clair sur les termes du débat, car comme le souligne le rapport, sous cette terminologie deux notions bien différentes doivent être distinguées:
- La semaine en quatre jours
- et la semaine de quatre jours
La semaine en quatre jours qui correspond à une répartition de la durée du travail hebdomadaire sur quatre jours plutôt que cinq, sans réduction concomitante de la durée globale du travail. On parle volontiers de semaine de travail « comprimée » dans cette situation.
La semaine de quatre jours qui correspond à une répartition de la durée du travail hebdomadaire sur quatre jours plutôt que cinq accompagnée d’une réduction de la durée globale du travail.
Or on utilise en général la formulation « semaine de quatre jours » pour faire référence à l’un ou l’autre de ces schémas sans que les choses soient clairement affichées dans les questionnements.
En conclusion des observations et des réflexions des auteurs de ce rapport, on notera que s'ils se montrent plutôt ouverts sur le sujet, ils considèrent qu'il soulève beaucoup d’interrogations complexes qui, toutes ou presque, appellent des réponses nuancées, mesurées, prudentes.
Pour les rapporteurs un certain nombre d'enseignements sont à en tirer.
Pour eux le dispositif :
- " n’est ni un remède universel aux maux qui affectent le monde du travail, ni une fausse bonne idée sans avenir. " En d’autres termes et pour résumer les choses simplement, il peut contribuer, dans certains cas et sous certaines conditions, à l’amélioration des situations professionnelles et personnelles des travailleurs d’une part, des performances économiques des entreprises d’autre part."
-" peut être établi sans difficulté sur la base des normes juridiques en vigueur." Par voie de conséquence, point d'importance, l’intervention du législateur ne paraît donc pas nécessaire.
Ils ajoutent "qu'en tout état de cause, il ne saurait être envisagé d’inscrire dans la loi une quelconque disposition sur la généralisation de son déploiement dans les sociétés privées ou les administrations publiques. Pareille solution serait en tous points irréaliste et dénuée de sens."
- Et en conséquence: "il convient de laisser les entreprises choisir, dans le respect des règles d’ordre public, le mode d’organisation du temps de travail le plus approprié pour elles." ...." selon des formules variées, adaptables à leurs spécificités."... avec "une souplesse qu’il convient de préserver."
En terme de méthode, les rapporteurs suggèrent:
- de faire précéder la négociation à mener d’un recensement des stipulations conventionnelles ou des usages applicables dans la société dans le champ de l’aménagement du temps de travail.
- de conclure des accords accord à durée déterminée, considérant qu'au regard de l’ampleur du changement, il est préférable d’organiser la mutation vers la semaine de quatre jours en deux temps :
= d’abord de façon expérimentale, de sorte qu’il soit aisé de revenir en arrière s’il y a lieu ;
= ensuite, après évaluation des effets, ( en terme d'évolution du chiffre d’affaires, de la rentabilité, de la productivité, du renouvellement des effectifs, de la qualité de vie au travail, de l’absentéisme, de la satisfaction de la clientèle, etc.) et si les résultats sont satisfaisants, décider le maintien en vigueur sous forme expérimentale, la pérennisation ou l’abandon.
Il semble que cela soit la méthode d'ores et déjà la plus usitée par les organisations, en France et à l’étranger, et qu’elle ait fait ses preuves .
Qu'en est-il en Europe?
Fin 2023 quarante-cinq entreprises allemandes de toutes tailles et de divers secteurs ont décidé de tester pendant six mois la semaine de travail de quatre jours avec conservation de salaire.
Les résultats qui ont été communiqués récemment sont impressionnants....En effet, si 20 % des entreprises considèrent que quelques ajustements sont nécessaires, 73 % des entreprises participantes ne souhaitent pas revenir à la semaine traditionnelle de cinq jours, et 20 % seulement souhaitent revenir à la semaine de cinq jours. Quant aux 7 % restants, ils restent indécis.
Cette étude confirme une tendance observée dans d'autres pays (évoqués dans le rapport parlementaire: Le Royaume-Uni , l'Italie, l’Espagne ,le Portugal la Belgique, l'Allemagne..) ayant testé ce modèle et mis en place selon des modalités très diverses...
Pour mémoire: L’Islande fut l’un des pays précurseur sur la semaine de 4 journées de travail. Le pays a testé cette mesure entre 2015 et 2019. Aujourd’hui, près de 90% de la population bénéficie d’un aménagement de son temps de travail.