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Agroalimentaire : Doux, une catastrophe sociale
La tourmente que connaît le groupe Doux a pris ces derniers mois une ampleur nationale et conduit le gouvernement à s'impliquer dans la recherche d'une solution pour les salariés touchés par l'effondrement de l'entreprise. Jusqu’au 1er juin 2012, le groupe Doux employait 3 695 personnes en France, dont 711 en contrat à durée déterminée (CDD) et 9 800 dans le monde.
Près de 800 éleveurs français étaient aussi sous contrat avec l'industriel et 2 000 salariés de sociétés de transport travaillaient également pour lui. Aujourd’hui, suite à un endettement record de plus de 400 millions d’euros et à l’incapacité de payer ses dettes, le groupe a été démantelé et 991 salariés ont perdu leur emploi. FO, présent sur plusieurs sites de production, s’est battu sur tous les fronts afin de limiter la casse. Récit de ce que chacun considère comme un immense gâchis.
Cela faisait des années que le groupe croulait sous une dette écrasante qui a atteint 430 millions d’euros cette année, dont 200 millions dus aux seules activités menées au Brésil, véritable point noir et erreur stratégique. Bien que le groupe n’ait pas connu de perte, il était dans l’incapacité de payer ses créanciers et ses fournisseurs et de se défaire de ses activités brésiliennes. À cette mauvaise gestion s’est ajouté le manque d’investissement des quinze dernières années, qui a conduit au vieillissement, voire à l’obsolescence des outils de production, et n’a pas aidé le groupe à se développer sur le marché intérieur dans un secteur où la concurrence est rude.
Une décision de justice critiquée
Face à de telles difficultés, le tribunal de commerce de Quimper a décidé le 1er juin 2012 de mettre le groupe en redressement judiciaire. Les pôles surgelés et les produits élaborés restent sous la conduite de Charles Doux et sous observation jusqu’au 30 novembre, tandis que le pôle frais a été démantelé et vendu aux plus offrants.
Cette décision a été vivement critiquée par Nadine Hourmant, déléguée syndicale centrale FO qui a été de toutes les batailles sur ce dossier: « FO fait peu confiance à la direction de Doux, vu sa gestion passée qui nous a mené là où nous en sommes aujourd’hui. Dans ces conditions, comment croire au plan de continuité de Charles Doux ? »
Les élus FO du CE de Châteaulin, où FO est majoritaire, ont fait appel de cette décision, appel retenu par la Cour d’Appel de Rennes. D’autre part, le comité d’entreprise congelé-découpe a adressé une requête au Procureur de la République pour qu’il examine la gestion du groupe et définisse la part de responsabilité de Charles Doux et de ses associés dans ce marasme. Alors que le signal d’alarme aurait pu être tiré depuis très longtemps, rien n’a été fait pour redresser les comptes et pire encore, des millions d’euros de dividendes ont été versés. Le but de cette requête est de mettre à contribution le patrimoine des actionnaires pour améliorer le PSE.
Près d’un millier de salariés licenciés
Lundi 10 septembre 2012, le tribunal de commerce de Quimper a décidé de valider les offres de reprise partielle de cinq sites sur les huit du pôle frais du groupe volailler Doux. Ainsi, 700 emplois seraient sauvegardés sur environ 1 700. Les sites repris partiellement sont ceux de Blancafort (Cher), Boynes (Loiret), Laval (Mayenne), Pleucadeuc et Sérent (Morbihan). Les sites de Graincourt (Pas-de-Calais), La Vraie-Croix (Morbihan), et Le Pontet (Vaucluse) n’ont, eux, pas fait l’objet d’offre de reprise.
Se tourner vers l’avenir
Pour Didier Pieux, secrétaire fédéral FGTA-FO en charge du dossier, il faut désormais se préparer à un nouveau combat, celui du PSE : « Le budget alloué à ce PSE atteint 2 000 euros par personne. C’est ridicule, vu le prix des formations. En plus, chez les salariés de Doux, dont les moyennes d’âge et d’ancienneté dans l’entreprise sont élevées, il y a très souvent un déficit d’employabilité et ils souffrent régulièrement de TMS, vu les conditions de travail qu’ils ont connues. Cette absence de formation et de prise en compte des évolutions professionnelles par le groupe Doux ne va pas faciliter les reconversions ».
Si le gouvernement a annoncé des mesures telles que le maintien du salaire pendant un an, ce que Didier Pieux juge comme étant un minimum, FO veillera à leur application sur le terrain et continuera à soutenir tous les salariés et ceux qui sont restés sur le carreau.